Question au Gouvernement n° 797 :
euthanasie

11e Législature

Question de : M. Bernard Charles
Lot (1re circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 8 octobre 1998

M. le président. La parole est à M. Bernard Charles.
M. Bernard Charles. Monsieur le Premier ministre, le débat sur l'euthanasie a été relancé ces dernières semaines par deux affaires pénibles. Personne n'a jamais osé lever le tabou. On laisse ainsi les médecins et les infirmières seuls avec leur conscience face à la déchéance d'un patient agonisant.
J'ai déposé, il y a dix ans, une proposition de loi pour le droit de mourir dans la dignité. Au cours de l'examen des lois «bioéthiques», il a été décidé de ne pas légiférer dans ce domaine, où personne ne peut prétendre détenir la vérité.
Faut-il aujourd'hui légiférer ? Faut-il dépénaliser ? Faut-il continuer à agir dans la clandestinité, au hasard, dans le silence des consciences ? Faut-il laisser en toute légalité un médecin poursuivre un acharnement thérapeutique malgré la code de déontologie ? Ces questions méritent un débat public. Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement envisage-t-il dans un avenir proche d'organiser un débat parlementaire sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le député, faut-il un débat public sur ce sujet ? Je le crois.
M. Renaud Muselier. Oui !
M. le secrétaire d'Etat à la santé. Nous avons d'ailleurs l'intention de l'organiser au plut tôt, en vous y associant tous, au cours d'états généraux.
Faut-il légiférer ?
M. Renaud Muselier. Non !
M. le secrétaire d'Etat à la santé. Je n'en suis pas si sûr, monsieur Charles.
Les choses évoluent. Les gens qui s'interrogent sur la notion que recouvre ce mot d'«euthanasie», que je n'aime pas et que j'aimerais qu'on change, sont de plus en plus nombreux.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'abord de réfléchir pour aménager le passage, la fin de la vie, l'accompagnement de nos aînés, de ceux qui vont mourir. C'est culturellement difficile, mais c'est en train de changer.
Il faut d'abord que les soins dits «palliatifs», que je préférerais appeler «soins d'accompagnement», soient plus développés dans notre pays, ce qui réglerait un nombre infini de problèmes, la plupart, mais pas tous. Nous avons lancé un plan de développement des équipes de soins palliatifs. S'il peut être mené à bien, il fournira une partie de la réponse.
En amont, c'est la douleur qui doit être prise en charge, car ces réalités-là sont terriblement liées. Nous avons un budget pour cela, et nous en discuterons ici en examinant le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Pour le reste, un certain nombre de choses peuvent être faites. J'ai demandé au Premier ministre de saisir le Conseil économique et social pour qu'il conduise une réflexion sur le congé d'accompagnement et sur l'euthanasie. Pourquoi un congé d'accompagnement ? Tout simplement parce que, dans notre pays, quand on s'arrête de travailler à cause d'une grippe, on est pris en charge, alors que ce n'est pas le cas quand on veut le faire parce qu'un des siens va mourir; je pense que ce n'est pas normal.
Certaines de ces réflexions feront l'objet des débats qui auront lieu lors des états généraux. Se dérouleront-ils ici ? Pourquoi pas ? Mais lançons le débat public d'abord.
D'autres réflexions sont conduites ailleurs, en particulier par des éléments religieux. Des exemples sont donnés dans notre pays, il nous faut les méditer. En tout cas, monsieur le député, la question est à l'ordre du jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Bernard Charles

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Mort

Ministère interrogé : santé

Ministère répondant : santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 octobre 1998

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