biocarburants
Question de :
M. Jean-Marc Roubaud
Gard (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Marc Roubaud appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur l'agitation de certaines organisations professionnelles et coopératives autour des biocarburants et de l'éthanol en particulier. Le Gouvernement met en avant les mérites de cette technique, largement développée au Brésil, qui permet d'incorporer jusqu'à 85 % d'éthanol dans le carburant des véhicules et dont le développement suppose d'abondantes matières premières agricoles produites par les paysans. Au moment de s'engager dans des investissements coûteux, il conviendrait de mieux évaluer le réel intérêt de ce type de biocarburants, tant pour les agriculteurs que pour l'économie et l'environnement. Les agriculteurs pensent que sans la défiscalisation, l'éthanol n'est rentable que si les paysans font don de leur production. Aujourd'hui, le Gouvernement s'engagerait à maintenir cette défiscalisation durant au moins six ans. Lorsque l'on examine le bilan énergétique des filières éthanol, la question économique rejoint la question écologique. En effet, le bioéthanol produit à partir de blé ou de betterave est le biocarburant qui consomme le plus de carburant fossile pour sa fabrication, à tel point que la production nette d'un hectare de blé est proche de zéro. Les rendements de betterave sont légèrement meilleurs, mais ils n'ont rien à voir avec la canne à sucre qui est presque deux fois plus compétitive, que ce soit par son coût de revient ou par son rendement énergétique net. Celà implique qu'à chaque augmentation de pétrole l'écart de compétitivité entre l'éthanol de canne à sucre et nos éthanols métropolitains ne fera que se creuser. La pertinence du Flex Fuel suppose donc d'importer l'éthanol des pays producteurs de canne. Au regard de tous ces éléments, la plus grande prudence s'impose. Le Flex Fuel ne représente une opportunité que pour les transformateurs ou les importateurs d'éthanol. En conséquence, il lui demande de lui faire connaître sa position à ce sujet.
Réponse publiée le 28 novembre 2006
La production de biocarburants en France participe à la fois à l'ouverture de nouveaux marchés pour l'agriculture, à la réduction de notre dépendance énergétique ainsi qu'à la limitation des émissions de gaz à effet de serre. Le plan biocarburants adopté par le Gouvernement en 2005 prévoit un développement équilibré des filières de production des biocarburants et en particulier de l'éthanol. Ces cultures permettent de conforter le revenu des agriculteurs, notamment lorsqu'elles sont pratiquées sur des terres mises en jachère au sens de la politique agricole commune (PAC). En 2006, près de 20 000 hectares de blé et 23 000 hectares de betteraves sont mobilisés par la production d'éthanol. L'objectif de 7 % d'incorporation d'éthanol dans les essences consommées en France en 2010 correspond à environ 360 000 hectares de céréales et de betteraves soit moins de 4 % de la superficie totale actuellement consacrée à ces cultures. Il convient par ailleurs de souligner que la réalisation de l'objectif d'incorporation d'éthanol retenu pour 2010 s'accompagnera de la production de près de 175 000 tonnes de pulpes de betteraves et de 700 000 tonnes de drêches de céréales destinées à l'alimentation animale, la filière biodiesel produisant à cette même date un volume estimé à plus de 3 millions de tonnes de tourteaux. En terme de bilan énergétique, le rendement (énergie produite, énergie fossile utilisée) est de deux pour la filière éthanol à partir de blé ou de betterave à comparer avec celui des filières essences de 0,87. En fonction des cultures et des rendements considérés, chaque hectare consacré aux biocarburants permet d'obtenir de une à deux tonnes équivalent pétrole (tep) d'énergie nette disponible, déduction faite de tous les besoins énergétiques liés à la production. Actuellement, l'éthanol brésilien bénéficie de coût de production plus bas que l'éthanol européen. Cela s'explique par l'antériorité du développement de cette filière mais aussi par les conditions sociales et environnementales dont les standards ne sont pas comparables avec les standards européens. Cela justifie le maintien d'un droit de douane élevé pour les importations dans l'Union européenne. Avec ce droit de douane, les prix européens de l'éthanol sont compétitifs avec les prix brésiliens rendus Europe. Pour l'avenir, l'écart entre les productions européennes et brésiliennes doit toutefois se réduire : les dépenses énergétiques brésiliennes doivent être augmentées des dépenses de transport d'exportation ; le remplacement d'une coupe manuelle de la canne au Brésil par une récolte mécanisée augmentera les dépenses d'énergies ; la hausse du coût de l'énergie incite les producteurs européens à réduire leurs dépenses énergétiques, ce qui n'était plus le cas depuis le contre-choc pétrolier ; la construction d'unités modernes de taille optimisée va permettre d'apporter des économies d'échelle et d'améliorer les performances européennes. Enfin, si l'Europe se reposait sur des importations cela la priverait des avancées technologiques qui ne vont pas manquer dans les temps à venir. Le développement des véhicules « flex fuel » sur la base d'un éthanol européen est donc pertinent pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, améliorer notre autonomie énergétique en procurant à la nation une création supplémentaire de valeur ajoutée et aux agriculteurs un revenu appréciable.
Auteur : M. Jean-Marc Roubaud
Type de question : Question écrite
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Dates :
Question publiée le 5 septembre 2006
Réponse publiée le 28 novembre 2006