Corse
Question de :
M. Jean Glavany
Hautes-Pyrénées (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 24 juin 1998
M. le président. La parole est à M. Jean Glavany.
M. Jean Glavany. Monsieur le Premier ministre, l'article VI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse.
En Corse, l'application désormais rigoureuse de la loi républicaine suscite, je le crois, une très vaste approbation - «Enfin !» disent la majorité des Corses - et, en même temps, une interrogation: «Pourvu que ce ne soit pas un feu de paille !»
C'est pourquoi, un an après votre prise de fonctions et, surtout, quatre mois après le lâche et odieux assassinat du préfet Erignac, je souhaite que vous indiquiez à la représentation nationale dans quelles perspectives vous inscrivez l'action de l'Etat et de votre gouvernement en Corse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lucien Degauchy. Qui remercie pour la question !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, le 10 février dernier, après l'assassinat du préfet Erignac en Corse, j'ai pris l'engagement, au nom du Gouvernement, en accord avec le Président de la République, d'engager tous les moyens nécessaires pour assurer le respect de la loi en Corse, comme partout sur le territoire national.
Je me réjouis que le Parlement ait affirmé la même volonté, notamment à travers la mise en place de la commission d'enquête que vous présidez, monsieur le vice-président de l'Assemblée nationale, et qui compte des parlementaires de tous bords.
Cette action que conduit le Gouvernement est menée avec sérénité et détermination,...
M. Lucien Degauchy. Pourvu que ça dure !
M. le Premier ministre. ... sans effet de manches, de manière méthodique et systématique, non seulement par le ministre de l'intérieur, Jean-Pierre Chevènement, dont la responsabilité, naturellement, est importante, mais également par tous les ministres. Tous les services de l'Etat - justice, police, gendarmerie, services fiscaux ou agricoles, services d'urbanisme et d'équipement -, les autres services publics sont mobilisés en ce sens. Les ministres y contribuent personnellement et, encore tout récemment, Mme Elisabeth Guigou et M. Christian Sautter se sont rendus sur place, dans le cadre de leurs responsabilités, pour veiller à l'action de l'Etat.
Des changements de responsables sont intervenus. Des réorganisations sont en cours. Elles s'appuient sur des missions de contrôle engagées par nos corps. D'autres missions suivront.
Je suis personnellement et régulièrement avec les membres du Gouvernement concernés la mise en oeuvre des actions que nous avons décidées.
Ce retour progressif à la primauté du droit dans l'île a d'ores et déjà eu certains résultats: plusieurs enquêtes judiciaires importantes ont été ouvertes, révélant des détournements de fonds publics et de graves irrégularités dans les passations de marché. La justice fait son travail. Elle mènera les procédures dont elle est ou sera saisie jusqu'au bout.
Mais, quels que soient la volonté et les efforts engagés et affirmés par l'Etat, l'adhésion de ceux qui vivent en Corse est nécessaire. La population corse doit être consciente, et je sens qu'elle l'est, que le retour à la norme de droit est la condition même d'un véritable développement économique et social dans l'île.
A cette fin, la Corse dispose d'atouts considérables. Nous les valoriserons en restaurant l'ordre public et en imposant des mécanismes sains de financement de l'économie, mais aussi en privilégiant l'excellence dans les domaines de l'éducation, de la formation, de l'enseignement supérieur, de l'université et de la recherche. Le potentiel touristique est considérable. Il peut être mobilisé et mis en valeur très rapidement. L'agriculture, débarassée de ce qui la parasite, peut et doit développer ses potentialités, notamment pour les produits de qualité. La capacité d'innovation doit être fortement encouragée pour que soient développés des produits performants et créés des emplois qualifiés. Les technologies modernes de communication peuvent faire échapper l'île aux inconvénients du relief et de l'insularité.
La préparation du prochain contrat de plan, dont les travaux vont commencer au cours des prochaines semaines, entre la collectivité de Corse et les services de l'Etat, peut constituer l'occasion de bâtir avec l'île un véritable programme de développement.
Il y a un an, ici même, j'ai proposé aux Français un pacte républicain et un pacte de développement et de solidarité. Pour l'un comme pour l'autre, les Corses savent qu'ils peuvent compter sur le Gouvernement. Il agit sans passion et sans faiblesse, et il agira dans la durée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)
Auteur : M. Jean Glavany
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 juin 1998