Question au Gouvernement n° 2945 :
terrorisme

11e Législature

Question de : M. Pierre Cardo
Yvelines (7e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 3 octobre 2001

M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.
M. Pierre Cardo. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Les attentats du 11 septembre dernier, aux conséquences dramatiques, nous ont tous marqués et ont révélé une nouvelle forme de terrorisme. Cet hyper-terrorisme alimenté par une économie souterraine a pris certaines de ses racines dans nombre de nos quartiers difficiles.
Le lien entre terrorisme, trafic d'armes, de drogue, blanchiment d'argent, quoique vous l'ayez longtemps nié, n'est plus à démontrer. (Protestations sur quelques bancs du groupe socialiste.) Comme il n'est plus à démontrer que certains jeunes de nos quartiers ont été entraînés dans des camps en Afghanistan ou dans les Balkans, et ont même pu, pour certains d'entre eux, servir de base arrière aux attentats de New-York.
Dans ce contexte, comment tolérer que, dans nos quartiers, des zones de non-droit continuent à exister, où l'Etat républicain n'a pour seule réponse qu'une police de proximité désarmée, des barres qu'on abat, des médecins qu'on accompagne la nuit et le week-end ? Devra-t-on bientôt faire accompagner la police par des médiateurs ?
Un député du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Très bien !
M. Henri Emmanuelli. Lamentable !
M. Pierre Cardo. Cette situation extrêmement grave appelle un ensemble de questions.
Quels pouvoirs et quels moyens supplémentaires ont-ils été donnés à la DST et aux renseignements généraux pour identifier les activistes et démanteler les réseaux ?
M. François Goulard. Très bien !
M. Pierre Cardo. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour lutter contre une délinquance de plus en plus organisée et violente ? Comment allez-vous maintenant gérer les conséquences de la loi Chevènement, qui, je vous le rappelle, a exonéré de poursuites pénales celui qui abrite des clandestins, dont certains sont peut-être en lien avec les filières terroristes ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et française-Alliance.)
M. Henri Emmanuelli. Ces propos sont scandaleux !
M. Pierre Cardo. Comment doit-on interpréter le fait que votre ministre des cultes discute avec des mouvances islamistes intégristes dont certaines siègent au sein du conseil supérieur de l'islam ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Parallèlement et compte tenu du risque biologique et industriel, quel est le contenu du plan Piratox, qui, pour l'heure, ne rassure, hélas ! que ceux qui l'ont écrit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, face au terrorisme, tous nos concitoyens, tous les élus et tous les services doivent se mobiliser. Pour sa part, l'Etat, en déclenchant très rapidement le plan Vigipirate renforcé, a apporté le témoignage de sa mobilisation ; nos concitoyens en ont conscience et soutiennent cette politique. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Par ailleurs, des dispositions nécessaires sont prises mais dont nous n'avons pas parlé. D'autres dispositions devront peut-être être prises (« Lesquelles ? » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), y compris sur le plan législatif, parce que, face au terrorisme, il est nécessaire, bien évidemment, de lutter avec la plus grande efficacité possible.
Il y a également une intense mobilisation de nos services de renseignement, qui travaillent dans un excellent esprit de coopération avec les autres services, américains et européens. D'ailleurs, de récents résultats en apportent un éclatant témoignage.
Les arrestations, quand elles interviennent comme elles sont intervenues, constituent une prévention active qui devrait rassembler l'ensemble des parlementaires.
M. Christian Jacob. Ce n'est pas sérieux !
M. le ministre de l'intérieur. En outre, je réunis régulièrement le comité interministériel de lutte contre le terrorisme.
Pour autant, je considère qu'il nous faut encore renforcer la coopération européenne dans plusieurs directions, renforcer Europol - l'office européen de police - pour améliorer la transmission rapide des informations, créer des équipes spécialisées dans la lutte contre le terrorisme, créer un mécanisme d'évaluation dans chacun de nos pays, renforcer la sécurité aux frontières de l'Union européenne et aux frontières intérieures en application de la disposition 2-3 de Schengen, faire preuve d'un maximum de rigueur dans la procédure de délivrance des visas, rendre plus régulière les rencontres entre chefs des services des renseignements des Etats membres, augmenter le budget alloué au renseignement. Sur ce dernier point, dois-je vous rappeler, monsieur le député, que, de 1997 à 2001, les crédits de la direction centrale des renseignements généraux ont crû de 13 % et ceux de la DST de 40 % ?
Il faut également démanteler les réseaux de financement, y compris ceux qui peuvent nourrir le terrorisme. Des dispositions ont été prises à cet égard, et en France d'abord. Je pense que vous pouvez soutenir cette politique ferme.
Il convient aussi de démanteler les réseaux dans les quartiers. C'est un point que j'ai évoqué précédemment en parlant des actions ciblées et répressives, ainsi que de la mobilisation des procureurs et des préfets à la suite de la réunion du 6 septembre dernier.
Par ailleurs, monsieur le député, estimez-vous bien raisonnable de stigmatiser des quartiers, de pratiquer l'amalgame (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), alors que vous savez que, en cette matière, toutes les autorités françaises ont pris une position claire dont je pensais que les députés de l'opposition ne pouvaient s'exonérer.
Oui, il faut une politique de la ville digne de ce nom. Et c'est bien ce que le Premier ministre, le ministre de la ville et quelques autres ont démontré hier, en appelant à faire un vrai travail pour éviter la misère et l'exclusion dans les quartiers.
M. Lucien Degauchy. Baratin !
M. le ministre de l'intérieur. Le ministre des cultes que je suis poursuivra l'action de Jean-Pierre Chevènement pour permettre à l'islam de se doter en France d'un conseil représentatif avec lequel on puisse discuter.
Je trouve, monsieur Cardo, que c'est une insulte que vous venez de faire aux représentants que j'ai réunis, que de les avoir traités d'intégristes, d'islamistes, et donc de dangereux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
La lutte contre le terrorisme requiert la mobilisation de tous. Les Français soutiennent...
M. Christian Jacob. Nous verrons !
M. le ministre de l'intérieur. ... l'action que nous avons entamée, et je pense qu'ils n'attendent pas de leurs représentants au Parlement qu'ils polémiquent. Ils veulent même entendre des propos rassurants ; or ceux que vous avez tenus ne l'étaient guère. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ce n'est pas en stigmatisant, en attaquant un certain nombre de jeunes dans les quartiers que vous allez faire progresser la lutte contre le terrorisme.
La cohésion s'impose. C'est ce que les Français souhaitent. J'espère que vous l'aurez compris. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Lucien Degauchy. C'est nul !

Données clés

Auteur : M. Pierre Cardo

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 3 octobre 2001

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