élargissement
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Mme Chantal Robin-Rodrigo appelle de façon toute particulière l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur la difficile réunification de Chypre à la veille de l'adhésion de la seule partie grecque de l'île à l'Union européenne. Cet Etat, toujours honteusement déchiré, voit son processus de réunification piétiner. En effet, malgré le « plan Annan », considéré comme un bon compromis, et concocté par le secrétaire général de l'ONU, la partie sous occupation turque renâcle encore et toujours à négocier la réunification de l'Etat chypriote. Pourtant, de plus en plus de voix se font entendre au sein de la communauté chypriote turque pour réclamer un déblocage rapide de cette regrettable attitude et situation. Selon la bouche même de M. Kutlay Erk, maire de la partie nord de Nicosie, tout ceci serait le fait du clan au pouvoir dans la partie occupée dirigé par M. Rauf Denktash, personnage qu'il qualifie « d'homme du passé imprégné de fanatisme ». Par ailleurs, de l'aveu même de M. Ali Erel, président de la chambre de commerce chypriote turque aucune solution ne saurait être trouvée tant que M. Denktash restera en fonctions. Par ailleurs, M. Arif Tahsin, ancien syndicaliste qui fut, en 2000, candidat malheureux à la présidentielle contre M. Denktash, a dernièrement déclaré que « s'il signait, c'était sa fin, car la nouvelle configuration de l'île ne lui laissait aucune place ». Le quotidien turc Hrriyet, dans son édition du 18 décembre 2002, a été encore plus dur à son sujet en précisant dans ses colonnes que « voilà vingt-huit ans que la direction chypriote n'a pu trouver une solution à ce problème. Au lieu de cela, elle a transformé l'île en une machine à laver l'argent sale. (...) Toutes les banques qui ont coulé en 1999 étaient entre les mains de l'entourage de M. Denktash. Chaque mois, de 6 à 7 millions de dollars viennent de Turquie. Sept familles se partagent la manne. Ces gens se nourrissent du système. Pourquoi voudraient-ils en changer ? ». Dans ce dossier, alors que la solution pour sortir de l'impasse est là, proposée par M. Denktash s'obstine, par intérêt personnel, à s'accrocher à un statu quo absurde que voudraient, par ailleurs, voir maintenu, ses réseaux de soutien en Turquie (milieux ultra-nationalistes et certains généraux), l'intervention de l'ONU se heurte, désormais, à ses propres limites. Le « plan Annan » est là, toujours prêt à être négocié plus avant, d'ici au 28 février 2003, date butoir. Désormais, le déblocage ne pourra venir que de la capacité qu'aura l'Union européenne à faire fortement pression sur la Turquie. A ce sujet, elle avait déjà dernièrement interpellé le Gouvernement au sujet de ce brûlant dossier. Les réponses qu'il lui avait données étaient largement insatisfaisantes, car elles laissaient transparaître une diplomatie française particulièrement couarde et cyniquement indifférente face aux difficultés qui la concerne pourtant au premier chef puisque touchant un de ses futurs partenaires, et s'abritant bien volontiers derrière l'excuse facile d'une intervention en conciliation de la part de l'ONU. La solution ne peut être, désormais, que dans un rapport de force politique entre les Etats de l'Union et les autorités turques. Nous sommes arrivés à un tel point que cela ne pourra plus passer que par un ferme ultimatum avec date butoir adressé à Ankara au terme duquel sans acceptation et ratification du « plan Annan » de sa part et de la part des représentants de la communauté chypriote turque, il y aurait un refus clair et définitif d'examiner un éventuelle ouverture future de négociations d'adhésion entre l'Union européenne et la Turquie. De ce fait, elle lui demande si le Gouvernement va donc enfin prendre toutes ses responsabilités et faire preuve de grande détermination et fermeté dans ce dossier.
Réponse publiée le 31 mars 2003
La France a toujours apporté un ferme soutien à un projet de règlement politique de la question chypriote sous l'égide des Nations unies. L'action volontaire du secrétaire général des Nations unies avait conduit les deux parties à reprendre des discussions intensives en janvier 2002, et nous regrettons l'interruption de ces discussions en conclusion de la rencontre de La Haye, le 10 mars dernier. Nous continuons à considérer que le plan proposé par l'ONU représente une base favorable aux intérêts des deux parties comme des puissances garantes (Turquie, Grèce, Royaume-Uni) et nous appellerons les deux communautés à reprendre les discussions dans ce cadre. En confirmation des engagements pris, Chypre signera le 16 avril 2003 le traité d'adhésion à l'Union européenne, malgré l'absence d'un règlement. Les dispositions arrêtées par le Conseil de Copenhague en faveur de la partie nord de l'île restent toutefois d'actualité et permettront de dégager une aide spécifique pour Chypre Nord en cas de règlement politique. De plus, le Conseil avait décidé que dans l'attente d'un règlement, la Commission devrait examiner les moyens permettant d'encourager le développement économique du Nord. Le Conseil européen de décembre dernier, à Copenhague a aussi repoussé à décembre 2004 l'éventualité de l'ouverture de négociations d'adhésion avec la Turquie, estimant que « si, en décembre 2004, le Conseil européen décide, sur la base d'un rapport et d'une recommandation de la commission, que la Turquie satisfait aux critères politiques de Copenhague, l'Union européenne ouvrira sans délai des négociations d'adhésion avec ce pays ». L'Union européenne n'a pas souhaité jusqu'à présent lier l'adhésion de la Turquie au règlement de la question chypriote, cette position ayant été rappelée à plusieurs reprises par la commission, en novembre 2002, ainsi que par le Premier ministre danois, M. Anders Fogh Rasmussen, en sa qualité de président du Conseil européen, en novembre et décembre 2002. Une fois que Chypre aura signé le Traité d'adhésion, et si malgré les efforts de la communauté internationale aucun règlement politique n'était trouvé fin 2004, la question chypriote pèserait toutefois d'un grand poids sur les discussions concernant la demande de la Turquie de voir examiner une éventuelle ouverture des négociations d'adhésion avec l'Union européenne.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Dates :
Question publiée le 27 janvier 2003
Réponse publiée le 31 mars 2003