durée du travail
Question de :
M. Lionnel Luca
Alpes-Maritimes (6e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 2 octobre 1997
M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
M. Lionnel Luca. Monsieur le Premier ministre, la conférence nationale sur l'emploi s'ouvrira la semaine prochaine. On y abordera notamment la réduction du temps de travail et la semaine de trente-cinq heures. Ce thème, qui a été votre cheval de bataille électorale, vous permet aujourd'hui d'être chargé des affaires de la France. Vous l'avez présenté comme le remède miracle au chômage. Mais, depuis quelques jours, les Français sont surpris d'entendre exprimer des positions divergentes au sein de votre Gouvernement comme au sein de votre majorité. Cette confusion donne l'impression de l'improvisation. Vous-même, malgré votre prestation télévisée sur une chaîne privée,...
Mme Nicole Bricq. Très bonne prestation !
M. Lionnel Luca. ... vous n'avez pas été beaucoup plus clair. Pouvez-vous nous préciser aujourd'hui quelle est votre politique à ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. («Encore !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, les Français attendent beaucoup de la prochaine conférence sur l'emploi. Ils attendent, après des années où nous avons tous échoué sur le chômage, («Vous surtout !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République) - je dis bien: «tous» - qu'enfin des pistes nouvelles soient ouvertes, qui redonnent l'espoir à leurs enfants et à eux-mêmes.
Il est vrai, et le document, réalisé par de nombreux experts économiques, que nous avons envoyé aux organisations patronales et syndicales le montre, que la croissance ne pourra entraîner une réduction massive du chômage même si, en ce qui nous concerne, nous faisons tout, contrairement à nos prédécesseurs (Protestations sur plusieurs bancs du Rassemblement pour la République), pour relancer la consommation, ce qui procurera à nos entreprises des clients et ce qui leur donnera l'envie non seulement de réembaucher, mais aussi de réinvestir.
Nous savons qu'il faut ouvrir d'autres pistes, que nous connaissons maintenant. Il s'agit notamment de rechercher partout les emplois de demain - c'est l'objectif du plan des 350 000 emplois-jeunes dans le secteur public.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Des emplois précaires !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis heureuse de constater que, dans le secteur privé, beaucoup d'entreprises nous rejoignent et sont prêtes, elles aussi, à conduire cette réflexion sur les nouveaux métiers et ainsi à redonner une chance aux jeunes.
C'est donc un nouveau modèle de développement qui s'offre à nous et qui nous permettra de mieux répondre aux besoins de nos concitoyens, qui ne sont à l'heure actuelle satisfaits ni par l'Etat ni par le marché.
Mais il existe une autre piste que nous ne pouvons pas négliger. Je dois avouer m'être réjouie de lire dans la presse de ce matin que le patronat et les syndicats belges étaient en train de s'y engager et que les Allemands rouvraient le débat. Quant à nous, nous allons - enfin, allais-je dire - nous y engager à notre tour.
Nous avons toujours répété la même chose en ce qui concerne la réduction de la durée du travail: si nous souhaitons avancer, cette réduction doit être forte, elle ne doit pas s'opérer trop tard afin que ses effets sur l'emploi ne soient pas réduits du fait des gains de productivité, ni trop tôt pour que l'on ait le temps de négocier, entreprise par entreprise, les conditions, la meilleure formule, pour l'entreprise comme pour les salariés.
Nous savons aussi que, pour que cette réduction crée des emplois, elle ne doit pas porter atteinte à la compétitivité des entreprises.
J'oserai dire qu'elle peut être l'occasion rêvée - les six cents entreprises qui ont signé un accord les dix-huit derniers mois nous le montrent - pour réorganiser le travail, pour obtenir une meilleure qualité des produits, pour être mieux à même de répondre avec souplesse aux besoins des clients.
M. Pierre Mazeaud. Assez ! Votre réponse est trop longue ! (Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République pointent du doigt leur montre.)
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Cette réduction de la durée du travail, nous allons la conduire, en nous fondant sur les négociations. A l'occasion de celles-ci, les efforts que chacun peut réaliser - les entreprises, les salariés et l'Etat - seront mis sur la table. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Chers collègues, en face de moi se trouve une horloge. Je sais donc parfaitement, en ce qui concerne l'heure, à quoi m'en tenir. (Sourires.) Point n'est besoin de me faire des signes, au demeurant discourtois, pour me faire comprendre qu'il faut aller plus vite, ou plus lentement. Cela fait partie de mon travail, et je le fais ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Lionnel Luca
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 octobre 1997