Internet
Question de :
M. Louis Cosyns
Cher (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Louis Cosyns appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question de la responsabilité des hébergeurs et administrateurs de forums de discussion. Le 20 mai 2002 et le 18 juillet 2002, les forums de discussion français ont tous fermé leurs portes afin d'alerter les pouvoirs publics sur les conséquences des décisions actuelles des tribunaux à l'égard des forums de discussion. La loi du 1er août 2000 a permis d'immuniser les hébergeurs physiques, les simples prestataires techniques pour l'ensemble des propos tenus sur les sites qu'ils hébergent (pages Internet, et a fortiori les forums). D'autres décisions ont condamné des internautes identifiés pour avoir diffusé des propos diffamatoires ou infamants sur des forums de discussion. Depuis le début de l'année 2002, plusieurs juges français ont retenu la responsabilité des créateurs de forums de discussion à la suite de la diffusion par des internautes de messages diffamatoires ou injurieux. Ces solutions tendent à faire peser sur les administrateurs des espaces de discussion des obligations importantes et humainement impossibles en termes de vérification de l'ensemble des messages diffusés. Afin de prévenir la multiplication des litiges et la disparition de cet espace d'expression, il lui demande de lui indiquer quelles mesures il entend prendre afin de garantir la pérennité des forums de discussion, tout en assurant à chacun la défense de ses droits, en particulier celui à ne pas être diffamé.
Réponse publiée le 18 novembre 2002
L'honorable parlementaire pose la question de l'équilibre nécessaire qui doit être trouvé entre la liberté d'expression qui doit être garantie et ses abus qui peuvent être constitués par des actes de diffamation ou d'atteintes à l'intimité de la vie privée qui doivent être sanctionnés. Le garde des sceaux rappelle à l'honorable parlementaire qu'en matière de responsabilité pénale, il est admis que la responsabilité des messages accessibles sur Internet est d'abord celle de leurs auteurs. A ce titre, les articles 43-9 et 43-10 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 1er août 2000 imposent aux professionnels d'Internet des obligations d'identification ou de transparence permettant d'identifier toute personne ayant contribué à la création d'un contenu d'un service Internet. Par ailleurs, la loi du 1er août 2000 a établi l'irresponsabilité des fournisseurs d'accès, dans la mesure où ils n'ont pas la maîtrise du contenu des messages dont ils assurent la transmission. En outre, l'article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 1er août 2000 a prévu une responsabilité pénale limitée pour les hébergeurs. En effet, la responsabilité pénale des personnes physiques, en raison du contenu des sites dont elles assurent le stockage, ne peut être recherchée que si, ayant été saisies par une autorité judiciaire, elles n'ont pas agi promptement pour empêcher l'accès à ce contenu. Enfin, si le corpus jurisprudentiel permettant d'assimiler le responsable d'un forum de discussion à un hébergeur de site est encore limité, le garde des sceaux entend faire savoir à l'honorable parlementaire que plusieurs juridictions, dont le tribunal de grande instance de Paris, statuant en référé, ont admis qu'une société qui avait mis en place un forum de discussion sur le site qu'elle éditait devait être considérée comme assurant le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public, au sens de l'article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. Au-delà de ces décisions, il appartiendra à la jurisprudence à venir de dire si un responsable d'un forum de discussion doit, en cas d'infractions pénales à la loi du 29 juillet 1881 commises dans le cadre de ce dernier, être poursuivi suivant les règles de la responsabilité pénale de droit commun, ou suivant les règles de la responsabilité pénale atténuée déjà prévue pour les responsables des sites hébergeurs.
Auteur : M. Louis Cosyns
Type de question : Question écrite
Rubrique : Télécommunications
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 5 août 2002
Réponse publiée le 18 novembre 2002