Question au Gouvernement n° 3189 :
cinéma

11e Législature

Question de : M. Alain Tourret
Calvados (6e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 20 décembre 2001

EXCEPTION CULTURELLE FRANÇAISE

M. le président. Pour le groupe Radical, Citoyen et Vert, la parole est à M. Alain Tourret, pour une question rapide, qui appellera une réponse également rapide.
M. Alain Tourret. Madame la ministre de la culture et de la communication, ma question complétera celle de M. Le Garrec.
Le patron de Vivendi Universal est incontestablement un raider efficace, mais c'est surtout un provocateur qui met à mal un consensus politique national. En déclarant à la face du monde que l'exception culturelle est morte et que sont archaïques ceux qui la défendent, il nous rappelle que le capitalisme est international et que, pour les grands capitalistes, la culture n'est qu'un produit marchand comparable à quelques kilos de navets.
M. Bernard Accoyer. Pour le cinéma, le terme est approprié ! (Sourires.)

M. Alain Tourret. Son attaque en règle vise à nous imposer une culture à la Dallas. Elle est étonnante de la part du propriétaire de Canal Plus puisque la chaîne cryptée joue, chacun le reconnaîtra, un rôle essentiel dans le développement du cinéma français en lui consacrant chaque année plus d'un milliard de francs.
Votre réponse précédente, madame la ministre, a été à la hauteur de l'attaque et vous avez eu raison de rappeler qu'il ne s'agit pas d'exception culturelle, mais d'abord de diversité culturelle.
Quelles mesures comptez-vous prendre et quelle politique entendez-vous mener pour rassurer les producteurs et les réalisateurs du cinéma qui sont, les uns et les autres, inquiets devant le risque évident de voir les forces de Vivendi Universal et même de Canal Plus utilisées au profit du cinéma américain, ce qui ruinerait notre volonté d'avoir une diversité culturelle s'appuyant sur un cinéma français porteur de toutes les richesses créatives de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je rappelle d'abord que M. Jean-Marie Messier s'exprime au nom de Vivendi Universal et qu'une stratégie d'entreprise ne constitue évidemment pas la politique d'un pays. Celle de notre gouvernement à l'égard de la création cinématographique est bien connue : elle a été fermement énoncée par le Premier ministre Lionel Jospin, à Cannes, en mai 2000, et nous n'envisageons pas de la changer.
Nous assistons périodiquement à des attaques de certains milieux économiques, de médias privés, contre l'ensemble du dispositif d'aides publiques à la création. C'est en fait le principe des quotas et des obligations que d'aucuns voudraient voir supprimer. Le Gouvernement n'y est pas disposé.
Dans ce dispositif, Canal Plus occupe, il est vrai, une place bien particulière puisque, dès l'origine et en contrepartie de sa position, la chaîne s'est vu imposer et a accepté des obligations spécifiques à l'égard du cinéma. Aujourd'hui, Canal Plus investit plus de 2 milliards de francs dans la production cinématographique, investissements assortis d'engagements quantitatifs, mais aussi d'un engagement qualitatif de diversité à l'égard des films dits d'auteur.
Enfin, vous m'interrogez sur nos moyens d'action. Vous m'avez entendu répondre à ce propos au président Le Garrec et rappeler les engagements écrits de Canal Plus et de Vivendi, au moins jusqu'en 2004. Le Gouvernement avait, d'une certaine manière, anticipé la situation actuelle et les craintes qu'elle suscite chez les producteurs, les réalisateurs et tant d'autres en inscrivant dans les décrets qui paraîtront en janvier les garanties négociées entre Canal Plus et la profession, afin de les pérenniser. Nous n'ignorons pas les enjeux économiques et le profit que notre pays peut tirer de l'expansion de ses entreprises à l'étranger. Mais ces enjeux ne sauraient compromettre les enjeux culturels que nous défendons depuis des décennies, y compris à l'échelon européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Données clés

Auteur : M. Alain Tourret

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Arts et spectacles

Ministère interrogé : culture et communication

Ministère répondant : culture et communication

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 décembre 2001

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