Question au Gouvernement n° 494 :
détention

11e Législature

Question de : M. Yves Durand
Nord (11e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 2 avril 1998

M. le président. La parole est à M. Yves Durand.
M. Yves Durand. Monsieur le ministre de l'intérieur, je vous pose cette question avec l'accord de Jean-Pierre Balduyck, député-maire de Tourcoing, retenu, chacun le comprendra, dans sa commune.
En effet, hier, un drame tragique s'est déroulé dans cette ville. Un adolescent a demandé à l'un de ses camarades de poser un pistolet sur la tempe et de tirer, lui disant qu'il n'y avait aucun risque puisque l'arme n'était pas chargée. Or ce jeune homme est mort ce matin à l'hôpital.
Deux vies, au moins, sont ainsi brisées. Chacun peut mesurer le gâchis, après d'autres cas d'utilisation d'armes par des jeunes, voire par des enfants, que peut provoquer la banalisation de l'utilisation d'armes à feu.
Il s'agissait de deux bons élèves de terminale, travailleurs, sans histoire.
Monsieur le ministre, une seule question se pose: comment un pistolet chargé a pu se trouver, hier après-midi, dans les mains d'un jeune homme qui, par jeu, a provoqué le drame ? C'est bien la preuve que notre législation sur les armes est aujourd'hui inefficace et demande pour le moins un examen approfondi. Je sais que le groupe socialiste a déposé une proposition de loi dans ce sens, qui sera d'ailleurs discutée, à l'Assemblée nationale, le 29 avril prochain.
Monsieur le ministre, quelles sont vos propres réflexions sur ce sujet ?
Dans quelle direction comptez-vous engager votre action ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, le drame affreux qui a eu lieu à Tourcoing s'est produit dans des conditions encore mal élucidées. Il apparaît que le pistolet Herstal, arme légère de petit calibre, n'avait pas fait l'objet d'une déclaration. Le père, d'après les dernières informations qui viennent de me parvenir, affirme ne pas en être le propriétaire. Donc, il y a lieu de mener une enquête plus approfondie sur les conditions dans lesquelles cette arme a pu être introduite au lycée de Tourcoing.
Le problème que vous posez n'est pas récent.
La législation sur les armes a fait l'objet d'une évolution constante, toujours dans un sens plus restrictif, notamment par le biais d'un décret du 6 mai 1995.
Pour ma part - puisque vous me demandez mon avis personnel -, je m'interroge sur le caractère de la législation actuelle dont bien des catégories me paraissent obsolètes, par exemple, le classement en quatrième catégorie, armes de défense, du 357 magnum, ou en première catégorie, des armes de guerre dont certaines sont moins dangereuses.
Il me paraît important de revoir cette législation. J'ai confié à l'inspecteur général Claude Cances, au début du mois de mars, une mission de réflexion sur l'opportunité de la modifier ou bien de la corriger à la marge, en tout cas de mieux veiller à son application et aux conditions dans lesquelles elle peut être contrôlée. Il est clair que certaines orientations ont déjà été prises. Des déclarations devaient être faites dans les années récentes - des délais supplémentaires ont été accordés -, mais nous devons avoir une vue d'ensemble des armes qui sont autorisées. Beaucoup d'armes, qui ne sont pas autorisées, sont néanmoins détenues. Les armes de chasse, les fusils à canon scié sont évidemment très dangereux et doivent faire l'objet d'une réglementation plus précise.
Je sais que M. Bruno Le Roux a élaboré une proposition de loi. Vous allez en débattre. Ce sera l'occasion de progresser dans notre réflexion collective sur ce sujet.
J'appelle votre attention sur le fait qu'il est quand même très difficile de fouiller aujourd'hui chaque Français, voire chaque Française, en particulier les jeunes à la porte des établissements scolaires, pour savoir s'ils ne sont pas détenteurs d'armes. La bonne piste consiste à obliger à déclarer les armes et à vérifier l'application stricte de cette législation pour éviter, autant que possible, le renouvellement de drames aussi affreux que celui qui vient d'endeuiller le lycée de Tourcoing et la France tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et sur divers bancs et du groupe communiste.)

Données clés

Auteur : M. Yves Durand

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Armes

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 avril 1998

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