services d'urgence
Question de :
M. Philippe Nauche
Corrèze (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 22 janvier 1998
M. le président. La parole est à M. Philippe Nauche.
M. Philippe Nauche. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
Vendredi dernier, des médecins des services d'urgence, de SAMU et de SMUR, ont appelé l'attention du Gouvernement sur la situation dans le système hospitalier public.
On sait que des efforts importants sont prévus en 1998, à votre initiative, monsieur le secrétaire d'Etat, pour desserrer l'étau budgétaire hospitalier. De même, après la loi de 1986, le rapport du professeur Steg, les circulaires d'organisation des urgences de 1991, les SROS, le rapport de Mme le professeur Barrier, la prise en charge des urgences a profondément évolué dans notre pays.
Cependant, les acteurs de l'urgence sont aujourd'hui inquiets sur l'avenir: les services d'urgence des hôpitaux publics voient leur fréquentation augmenter de plus de 5 % par an et leur rôle évoluer en direction du secteur médico-social. C'est pourquoi ces personnels, pratiquant au service de nos concitoyens l'urgence au quotidien, s'interrogent sur leur place dans le système de soins et sur le statut des intervenants. Ils s'interrogent également, d'une façon plus générale, sur l'évolution de l'organisation de la prise en charge de l'urgence et attendent la reconnaissance d'une véritable spécialité médicale.
Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous indiquer devant la représentation nationale les initiatives que compte prendre le Gouvernement pour répondre à leurs interrogations, évaluer les pratiques et l'organisation actuelle des services d'urgence, et, plus globalement, pour faire évoluer la prise en charge des urgences à la fois extra-hospitalières et hospitalières dans notre pays ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le député, vous avez rappelé que, vendredi dernier en effet, nous avons reçu - et nous les reverrons - les «urgentistes», comme on dit dans ce pays, qui se sont émus des conditions qui leur sont faites depuis assez longtemps. Il s'agit là d'une des priorités de santé publique que Martine Aubry et moi-même avons décidé d'inscrire pour l'année 1998, et nous l'avons fait savoir aux hôpitaux par circulaire.
Vous avez raison de rappeler que la fréquentation dans les services d'urgence est en augmentation de 3 % à 5 % par an. Environ 9 millions de personnes entrent chaque année à l'hôpital par les urgences, même si pour 15 % seulement le pronostic vital est en jeu.
Malgré les efforts qui ont été faits en 1991, la publication de nombreux guides des urgences, la parution des décrets de 1995 pour organiser ces services et la réflexion menée sur les réseaux en mai 1997, nous sommes encore dans le flou et les rapports des professeurs Steg et de Geneviève Barrier restent lettre morte.
On sait qu'il faudrait organiser les urgences à deux niveaux, des services d'accueil spécialisés à l'hôpital et des services de proximité sur tout le territoire pour assurer les premiers gestes, le «déchocage» éventuel et orienter les patients.
Nous avons décidé, Martine Aubry et moi-même, de revoir le 7 mars prochain, avec les professeurs Steg et Geneviève Barrier, à l'occasion d'une journée d'études, les syndicats qui ont mené le mouvement de vendredi dernier. Déjà, un certain nombre de choses ont été proposées. Tout d'abord, la création de postes de praticiens hospitaliers à temps partiel - un décret paraîtra dans quelques semaines à ce sujet - pour renforcer les urgences.
M. Jean-Pierre Soisson et M. André Borel. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat à la santé. Ensuite, sera mise sur pied dans les prochains mois une formation sérieuse qui prendra en charge les étudiants en science de l'urgence et qui sera validée par un certificat supplémentaire.
Mais il faut aussi que les mentalités se transforment. Le Gouvernement ne peut pas tout faire; il a d'ailleurs consacré depuis cinq ans un milliard de francs à la transformation des services d'urgence. Ce n'est pas suffisant: nous rencontrons tous, tous les jours, des familles qui se plaignent que dans tel ou tel hôpital elles ont attendu deux ou trois heures. Ce n'est pas acceptable.
Ce qui manque dans notre pays, c'est une culture de l'urgence. Trop peu de postes hospitaliers sont proposés dans les services d'urgence. L'année dernière, cinquante demandes de création de postes seulement ont été proposées par les 3 700 établissements français. Ce n'est pas supportable. Il faut que cela change. La pénibilité du travail dans les services d'urgence est difficilement reconnue, contrairement à l'anesthésie, la chirurgie ou la gynéco-obstétrique. Comment considérer que l'«urgentiste» prenne sa garde l'après-midi après avoir effectué son travail du matin, l'assure toute la nuit et reprenne ensuite le travail le lendemain sans qu'une prime, une forme de valorisation, bref un changement de statut soient envisagés ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat à la santé. Je propose que tous, à l'hôpital, soient associés à cette réflexion. Malheureusement, il y a une sorte de laisser-aller intellectuel qui consiste à mettre aux urgences les praticiens les plus jeunes et les moins formés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !
Auteur : M. Philippe Nauche
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 janvier 1998