UEM
Question de :
M. François Loncle
Eure (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 16 octobre 1997
M. le président. La parole est à M. François Loncle.
M. François Loncle. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'Europe a connu hier ce que certains ont appelé, non sans raison, une journée faste. A Bruxelles d'abord, où la Commission a estimé que, compte tenu des perspectives de croissance, onze pays pourraient probablement rejoindre l'espace euro. En Italie ensuite, où la résolution de la crise gouvernementale a confirmé l'ancrage de ce grand pays figurant parmi les fondateurs de l'Europe dans une perspective européenne. Le gouvernement Prodi a été conforté dans un sens que M. le Premier ministre a eu raison de souligner, hier. Enfin, en Westphalie, où vous avez conclu hier un accord avec votre collègue ministre des finances allemand, M. Theo Waigel, et annoncé un dispositif dit «conseil de l'euro». Nous y attachons la plus grande importance, tant il est vrai que cette décision conduira à la coordination des politiques économiques et financières: la volonté, donc la décision politique, doit prévaloir, selon nous, sur le dispositif monétaire.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que vous nous apportiez des précisions sur les modalités et le calendrier de ce nouveau conseil de l'euro. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Comme vous le disiez, monsieur le député, la journée d'hier a été une journée faste pour l'Europe. Je ne m'arrêterai, si vous le voulez bien, que sur le dernier point de votre intervention, le conseil de l'euro.
L'Assemblée s'en souvient certainement, le Premier ministre, lors de la campagne électorale, a développé l'idée que nous étions, nous tous ici, favorables à la construction européenne, une construction qui se poursuit sur la base de l'euro à condition que cette construction serve au développement, à l'emploi et à la croissance. En conséquence, on ne saurait supposer que tout ne fonctionne qu'autour d'une banque centrale, certes indépendante, mais qui vivrait sa vie toute seule sans que les responsables politiques des différents pays aient leur mot à dire sur la coordination des politiques économiques. Dès le sommet d'Amsterdam, le principe en a été posé par la France et une résolution a été adoptée pour qu'un travail soit engagé en ce sens.
Vous ne l'ignorez pas, de nombreux pays européens étaient sceptiques face à cette initiative, soit parce qu'ils sont destinés à rester pour un temps en dehors de la monnaie unique, soit parce que, participant à la monnaie unique, ils ne voyaient pas encore l'intérêt d'un tel gouvernement économique.
La France a développé cette thèse.
M. Jacques Myard. C'est faux !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je ne dirai pas que tout cela est totalement acquis, car nous n'avons pour le moment qu'un accord avec nos amis allemands, mais je sais déjà que mes collègues autrichien, portugais, belge et luxembourgeois partagent la position française.
L'accord signé hier permet donc de constituer ce que nous avons appelé dans le franglais bruxellois un eurogroupe, qui prendra, sans doute par similitude avec le G 7, le nom plus simple de E8, 9, 10, 11... selon le nombre de pays qui seront finalement dans l'euro. Ce sera comme le G 7 un groupe informel, mais qui se réunira grosso modo tous les mois et qui permettra aux ministres de l'économie et des finances des pays ayant une monnaie ensemble de conduire - dans les domaines fiscal, monétaire, dans ceux des politiques structurelles, de l'analyse de la conjoncture, des coûts, des salaires -, les comparaisons, les échanges d'informations permettant d'avoir une politique économique coordonnée.
M. Jacques Myard. Et il faut l'euro pour ça ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'était pour nous une condition importante du bon fonctionnement de l'euro, pour des raisons que je ne peux analyser. Le gouvernement français, dans le passé, n'avait pas réclamé une telle institution et il s'engageait donc spontanément et benoîtement vers un euro qui aurait été dominé par une banque centrale indépendante.
M. Jacques Myard. Pipeau !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons tenu à ce que l'euro se fasse. Je le redis avec force: nous sommes pour l'euro, mais pour un euro qui serve la croissance et l'emploi, et je pense que la décision d'hier a constitué un grand pas dans cette direction. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. François Loncle
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 octobre 1997