établissements d'accueil
Question de :
M. Jean-Luc Préel
Vendée (1re circonscription) - Union pour la démocratie française
Question posée en séance, et publiée le 28 mai 1998
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
M. Jean-Luc Préel. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, chacun le sait, nos anciens souhaitent, lorsqu'ils vieillissent, demeurer à leur domicile. De nombreux services ont été mis en place pour le leur permettre. Cependant, leur état nécessite parfois un hébergement en établissement collectif: établissement de longue durée, foyer-logement, maison de retraite. Dans un tel cas, la structure d'accueil est rarement choisie en fonction de l'état de la personne, mais, hélas, en fonction des places disponibles. Or le coût d'hébergement payé par la personne, sa famille ou l'aide sociale est très variable. En particulier, la prise en charge des soins par l'assurance maladie, accordée sous la forme d'un forfait, est liée à la nature de l'établissement et non à l'état de la personne, les disparités sont donc énormes.
De plus, les nombreux besoins de médicalisation des établissements, qui ont été reconnus par les conseils régionaux d'orientation sociale, les CROS, ne sont pas financés. Ces besoins sont de l'ordre de 60 000 lits au niveau national et de 600 pour la seule Vendée.
Pour mettre un terme à ces anomalies, des députés de tous bords, dont Claude Bartolone, ont obtenu, lors de la discussion du texte instaurant la prestation spécifique dépendance, la PSD, que le Gouvernement réforme la tarification en vigueur au plus tard le 1er janvier 1999, soit dans un délai de deux ans. Et nous nous en étions tous réjouis.
Or, madame la ministre, après nous avoir expliqué longuement que la réforme de la tarification aurait lieu, voilà que, subrepticement, en deuxième lecture du projet de loi portant DDOEF, vous avez déposé un amendement repoussant de deux ans, soit au 1er janvier 2001, la mise en oeuvre de cette réforme.
Certes, vous invoquez le grand nombre des établissements, mais, pour moi, ce n'est qu'un prétexte, car rien n'empêche de légiférer sur les principes de l'harmonisation et de laisser les établissements passer leurs conventions avec les caisses régionales d'assurance maladie, les CRAM, et les conseils généraux.
Ne pensez-vous pas que ce retard va pénaliser lourdement les familles et retarder la juste médicalisation des établissements prenant en compte l'état de chaque personne ?
Comptez-vous financer sans tarder tous les lits accordés par les CROS mais non financés en dépit des besoins ?
M. Alain Néri. Cela vous va bien !
M. Jean-Luc Préel. Nos anciens et leurs familles vous écoutent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. En effet, monsieur le député, la loi de janvier 1997 prévoyait - mais cela faisait quinze ans que l'on attendait (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française) - une réforme de la tarification des établissements qui accueillent les personnes âgées. (Mêmes mouvements.)
J'ai dit quinze ans, ce qui signifie que nous étions tous impliqués. Alors cessez de hurler ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Comment se fait-il que vous soyez si nerveux, mesdames, messieurs de l'opposition, alors que je vous réponds très agréablement en soulignant que nous sommes tous responsables de ce retard. Alors, pour une fois, souriez ! (Mêmes mouvements.)
Je partage l'analyse de M. Préel: la tarification actuelle des établissements qui accueillent les personnes âgées n'est pas adaptée. Elle ne l'est pas car elle ne prend en compte ni la qualité des services, notamment celle des soins pour les personnes âgées, ni le degré de dépendance de ces dernières. De plus, cette tarification mêle, sans que nous soyons capables d'en mesurer totalement les effets, les financements des caisses d'assurance maladie, des départements, de l'Etat et des personnes âgées elles-mêmes.
Il faut donc mettre en place la réforme de la tarification des établissements, et ce sera fait dans les prochaines semaines.
Je tiens à souligner que, lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, cette réforme n'était pas prête. Or nous avons, en dix mois, préparé une réforme qui était attendue depuis de nombreuses années. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
La concertation entre les services est maintenant terminée. Je m'apprête à en mener une autre à un niveau différent car des problèmes se posent.
M. Philippe Auberger. Deux ans de plus, c'est trop !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, si j'ai souhaité repousser de deux ans, non la réforme de la tarification - qui, je le répète, va sortir dans des délais brefs - mais la possibilité pour les 9 000 établissements français qui peuvent accueillir des personnes âgées de signer des conventions qui prennent en compte la qualité des soins, des services de dépendance, de l'hébergement et du couvert, c'est pour que ce travail puisse se faire avec un véritable souci d'efficacité et que le meilleur service puisse être assuré aux personnes âgées.
M. Jean Glavany. Très bien !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Il n'est pas question de retarder la réforme. Elle va sortir ! Toutefois, il faudra bien deux ans pour que tous les établissements puissent être conventionnés. Si nous n'avions pas repoussé le délai prévu initialement, pratiquement 90 % des établissements auraient été dans l'illégalité au 31 décembre 1998 et n'auraient plus pu recevoir de personnes âgées. Dans ce cas, qu'aurait-on fait de ces dernières ?
Mon souci est, bien entendu, de voir aboutir cette réforme. Mais le lien avec la PSD est évident. Dès que cette réforme sera effective - j'espère, je le répète, que ce sera dans les plus brefs délais -, les conseils généraux devront prendre en charge la part relative à la dépendance.
Je le répète, le bilan que l'on peut dresser ne permet pas de mettre en évidence une quelconque amélioration pour les personnes âgées. Au contraire, on constate une détérioration puisque les conseils généraux ont dépensé 600 millions de moins en faveur des personnes âgées qu'avant la loi sur la PSD.
Si nous voulons que les personnes âgées soient bien traitées, l'assurance maladie doit prendre en charge les soins et les conseils généraux la dépendance. Tout le monde doit faire un effort pour que cela fonctionne ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Jean-Luc Préel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Personnes âgées
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 mai 1998