physique nucléaire
Question de :
M. Pierre Lasbordes
Essonne (5e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 4 novembre 1998
M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes.
M. Pierre Lasbordes. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Monsieur le ministre, il y a tout juste quinze jours, je vous faisais part, lors de l'examen du budget de votre ministère, de l'exceptionnelle mobilisation de la communauté scientifique et des élus, sur l'impérieuse nécessité de réaliser le synchrotron de troisième génération, dit «projet Soleil». Votre réponse n'a pas été de nature à me rassurer et a fait l'objet d'une vive réaction de la part des chercheurs.
Aujourd'hui, nous apprenons avec stupeur, par un haut fonctionnaire qui ne relève pas de votre administration, l'abandon définitif du projet Soleil, c'est-à-dire l'abandon d'une recherche française de haut niveau, de quelque quatre cents emplois permanents...
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. C'est grave !
M. Pierre Lasbordes. ... d'environ deux mille chercheurs de passage par an, bref d'un outil indispensable à la recherche fondamentale et à la capacité d'innovation technologique de plusieurs centaines de PME.
A l'heure où les médias multiplient leurs investigations sur la fuite de nos cerveaux à l'étranger, cette prise de position n'est pas faite pour nous rassurer.
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. Dramatique !
M. Pierre Lasbordes. Je vous le répète, monsieur le ministre, la communauté scientifique est unanime sur la nécessité de réaliser ce projet. Les études menées depuis plusieurs années en font toutes le constat.
Les élus de toute tendance, conscients de l'enjeu, s'impliquent dans ce projet et je peux vous assurer qu'ils sont aussi soucieux que vous du bon usage des deniers publics. Je vous rappelle, si nécessaire, que dès 1987, le département de l'Essonne et la région Ile-de-France s'engageaient à financer le projet à hauteur de 50 %.
Monsieur le ministre, rassurez-nous sur votre détermination à garder à la recherche française le niveau d'excellence qui doit être le sien, en lui donnant les moyens que cette ambition requiert, c'est-à-dire en décidant notamment de réaliser en France le projet Soleil. Nous n'attendons plus que vous, monsieur le ministre ! (Applaudissement sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le député, comme vous l'avez souligné, l'emploi des fonds publics, notamment pour les gros équipements, m'importe beaucoup.
S'agissant des synchrotrons de deuxième génération, je vous informe qu'il en existe deux aux Etats-Unis et qu'il n'y en aura pas davantage. Il en existe déjà sept en Europe. Aussi nous sommes-nous demandé si, dans ce domaine, l'Europe avait besoin de trois fois plus d'investissements que les Etats-Unis - ce serait unique !
Nous avons donc, en liaison avec les ministres allemand et italien, décidé la création d'un consortium européen et nous avons confié une étude à M. Clavin afin de savoir s'il est nécessaire de réaliser un nouveau synchrotron en France. La moitié des synchrotrons actuellement en activité en Europe sont utilisés par les chercheurs anglais, tout en étant financés par les différents pays. Je ne suis pas certain que la France ait vocation à payer la recherche anglaise ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
De toute manière, la fuite des chercheurs français est telle que nous avons donné la priorité à l'embauche de jeunes chercheurs. Cette année, 5 000 postes d'enseignants-chercheurs ont été créés, ce qui devrait éviter que se poursuive cette fuite de cerveaux que l'on devait à votre politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Pierre Lasbordes
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Recherche
Ministère interrogé : éducation nationale, recherche et technologie
Ministère répondant : éducation nationale, recherche et technologie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 novembre 1998