maisons de retraite
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Les maisons de retraite n'échappent pas au monde de la finance. Les besoins d'hébergement vont inévitablement exploser : il faudra 25 % de places en plus en 2010, soit entre 40 et 60 000 places à créer, selon un rapport du Commissariat au Plan paru en juillet 2006. Le secteur privé de l'hébergement des personnes âgées, qui représente actuellement environ 20 % des quelque 400 000 lits d'accueil en France, Orpéa, numéro deux français a doublé son chiffre d'affaires en trois ans (310 millions d'euros en 2005) et triplé son cours en bourse. Mais il reste aussi très « atomisé ». Á l'exception de quelques rares groupes commerciaux importants (Orpéa, Medidep), la plupart des résidences privées sont indépendantes, souvent détenues par des personnes physiques, des associations et des mutuelles. La montée en puissance des groupes privés lucratifs relève d'une logique implacable car ce sont les seuls à avoir les moyens suffisants pour répondre à la demande. L« 'or gris » aiguise clone les appétits et le phénomène n'est pas spécifique à la France : les fonds d'investissement sont très intéressés parce que « l'activité dégage beaucoup de liquidités » comme le soulignent bon nombre d'analystes. Et les fonds sont prêts à payer cher : l'européen BC Partners a ainsi déboursé 750 millions d'euros en juillet 2006 pour racheter le groupe français Medica à un autre fonds européen, Bridgepoint, qui l'avait acquis en 2003 pour 330 millions. Surtout, l'éclatement du secteur entraîne sa concentration, chose très inquiétante en soi. En France, Medidep, entré en bourse en 1998, vient de se faire absorber par un autre groupe, Suren, qui est lui-même le fruit de quatre rapprochements successifs en cinq ans. L'entité Medidep-Suren, désormais numéro un du secteur avec plus de 10 000 lits et 130 établissements environ, va faire son entrée à la bourse prochainement. Il est à prévoir que la concentration continue de façon encore plus inquiétante dans ce secteur important pour la solidarité nationale. Inspiré par le succès boursier de Medidep (le prix de l'action a quasiment décuplé entre 1998 et 2006), Orpéa a choisi la même voie en 2002. Introduit à seize euros, le titre se négocie aujourd'hui aux alentours de cinquante euros. Autre aspect particulièrement inquiétant : la méthode usitée par ces opérateurs est d'acheter des établissements existants et en faire des résidences relativement haut de gamme. C'est sur la partie hôtellerie, aux tarifs libres, que les groupes commerciaux font leurs bénéfices, le coût des soins étant réglementé par l'État. Pour exemple, un mois d'hébergement dans une résidence Orpéa peut atteindre 2 000 euros. Or bien peu de personnes âgées peuvent payer un tel prix, hormis à contraindre leurs descendants à devoir grever leur propre budget au titre de la solidarité familiale, chose de plus en plus déraisonnable dans un contexte de baisse générale et incontestable du niveau de vie des Français. Compte tenu de ces éléments, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille de lui indiquer les mesures urgentes qu'il entend prendre, à la fois, contre la spéculation financière et la concentration qui s'opère actuellement dans le secteur des maisons de retraites privées, et au sujet du nécessaire encadrement et plafonnement des tarifs hôteliers pratiqués dans ce secteur. - Question transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Réponse publiée le 23 janvier 2007
La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) contrôle attentivement les concentrations dans le secteur des maisons de retraite comme elle le fait dans tous les autres secteurs économiques afin de garantir l'existence de structures de marché concurrentielles. Ainsi, l'acquisition de la société Medipep par la société Suren a fait l'objet d'une instruction par la DGCCRF à l'issue de laquelle une autorisation a été délivrée le 20 septembre 2005. Sur aucun des segments de marché envisagés, la nouvelle entité ne détenait plus de 20 % de parts de marché. Le ministre a constaté qu'elle ferait face à la concurrence d'autres établissements privés mais aussi à celle du secteur public. Toute nouvelle opération de concentration dans le secteur des maisons de retraite ferait l'objet du même type d'analyse. Par ailleurs, la DGCCRF assure la protection économique des consommateurs fragilisés par leur état de dépendance. Elle vérifie auprès des maisons de retraite comme auprès de tous les prestataires de services le respect des règles du code de la consommation : affichage des prix, remise de note, publicité. Elle vérifie également que lors de leur entrée en établissement les personnes âgées ont signé un contrat dans lequel figure le prix des prestations. Ce prix ne peut augmenter chaque année que dans la limite d'un pourcentage fixé par le ministre chargé de l'économie et des finances. Ce taux de hausse maximum s'attache à concilier deux exigences. Il doit tenir compte de l'évolution des charges supportées par l'exploitant, pour que le contrat conclu à l'origine reste équilibré (frais de personnel notamment) et de l'évolution des ressources des personnes âgées hébergées pour éviter des hausses qu'elles ne pourraient assumer. Il s'agit d'éviter que des personnes âgées ne soient obligées de quitter les lieux, faute de pouvoir continuer à financer leur hébergement. Il s'agit également de ne pas provoquer de hausse de prix trop importante pour les nouveaux entrants.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Personnes âgées
Ministère interrogé : sécurité sociale, personnes âgées, personnes handicapées et famille
Ministère répondant : économie
Dates :
Question publiée le 5 septembre 2006
Réponse publiée le 23 janvier 2007