immigration
Question de :
M. Michel Bouvard
Savoie (3e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 18 novembre 1998
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur par intérim.
Je voudrais revenir, en tant que député de Modane, sur la situation de cette ville, qui était plus connue comme le premier point frontière pour les échanges ferroviaires de la France que pour les questions d'immigration.
En dépit de la force de conviction que vous avez mise dans votre réponse, monsieur le Premier ministre, vous ne m'avez pas convaincu, notamment sur l'aspect des discussions européennes. Ce qui s'est passé montre en effet qu'il y a eu un dysfonctionnement évident au niveau des accords de Schengen. Soit le gouvernement italien a informé le gouvernement français, et la France aurait dû prendre des dispositions pour prévenir une telle situation, soit il ne l'a pas informé et il y a un problème de fonctionnement des accords de Schengen que l'Italie a récemment signés. («Très bien !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) C'est le premier point qui montre à l'évidence que l'immigration n'est pas contrôlée au niveau communautaire. Depuis jeudi après-midi, en effet, où je me trouvais dans cette ville, plus de 2 000 clandestins sont arrivés dans une ville de 4 000 habitants dépourvue de toute infrastructure d'accueil, et ont été refoulés par les autorités italiennes. On s'est longtemps gaussé d'elles en matière de contrôle des frontières, mais, pour le coup, il a été d'une rigidité absolue.
J'ajouterai un second point puisqu'on parlait d'humanité, et c'est un point important. Voilà plusieurs milliers de clandestins qui sont venus parce que des associations irresponsables leur ont laissé entendre qu'ils pourraient être régularisés en Italie.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. C'est vrai !
M. Michel Bouvard. Ils arrivent à Modane, où aucune structure d'accueil n'est prévue, où aucun contrôle ne peut être effectué, car il n'y a pas de centre de rétention. Le premier est à l'aéroport de Lyon-Satolas, à 175 kilomètres, avec 75 places ! Comment peut-on, dans ces conditions, procéder à des contrôles de façon sérieuse ? Plusieurs milliers de ces étrangers sont aussi en situation irrégulière sur notre territoire. Qu'avons-nous fait ? On leur a donné une couverture et un pain dans les locaux de la Croix-Rouge et on les a laissés repartir après avoir relevé leur identité, quand on a pu. Est-ce cela contrôler l'immigration ? Combien resteront définitivement sur notre territoire ?
Sans esprit polémique, parce que c'est une expérience vécue et traumatisante, y compris pour les élus de cette commune et de ce canton, nous souhaiterions savoir quelles dispositions le Gouvernement entend prendre pour que de tels dysfonctionnements ne se renouvellent pas au niveau communautaire et pour que cette ville frontière, qui est un lieu de passage de clandestins tout au long de l'année dans des proportions moins importantes, soit dotée des infrastructures nécessaires pour permettre un contrôle de l'immigration clandestine. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Louis Debré. Il faut que Mme Voynet réponde !
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Monsieur le député, vous êtes député de la Savoie et je voudrais tout d'abord saluer, et M. Debré s'associera certainement à moi,...
M. Jean-Louis Debré. Je ne m'associe jamais à vous !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. ... le travail qu'ont effectué les fonctionnaires de police de la DICCILEC,...
M. Jean-Louis Debré. Ce n'est pas vous qui les encouragez !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. ... confrontés au renvoi par les Italiens d'immigrés attirés par l'opération de régularisation.
M. Jean-Louis Debré. Répondez à la question.
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. La Croix-Rouge, sur place, a joué, grâce aux crédits dégagés par le ministère de l'intérieur, un rôle éminent pour assurer un accueil décent aux immigrés qui se sont trouvés en gare de Modane.
M. Yves Nicolin. Vous n'êtes même pas allé sur place !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Nous avons pris des dispositions. Toutes ces personnes ne venaient pas de France. Un grand nombre d'entre elles venaient de Belgique, d'Allemagne, de Grande-Bretagne et d'Espagne. Pour éviter un afflux vers Modane, nous avons procédé à des contrôles, en particulier à la gare de Lyon: 700 vérifications d'identité ont été opérées dans les trains Paris-Milan ou Paris-Rome qui passent par Modane.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Ce n'est pas assez !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Telles sont les mesures que nous avons prises pour faire face aux difficultés créées par cette opération de régularisation dont le Premier ministre a parlé tout à l'heure.
M. Yves Nicolin. Allez sur place !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Au niveau européen, les problèmes de l'immigration doivent maintenant être appréhendés de façon beaucoup plus sérieuse par l'ensemble des gouvernements qui participent à l'espace Schengen.
M. Jean-Louis Debré et M. Patrick Ollier. Répondez à la question !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intéréieur par intérim. La France participe à l'élaboration d'un plan stratégique de l'Union européenne sur l'immigration pour les cinq années à venir et il me paraît indispensable que, dans les prochains mois, une coordination soit assurée.
A la fin du mois d'octobre dernier, sous présidence autrichienne, les ministres de l'intérieur des quinze pays se sont réunis pour examiner les problèmes posés par l'immigration clandestine et les mouvements à travers les frontières.
M. Yves Nicolin. Envoyez Voynet !
M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Nous sommes tous convaincus que la réponse n'est pas seulement nationale mais qu'elle est aussi européenne.
En tout cas, à Modane, les populations, les élus, les associations comme la Croix-Rouge et les fonctionnaires ont joué un rôle humanitaire d'accueil pour des personnes qui ont souvent été entraînées vers l'Italie par des mouvements ou des associations qui leur ont fait miroiter une régularisation qu'ils ne peuvent pas obtenir. Nous essayons de faire face à ces problèmes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Louis Debré. Répondez aux questions !
Auteur : M. Michel Bouvard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 novembre 1998