allocations familiales
Question de :
M. Gérard Hamel
Eure-et-Loir (2e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 15 octobre 1998
M. le président. La parole est à M. Gérard Hamel.
M. Gérard Hamel. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Depuis de nombreux mois, des députés de l'opposition proposent de mettre sous tutelle les allocations familiales des parents d'enfants délinquants. En juillet 1997, j'ai moi-même pris un arrêté municipal demandant le recueil des enfants de moins de douze ans circulant seuls la nuit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pur la République.) Cet arrêté a été l'objet d'attaques virulentes, notamment de la part de votre collègue Mme Royal, qui a osé dire que je prenais les enfants pour des chiens. Néanmoins il a eu le mérite d'ouvrir dans le pays un débat essentiel.
En octobre 1997, j'ai déposé une proposition de loi dont le but était, entre autres, de responsabiliser les parents. Aujourd'hui, un sondage paru dans l'hebdomadaire du Parti socialiste, réalisé auprès des adhérents de ce parti, montre qu'une majorité d'entre eux se prononcent en faveur de l'interdiction de circuler seuls la nuit pour les jeunes enfants, ainsi que pour la mise sous tutelle des allocations familiales des parents d'enfants délinquants. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Monsieur le Premier ministre, puisque vous considérez désormais l'ordre comme une valeur de gauche,...
M. Didier Boulaud. Pas l'ordre moral !
M. Gérard Hamel. ... et puisque vos militants en sont d'accord, qu'attendez-vous pour mettre enfin en oeuvre ces mesures de bon sens ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je veux d'abord souligner que nous sommes probablement tous d'accord, sur ces bancs, pour dire - comme je l'ai fait hier - que les familles non seulement sont responsables de l'éducation de leurs enfants mais ont aussi un rôle majeur à jouer pour leur donner des repères, une bonne appréciation de la vie en collectivité et même des valeurs. («Le PACS !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Sur la base de ce constat, il y a deux façons de responsabiliser les familles: celle qui consiste à les montrer du doigt lorsqu'elles sont en difficulté et celle qui tend à les aider, à les accompagner pour qu'elles puissent remplir complètement leurs missions. A l'instar de nos collègues Christine Lazerges et Jean-Pierre Balduyck, nous avons choisi cette seconde voie pour lutter contre la délinquance des mineurs.
M. Pierre Lequiller. Cela ne marche pas !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Quant à la possibilité de mettre sous tutelle les allocations familiales, je vous rappelle qu'elle existe déjà dans la loi. Ainsi, un juge peut la prononcer lorsqu'il s'avère qu'une famille les utilise à des fins qui n'ont rien à voir avec l'éducation des enfants, par exemple quand un enfant ne peut pas manger à sa faim et que la famille ne paie pas la cantine. Cela existe. Laissons le juge l'appliquer lorsqu'il l'estime judicieux. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. André Angot. Ce n'est pas le problème !
M. Jacques Myard. Cela n'a rien à voir !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Comme je l'ai indiqué hier, nous avons choisi de renforcer l'aide aux parents qui n'arrivent pas à faire face à leurs obligations, souvent parce qu'ils ont eux-mêmes des difficultés. Alors, leurs enfants dérapent, tombent dans la délinquance et ils ont du mal à reprendre le dialogue avec eux.
Ainsi, un crédit d'un milliard de francs est inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale au titre de l'action sociale de la caisse d'allocations familiales pour financer la mise en place, dès cette rentrée, de lieux de rencontre entre parents et enfants, des lieux d'aide aux parents. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous préférons essayer de valoriser le rôle des parents au lieu de toujours les montrer du doigt comme vous le faites, en prônant coercition et contrôle. Nous aiderons nos concitoyens en améliorant la cohésion sociale et non pas en cherchant des boucs émissaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Gérard Hamel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Prestations familiales
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 octobre 1998