Question au Gouvernement n° 612 :
réforme

11e Législature

Question de : M. Yves Bur
Bas-Rhin (4e circonscription) - Union pour la démocratie française

Question posée en séance, et publiée le 13 mai 1998

M. le président. La parole est à M. Yves Bur.
M. Yves Bur. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, la réforme de la sécurité sociale, engagée avec courage par Alain Juppé et mise en oeuvre avec détermination par Jacques Barrot et Hervé Gaymard, commence à porter ses fruits. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
En dépit des réticences et des craintes qu'elle a suscitées, en dépit de l'opposition des partis de l'actuelle majorité plurielle, cette réforme en profondeur n'a pas entraîné les catastrophes annoncées, ni pour les professionnels de santé, ni pour les structures hospitalières, ni surtout pour ce qui concerne la qualité des soins, dont les Français ont continué de bénéficier.
Chacun sait que les réformes structurelles étaient et restent indispensables, car accepter les déficits, c'est se décharger des efforts sur les générations futures et c'est condamner à terme la sécurité sociale, ce que nous ne voulons pas.
Pourtant, le Gouvernement semble préférer, à défaut d'une stratégie clairement affichée, profiter des mesures courageuses engagées par ses prédécesseurs et se laisser porter par les facilités d'une croissance retrouvée.
Les Français et l'ensemble des acteurs de la santé attendent toujours l'affirmation d'un véritable projet de politique de santé. De même, face au défi démographique, l'avenir de nos retraites, et donc celui des régimes spéciaux, exigent une réelle volonté politique, que vous semblez fuir.
Madame la ministre, quand aurez-vous le courage d'informer les Français de vos intentions réelles et de vos choix politiques sur ces questions qui sont essentielles pour leur avenir ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur Bur, quand on parle de la sécurité sociale, on doit, surtout quand on a enregistré, lors des quatres dernières années, un déficit moyen de 54 milliards, faire preuve d'une certaine modestie. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Richard Cazenave. Ne dites pas n'importe quoi !
M. Yves Nicolin. C'est scandaleux !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je rappelle que M. Alain Juppé, alors Premier ministre, promettait que la sécurité sociale serait excédentaire de 12 milliards en 1997. Nous avons hier annoncé le chiffre: 35 milliards de déficit ! Soyons donc un peu modestes !
Si nous n'avions pas pris les mesures figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale, nous n'aurions pas 12 milliards de déficit en 1998 - et, comme je l'espère, l'équilibre en 1999 - mais plus du double.
M. Richard Cazenave. Le déficit approchait les 100 milliards en 1993 !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Et je ne parle pas des effets de la croissance, qui apporte aujourd'hui sa contribution à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale.
M. Rudy Salles. Grâce à qui ?
Un député du groupe socialiste. Pas à vous en tout cas !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. De quoi parle-t-on quand on parle du succès du plan Juppé ? Parle-t-on d'une profession médicale totalement traumatisée, dont les représentants ne se parlaient plus et dont une partie a été mise de côté ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Parle-t-on des hôpitaux, pour lesquels on a changé essentiellement la tutelle, les ARH qui n'étaient acceptées par personne, et le montant des enveloppes au prix d'une asphyxie des meilleurs ?
Parle-t-on d'une politique du médicament qui n'avait pas commencé à vivre, sans doute parce qu'elle touchait certains intérêts ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Bruit.)
Parle-t-on d'une politique de la famille, de ses 12 milliards de déficit, ou de mesures concernant la retraite... (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. Mes chers collègues, j'ai l'impression qu'il y a un léger désaccord entre vous sur cette question. (Rires.) Je vous suggère de ne pas l'exprimer bruyamment, comme le veut la règle de la démocratie.
Poursuivez, madame la ministre.
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je vois bien, mesdames, messieurs, que la réalité des chiffres vous gêne, mais ils sont là.
Qu'avons-nous fait... (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. Madame Aubry, je vais laisser mes collègues reprendre leur calme. Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. François Fillon. On ne peut pas entendre des mensonges sans réagir !
M. Yves Nicolin. Monsieur le président, Mme Aubry dit n'importe quoi !
M. le président. Vous pouvez entendre des choses qui ne vous plaisent pas sans réagir en faisant du bruit ! Votre attitude est absurde !
Vous avez la parole, madame Aubry.
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous avons repris un dialogue patient avec des médecins dont une partie d'entre eux ne parlaient plus au Gouvernement.
Dans quelques jours, des réformes seront engagées pour la mise en place d'une véritable informatisation et pour une information transparente des unions régionales de médecins. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Car si les médecins sont prêts à accepter une responsabilité collective, ils en ont assez d'être frappés par des sanctions individuelles et stigmatisantes.
Nous avons engagé une réforme de l'hôpital, qui part non pas d'enveloppes fixées dans un cabinet mais de la réalité des besoins de santé (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française), afin que chaque patient soit pris en charge avec les mêmes chances d'être soigné, qu'il soit en Lozère ou dans la région parisienne.
M. Richard Cazenave. Zéro !
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. C'est nul !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous sommes en train de mettre en place une politique de la famille, qui tranchera avec le déficit de 12 milliards que vous nous avez laissé...
Mme Nicole Catala. Parlons-en !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... et d'une loi Balladur qui n'était pas financée. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Mesdames, messieurs les députés, et cela vous gêne sans doute...
M. Christian Cabal. Trop d'impudence nous gêne, en effet !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... il existe, entre l'acceptation du plan Juppé et le risque d'une privatisation de la sécurité sociale, une autre voie, exigeante certes: celle d'une véritable démocratie sanitaire; celle d'une véritable protection sociale assise sur de nouvelles bases, la CSG et un financement d'avenir; celle d'un accès à la santé pour les plus défavorisés. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française. - Bruit.)
M. Charles Cova. Ca n'a rien à voir !
M. Christian Cabal. Un peu de décence !
M. Jean-Michel Dubernard. Quelle mauvaise foi !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je sais que tels ne sont pas vos objectifs. Vous pouvez toujours crier mais, là aussi, les Français reconnaîtront ceux qui répondent à leurs besoins. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Yves Bur

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité sociale

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 mai 1998

partager