sida
Question de :
M. Philippe Nauche
Corrèze (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 2 décembre 1998
M. le président. La parole est à M. Philippe Nauche.
M. Philippe Nauche. Monsieur le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, en cette onzième Journée mondiale de lutte contre le sida, les Nations unies ont décidé de mettre les jeunes au centre de la campagne de lutte cotre cette maladie. C'est une bonne chose. En effet, le travail d'information est plus que jamais nécessaire, car les évolutions thérapeutiques peuvent être faussement rassurantes et amener certains à baisser la garde pour ce qui est de la prévention et de l'information.
Je rappellerai qu'en France 5 000 personnes par an sont contaminées: elles s'ajoutent aux 120 000 personnes estimées porteuses du VIH, et que 35 000 décès ont été enregistrés dans notre pays suite à cette maladie.
Je souhaiterais que vous fassiez le point sur l'action gouvernementale menée depuis un an en matière de prévention, de dépistage et de traitement, et que, au-delà du simple constat budgétaire, vous exposiez devant la représentation nationale la politique que le Gouvernement entend mener dans ce domaine, pour l'année à venir et à plus long terme.
Par ailleurs, vous avez émis hier des réserves quant à l'action défaillante de certains grands laboratoires privés bénéficiant de fonds issus de l'Agence nationale de recherche sur le sida. Que comptez-vous faire pour que la situation évolue dans un meilleur sens ?
Enfin, nous savons tous qu'environ 90 % des personnes touchées par le sida vivent dans des pays en voie de développement. Pourriez-vous nous préciser quelles initiatives notre pays compte prendre en direction de la communauté internationale afin d'améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des millions de victimes qui vivent dans ces pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le député, c'est la journée mondiale de lutte contre le sida et, à cette occasion, vous avez bien fait de rappeler que 35 000 de nos compatriotes, comme des millions à travers le monde ont été emportés par cette maladie. Cette journée est donc d'abord faite pour penser à eux.
Par ailleurs, pardonnez-moi de répondre un peu brutalement à la dernière partie de votre question. Une dépêche, qui n'a été contredite que longtemps après, m'a prêté faussement une colère contre les laboratoires. Je me félicitais au contraire, aux côtés de Claude Allègre, du fait que 85 % des molécules nouvelles aient été développées par les laboratoires alors qu'elles provenaient de nos laboratoires universitaires de recherche. Quant aux 15 % restants, et peut-être aussi pour certaines molécules, il conviendrait d'établir un pont pour faciliter les rapports entre les chercheurs et l'industrie, car ces derniers n'ont pas pour vocation de développer les molécules.
Vos chiffres sont, hélas ! vrais: 120 000 personnes sont infectées dans notre pays. Malgré tout, le nombre moyen des nouvelles contaminations, qui était de 5 000 à 6 000 par an, semble diminuer. Le réseau national de santé publique nous a en effet signalé 1 150 nouveaux cas pour le premier trimestre de cette année, ce qui, reproduit à l'année, correspondrait au tiers. Ce serait une excellente nouvelle mais il vaut mieux attendre la fin de l'année avant de se prononcer.
Que pouvons-nous faire ? Certes, le problème n'est pas uniquement budgétaire, mais il l'est aussi. Car nous dépensons environ 3 milliards de francs pour prendre en charge les thérapeutiques. Dans notre pays, et grâce à mes prédécesseurs, l'accès aux molécules a été extrêmement rapide par comparaison avec certains pays avoisinants. La trithérapie autorise, non pas des succès, car le sida reste une maladie mortelle, mais une certaine diminution de la mortalité, de 60 %. Mais les quadrithérapies et les pentathérapies sont pour demain et il nous faut réserver l'avenir.
Monsieur le député, vous avez raison de dire que la prévention ne doit pas se relâcher. Dans notre pays, 30 % des personnes malades du sida entrent dans la maladie sans avoir connu auparavant leur séropositivité. Cela signifie que l'information passe encore trop mal, dans certains milieux défavorisés.
Enfin, en installant hier le nouveau directeur de l'Agence nationale de recherche contre le sida, nous lui avons demandé, en augmentant un peu son budget, de prendre en charge également les diagnostics et éventuellement la thérapie, bithérapie ou monothérapie, des malades atteints d'hépatite C qui complique le pronostic et concerne au moins 600 000 personnes dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Philippe Nauche
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : santé et action sociale
Ministère répondant : santé et action sociale
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 décembre 1998