sécurité des biens et des personnes
Question de :
M. Jean Glavany
Hautes-Pyrénées (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 8 janvier 1998
M. le président. La parole est à M. Jean Glavany.
M. Jean Glavany. Mes chers collègues, l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, annexée comme chacun sait à notre Constitution, édicte le droit à la sûreté comme un «des droits naturels et imprescriptibles de l'homme».
Le préambule de la Constitution de 1946, lui aussi annexé à notre Constitution,...
M. Philippe Séguin. Pas annexé !
M. Jean Glavany. ... précise que «la nation garantit à tous [...] la sécurité matérielle».
On voit ainsi que ce droit à la sécurité n'est ni de droite ni de gauche, mais une valeur républicaine protégée par notre Constitution.
Pour en assurer la garantie, monsieur le ministre de l'intérieur, le Gouvernement a défini et précisé à Villepinte sa politique, recevant ces jours derniers le soutien appuyé, dont chacun se réjouira, du Président de la République.
Or, au cours des dernières semaines, une flambée de violences urbaines, à laquelle faisait allusion il y a quelques instants notre collègue alsacien,...
M. Patrick Ollier. M. Schneider !
M. Jean Glavany. ... a provoqué dans l'opinion une émotion légitime.
Monsieur le ministre, ma question sera simple: quelle analyse le Gouvernement fait-il de cette flambée de violence et quelle leçon compte-t-il en tirer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Vous avez, monsieur le député, évoqué la flambée de violences urbaines dont chacun a pu être le témoin à la télévision dans les derniers jours de l'année 1997.
Il faut savoir que les faits de violence urbaine ont été multipliés par plus de quatre depuis 1993, passant de 3 500 en 1993 à 15 791 en 1997.
M. Christian Bataille. Debré et Pandraud !
M. le ministre de l'intérieur. C'est donc un phénomène tout à fait nouveau qui demande à être examiné parce que, dans le même temps, la délinquance sur la voie publique a plutôt régressé. J'entends par faits de violence urbaine les dégradations de véhicules, les vols et les incendies de voitures, les atteintes non seulement contre les policiers - plus de 2 000 -, mais aussi contre les postiers, les conducteurs d'autobus, les sapeurs-pompiers. Il y a là, à mon sens, le résultat de plusieurs facteurs.
La précarisation de nos banlieues, la montée de la précarité à laquelle a fait notamment allusion Mme Aubry touchent particulièrement la jeunesse, fraction la plus fragile de la société.
Des mouvements de population tendent à la ghettoïsation de certains quartiers.
Il y a la crise de l'autorité. Certaines valeurs ne sont plus transmises parce qu'elles ne peuvent l'être - il faut bien le dire - que par l'exemple et celui qu'on voit souvent à la télévision n'est pas le meilleur, mais le pire. («Très bien !» sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Ueberschlag. Le Gouvernement donne l'exemple !
M. le ministre de l'intérieur. Monsieur Ueberschlag, j'ai rappelé les chiffres depuis quatre ans, donc depuis 1993, et je le fais - croyez-le - sans aucun esprit partisan (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française) parce que le phénomène auquel nous assistons n'est que la cristallisation d'un laisser-aller social, dont la responsabilité est bien antérieure. (Applaudis-sements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert sur quelques bancs du groupe socialiste.)
Il n'en reste pas moins que les orientations définies au colloque de Villepinte sont tout à fait adaptées. Il faut passer à l'acte. Le conseil de sécurité intérieure se réunira dans quelques jours. Le 19 janvier Mme Guigou, M. Richard et moi-même réunirons les maires des 26 départements, où sont concentrés 80 % des faits de délinquance, avec les procureurs de la République et les préfets. Nous ferons en sorte que des mesures pratiques soient prises.
Je prends quelques exemples.
Les contrats locaux de sécurité: j'irai dans le département du Rhône à la fin de cette semaine pour mettre sur pied les premiers.
La constitution de trois équipes de policiers: une équipe pour photographier et filmer systématiquement tous les auteurs de ces faits de façon qu'il y ait des éléments de preuve, une équipe d'interpellation et une équipe procédurière chargée de transmettre à la justice tous les éléments permettant un traitement en urgence.
Ces réponses sont à court terme; elles ne résolvent pas à long terme un problème social et moral. (Applaudis-sements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)
Auteur : M. Jean Glavany
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 janvier 1998