gouvernement
Question de :
M. Yves Fromion
Cher (1re circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 6 décembre 2001
FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS
M. le président. Pour le groupe RPR, la parole est à M. Yves Fromion.
M. Yves Fromion. Monsieur le Premier ministre, nous avons bien compris que votre ministre de l'intérieur n'a pas cru nécessaire d'engager une procédure à l'encontre de l'auteur du livre Vos papiers !, édité sous le timbre du syndicat de la magistrature. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Arnaud Lepercq. C'est vrai !
M. Yves Fromion. Personne ne peut cependant constester qu'il s'agit d'une insulte et d'une agression à l'encontre de nos policiers et de nos gendarmes à l'heure même où ils paient le prix fort pour protéger nos concitoyens. Toutefois, ma question va au-delà de la publication de ce livre qui est, en fait, le révélateur d'une situation beaucoup plus grave touchant au fonctionnement de nos institutions.
Comment comprendre, monsieur le Premier ministre, que police et justice s'affrontent au lieu de lutter côte à côte contre l'insécurité dont nos concitoyens ont peur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Comment comprendre l'appel du Syndicat de la magistrature à ne pas appliquer les mesures antiterroristes votées par le Parlement ?
M. Jean-Marc Nudant. C'est scandaleux !
M. Yves Fromion. Faut-il rappeler les graves critiques portées publiquement par les administrations placées sous votre autorité à l'encontre de la loi sur la présomption d'innocence, au motif que les moyens nécessaires à sa mise en oeuvre n'ont pas été accordés par votre gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Faut-il souligner les dysfonctionnements graves et répétés qui viennent d'affecter la justice et que vous avez vous-même reconnus ?
Cette image de désordre inquiétant est amplifiée par les manifestations publiques des policiers et, pour la première fois sans doute de leur histoire, des gendarmes ?
M. Arnaud Lepercq. Vous avez raison !
M. Yves Fromion. C'est bien, en fait, une sorte de crise institutionnelle qui est en train de se développer. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Nos concitoyens éprouvent crainte et indignation devant cette incapacité du Gouvernement, et donc de celui qui le dirige, à dominer l'appareil de l'Etat (« Très juste ! » sur les mêmes bancs) et à assurer le fonctionnement efficace et cohérent de nos institutions.
M. le président. Posez votre question, monsieur Fromion.
M. Yves Fromion. J'y viens, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, en votre qualité de gérant de nos institutions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) - et quel gérant ! - ...
Mme Odette Grzegrzulka. Vous, vous êtes un syndic de faillite !
M. Yves Fromion. ... entendez-vous mettre un terme aux dérives répétées de l'action gouvernementale, qui ont conduit à cet état de crise grandissant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, je ne suis pas sûr que le terme « gérant »,...
M. Patrick Ollier. En tout cas, vous êtes proche du dépôt de bilan !
M. le Premier ministre. ... qui peut convenir à un conseil d'administration ou à une entreprise privée, soit le mieux adapté pour parler des institutions de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
La Constitution ne me fait pas gardien des institutions, mais elle fait que, depuis quatre ans et demi, dans la continuité,...
M. Maurice Leroy. On voit le résultat !
M. Arnaud Lepercq. Administrateur de biens ! Syndic de faillite !
M. le Premier ministre. ... devant l'opinion, constamment avec l'appui d'une majorité cohérente, votant les textes (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), débattant mais votant les textes (Mêmes mouvements)...
Messieurs les députés de l'opposition, vous devriez, au contraire, lever le pouce, car je n'ai jamais eu, moi, à utiliser l'article 49-3 pour forcer ma majorité ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Nous avons débattu, nous avons discuté pendant quatre ans et demi, sans avoir, derrière nous, l'appui, le soutien, l'impulsion, l'inspiration d'un autre membre de l'exécutif. Nous avons géré les affaires du pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous l'avons fait en affrontant tous les problèmes, notamment les accidents de la nature - les marées noires, les tempêtes, les inondations - quand ils se présentaient (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), en réglant les problèmes de l'économie, en faisant reculer le nombre des chômeurs d'un million de personnes, en nourrissant la croissance pendant quatre ans, en redonnant de l'espoir aux Français et en entreprenant de grandes réformes sociales. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Nous avons aussi modernisé ce qui pouvait l'être, puisque nous avons adopté le quinquennat (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), réforme qui était en panne depuis le Président Pompidou (Mêmes mouvements), et réformé les institutions en limitant le cumul des mandats.
Vous n'avez pas devant vous, mesdames, messieurs les parlementaires, un gouvernement à mi-temps, mais un gouvernement qui se consacre entièrement à sa tâche. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
La justice est une autorité indépendante. Nous n'interférons pas dans les affaires judiciaires : nous avons coupé le cordon et nous n'avons pas besoin d'envoyer d'hélicoptère dans l'Himalaya pour obtenir une intervention dans une affaire particulière ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous lui donnons des moyens, et Mme Lebranchu, garde des sceaux, a eu l'occasion de répéter ici à plusieurs reprises que, en quatre ans, nous avions créé plus d'emplois de magistrats que pendant les dix-sept années précédentes, notamment lorsque vous étiez au pouvoir. (Mêmes mouvements.)
Si vous aviez pris les mesures nécessaires, nous ne serions pas confrontés aujourd'hui aux problèmes qui se posent dans les grands services publics chargés, au nom de la République, de la protection des Français. Les membres de la police nationale et les gendarmes doivent pour cela bénéficier du respect de l'ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons créé 6 000 emplois de titulaires dans la police nationale, sans compter les adjoints de sécurité, et nous avons, au cours des dernières semaines, accordé à la police nationale et à la gendarmerie des avancées sur le plan indemnitaire qu'elles n'avaient jamais connues jusque-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Patrick Ollier. Alors, pourquoi les policiers et les gendarmes sont-ils dans la rue ?
M. le Premier ministre. Au lieu de mettre de l'huile sur le feu et d'exploiter des problèmes que vous n'avez pas traités quand vous étiez aux responsabilités (« Zéro ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République),...
M. Patrick Ollier. Ça fait cinq ans que vous êtes au pouvoir !
M. le Premier ministre. ... soyez, mesdames, messieurs de l'opposition, plus modestes dans vos imputations. Dans ce domaine aussi, nous faisons face.
M. Franck Dhersin. Vous avez la grosse tête !
M. le Premier ministre. De la même manière que nous avons fait reculer le chômage, si l'on nous fait confiance à nouveau dans la durée, nous ferons reculer plus encore l'insécurité. (Mmes et MM. les députés du groupe socialiste se lèvent et applaudissent. - Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Yves Fromion
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Etat
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 décembre 2001