Question au Gouvernement n° 292 :
chômeurs

11e Législature

Question de : M. Michel Vaxès
Bouches-du-Rhône (13e circonscription) - Communiste

Question posée en séance, et publiée le 14 janvier 1998

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
M. Michel Vaxès. Monsieur le Premier ministre, au-delà du cri des chômeurs, au-delà de leur nombre, au-delà des formes qu'ils ont décidé de donner à leur lutte, nous mesurons bien avec vous, avec votre gouvernement, ce qu'il y a de douleur, de drames, de familles disloquées, d'enfants naufragés, derrière les froides statistiques de l'emploi.
Mais nous mesurons aussi, pour notre part, ce qu'il y a de promesses et de grandeur quand cette détresse profonde choisit de s'exprimer dans l'action digne, responsable, et si profondément légitime.
M. Pierre Lellouche. Et voilà pourquoi le Gouvernement les expulse !
M. Michel Vaxès. Les chômeurs ont préféré la voie de la responsabilité et du civisme à celle de l'agitation et de la violence incontrôlées pour tenter de faire entendre ce qui leur reste encore de voix. Ces luttes ont la signification d'une main tendue qui dit encore l'espoir que la société s'en saisisse. Ils méritent non seulement notre soutien mais encore notre gratitude, parce qu'ils sont une chance et un point d'appui pour la majorité que les Françaises et les Français se sont donnée en juin dernier. Ils méritent qu'il leur soit répondu par la force du dialogue et non par celle de l'ordre. Les premières mesures ont été prises, elles vont dans le bon sens, il faut impérativement les amplifier.
Il faut, comme vient de s'y engager le Gouvernement, poursuivre le dialogue et mieux affirmer la solidarité nationale. Une solidarité qui ne doit pas s'arrêter aux portes des milieux d'affaires ou devant les grilles des manoirs des grandes fortunes. Quelle insolence quand, avec leurs 600 milliards, les 400 premières familles fortunées de France côtoient tant de misère humaine ! Quand les placements financiers, socialement et économiquement improductifs, refusent de s'investir pour le développement de la croissance et de l'emploi !
M. Arthur Dehaine. Posez votre question !
M. Michel Vaxès. Il est impératif aujourd'hui de forcer la main de ceux qui, malgré leur opulence, rechignent à participer à un niveau suffisant à l'effort de solidarité nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. Thierry Mariani. Ce n'est pas une question !
M. Michel Vaxès. Je comprends que mes propos vous ennuient, mesdames, messieurs de l'opposition, car ces fortunes-là, vous les soutenez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
C'est pourquoi, monsieur le Premier ministre, je vous demande ce que vous envisagez de faire pour solliciter audacieusement, comme notre groupe le propose, les grandes fortunes et les placements financiers, pour donner ainsi au Gouvernement les moyens des réformes structurelles indispensables à la création d'emplois et pour rendre, aux plus démunis de nos citoyens, la possibilité de retrouver leur place et leur dignité dans notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, vous avez eu raison de le souligner, derrière ces statistiques de chômeurs, de RMIstes et d'exclus que nous égrénons mois après mois depuis des années, il y a effectivement des hommes, des femmes et des jeunes dans les difficultés, qui souffrent et qui, parfois, sont dans la désespérance. Ce sont eux que nous entendons ces jours derniers dans les quartiers et dans la rue.
Le Gouvernement sait bien que, pour répondre à leur désarroi et à leur détresse, il faut d'abord que s'exerce la solidarité: et, comme vous l'avez dit, les efforts doivent, en premier lieu, être consentis par les plus favorisés. C'est à cela que le Gouvernement s'est employé dès son arrivée, puisqu'il a fallu redresser les finances publiques. Nous avons demandé aux entreprises qui ont réalisé des bénéfices très importants ces dernières années de participer à l'effort par l'augmentation de l'impôt sur les sociétés. Et, dès la loi de finances pour 1998, nous avons commencé à rééquilibrer la fiscalité entre le revenu du travail et celui du capital. Dans la loi de financement de la sécurité sociale, nous avons, pour la première fois, abondamment fait contribuer les revenus du capital - à hauteur de 25 milliards - en transférant les cotisations salariées vers la CSG.
C'est cette solidarité qui permettra une plus grande justice dans notre pays. Il faut continuer à moins pénaliser l'emploi en réformant les cotisations patronales et la taxe professionnelle, comme vient de l'annoncer le ministre de l'économie et des finances.
Mais nous savons aussi qu'il y a des contraintes. Ceux qui, dans l'opposition, défendent, aujourd'hui, les revendications sur les minima sociaux sont aussi ceux qui n'ont pas augmenté l'allocation logement, ni l'allocation solidarité depuis 1994. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)
M. François Vannson. C'est de la provocation !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Ce sont eux qui ont prélevé 120 milliards sur les ménages ces trois dernières années et réduit le pouvoir d'achat des salariés ! (Mêmes mouvements.)
Mesdames, messieurs de l'opposition, faire de la politique, aujourd'hui, c'est non pas crier plus fort que tous, mais opérer des choix ! Eh bien, nous, nous les avons faits ces choix ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Vous les récusez. Vous avez voté contre la loi de financement de la sécurité sociale qui a fait contribuer les revenus du capital. Vous nous avez traités de tous les noms quand nous avons réduit les 80 000 francs donnés, à quelques ménages, au titre de l'AGED, soit trois fois et demie ce que touche un RMIste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
C'est notre majorité qui a fait ces choix de solidarité et de justice sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)

Données clés

Auteur : M. Michel Vaxès

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Emploi

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 janvier 1998

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