délégations de service public
Question de :
M. Jean-Marie Sermier
Jura (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Marie Sermier attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la négociation de la durée des délégations de service public. Une délégation de service public est un contrat. Or un contrat est le fruit de la volonté des parties cocontractantes selon le code civil. Un contrat de droit public n'obéit pas tout à fait à la même définition. L'étendue de la négociation peut être prédéfinie par la collectivité locale. Elle peut donc limiter sa propre liberté. Elle peut restreindre la négociation à certains sujets. Cependant, il y a des clauses interdites par la loi donc des clauses non négociables. D'après la loi Sapin de 1993, la seule chose non négociable serait la durée du contrat. L'article L. 1411-2 dispose que : « les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée, celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire ». C'est donc un acte unilatéral non négociable. Cela veut dire que c'est la collectivité qui définit la durée, elle est donc soustraite à la négociation. Or rien n'est dit explicitement par le juge administratif. Dans la pratique, on voit apparaître des durées en forme de fourchette. Ce qui serait impossible, c'est de ne fixer aucun chiffre quant à la durée et de prévoir que la durée serait évolutive. Au Royaume-Uni il est pourtant possible de fixer le contrat en fonction de ses résultats. En vu de l'esprit LOLF et de résultat qui flotte dans l'air du temps, on peut imaginer un mécanisme identique. Or on ne connaît pas d'interprétation jurisprudentielle sur la question. Il lui demande de clarifier le vide juridique concernant la négociation du contrat ainsi que la possibilité d'une durée en fonction des résultats insufflés par la LOLF.
Réponse publiée le 15 mai 2007
La limitation de la durée des délégations de service public est un élément essentiel de ce type de contrats et l'indication de leur durée est un point important qui doit être porté à la connaissance des prestataires éventuels sinon au moment de la publicité préalable du moins lors de la sollicitation des offres (CE, 25 juillet 2001, Syndicat des eaux de l'Iffernet, BJDCP n° 19, p. 530). Elle concourt, en effet, à la réalisation des objectifs principaux que s'est assignés le législateur par la loi du 29 janvier 1993 relative et à la transparence des activités économiques et à la prévention de la corruption. L'obligation d'une durée limitée tend à assurer le renouvellement des contrats de délégation, ce qui ouvre périodiquement aux collectivités publiques la possibilité de procéder, dans l'intérêt général, à une nouvelle consultation afin de sélectionner le prestataire le mieux à même de répondre aux besoins des usagers. Par ailleurs, la remise en jeu systématique des contrats de délégation concourt à prévenir la constitution de « rentes de situation », bloquant l'égal et libre accès à la commande publique. La détermination de la durée de la délégation incombe aux collectivités publiques, lesquelles doivent prendre en compte les prestations demandées au délégataire et, s'agissant de concessions, la nature et la durée normale d'amortissement des investissements à réaliser, conformément aux dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Si la durée n'est pas expressément visée par l'article R. 1411-1 du CGCT aux termes duquel l'objet et la nature de la convention sont au nombre des caractéristiques essentielles de la convention qui doivent être précisées dans la publicité, elle doit être comptée parmi celles-ci. Il a ainsi été jugé que son omission révélait un manquement aux obligations de publicité entachant la procédure de passation du contrat, (CE, 28 mai 2003, Assistance publique, BJDCP n° 30, p. 388). Aux termes de la décision susvisée, si la durée n'est pas préfixée, la publicité doit indiquer les conditions dans lesquelles la collectivité délégante appréciera les offres au regard de la durée de contrat qu'elles proposent ; la fixation de la durée du contrat peut donc être un élément de la négociation du contrat avec le délégataire pressenti comme le relevait le commissaire du gouvernement Denis Piveteau dans ses conclusions, on peut « imaginer que la durée d'une délégation de service public fasse partie des paramètres mobiles d'un appel d'offres, permettant d'envisager plusieurs scénarios, et venant s'articuler avec différents niveaux d'engagements consentis par les concurrents ». Au demeurant, la collectivité publique dispose d'une certaine marge d'appréciation pour établir la durée du contrat dans chaque cas d'espèce, eu égard à la multiplicité des modes de calcul d'amortissement ainsi qu'à la diversité et à la complexité des installations susceptibles d'être concernées (Conseil constitutionnel, 20 janvier 1993, n° 92-316 DC, recueil p. 14). Pour autant, si les textes et la jurisprudence n'imposent pas une durée préfixe, ils ne permettent nullement d'envisager la compatibilité avec le dispositif de la loi du 29 janvier 1993, d'une durée de contrat de délégation de service publique révisable dans le cadre de l'exécution normale du contrat. Les conditions de prolongation de la durée initiale du contrat sont d'ailleurs étroitement encadrées par l'article L. 1411-2 du CGCT qui l'autorise pour des motifs d'intérêt général pour une durée maximale de un an ou pour la réalisation d'investissements matériels non prévus au contrat initial. Un aménagement de la loi du 29 janvier 1993 semblerait donc nécessaire pour en modifier l'économie dans le sens évoqué par la question.
Auteur : M. Jean-Marie Sermier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Dates :
Question publiée le 27 mars 2007
Réponse publiée le 15 mai 2007