élargissement
Question de :
M. Hervé de Charette
Maine-et-Loire (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Hervé de Charette appelle l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur l'influence exercée actuellement par les Etats-Unis auprès des pays d'Europe centrale et orientale (PECO) en ce qui concerne leurs marchés d'armement militaire. Les Américains développent une activité diplomatique et économique intense au moment où les pays de cette zone, soit qu'ils soient membres de l'OTAN, soit qu'ils aspirent à le devenir, vont devoir procéder au renouvellement de leurs équipements militaires. Ainsi, la Pologne doit, l'année prochaine, commencer à remplacer ses MIG-21 soviétiques par des avions de combat qui correspondent aux standards de l'OTAN. Dans cette perspective, des entreprises européennes telles que le suédo-britannique SAAB-BAE Systems ou le français Dassault doivent faire face à la concurrence des fabricants américains. L'enjeu est d'autant plus grand que le contrôle du marché polonais par les Etats-Unis constituerait un signal fort pour les autres pays d'Europe centrale et Orientale. Au-delà du respect des règles du marché, cette situation n'est pas sans susciter certaines interrogations sur la construction européenne et son futur élargissement aux Etats de cette zone. L'intégration des pays de l'ancien bloc de l'Est constitue un projet ambitieux. Il s'appuie sur une contrainte financière importante qui sera supportée par les membres actuels de l'Union. Cet effort répond au projet d'une Europe pacifiée qui entend établir une coopération politique, économique et sociale équilibrée entre ses membres. Dès lors, il est préoccupant de constater que la dimension communautaire ne soit pas davantage prise en considération en ce qui concerne les questions militaires et le domaine de l'armement dès lors que la sécurité et la défense sont partie intégrante du projet politique de l'Union européenne. Il souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement sur cette question et savoir quelles sont les initiatives que la France entend conduire pour promouvoir et défendre les intérêts économiques, politiques et stratégiques de l'Europe, dans la perspective de son élargissement.
Réponse publiée le 23 septembre 2002
L'Europe de l'armement progresse. Les premières réalisations ont été le fait des industriels du secteur de la défense, soucieux de mettre en place des groupes d'une taille suffisante pour affronter la concurrence mondiale (EADS, MBDA). Parallèlement, la réalisation de programmes d'armement regroupant plusieurs Etats européens (avion de transport A400M, missiles Scalp/Storm Shadow et Meteor, hélicoptère NH-90...) a permis de concrétiser les engagements en faveur d'une coopération industrielle, mais aussi politique et opérationnelle. Du point de vue institutionnel, la coopération s'est tout d'abord engagée en bilatéral, puis selon des formules ad hoc. La définition d'une politique de l'armement unique au niveau européen reste un projet ambitieux et sensible, qui devra concilier les intérêts industriels mais aussi les exigences politiques et stratégiques des Etats. De multiples initiatives reflètent la volonté d'un certain nombre d'acteurs européens de favoriser la coopération armement (Groupe armement de l'Union de l'Europe occidentale, Organisation armement de l'Union de l'Europe occidentale), des travaux ont lieu dans les enceintes de coopération militaire (conférence des directeurs nationaux de l'armement à l'OTAN), des forums (processus LoI) et des organismes (OCCAR) se sont mis en place. La France participe activement à ces initiatives, qu'elle a souvent contribué à lancer. La constitution de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR), à partir d'un projet franco-allemand, a marqué une étape supplémentaire dans l'intégration de certains services d'acquisition. L'OCCAR regroupe quatre pays (Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni), pour un nombre certes restreint de programmes, mais suscite l'enthousiasme de plusieurs partenaires européens qui ont manifesté leur désir d'y adhérer (Belgique, Espagne, Pays-Bas). Avec le processus dit de la LoI (letter of intent) lancé en 1998, une initiative structurante pour le marché de l'armement est intervenue. La signature en juillet 2000 de l'accord-cadre de Farnborough relatif aux mesures visant à faciliter les restructurations et le fonctionnement de l'industrie européenne de défense en a été une première concrétisation. L'ampleur du processus enclenché est certes novatrice et prometteuse, mais l'exercice reste limité à six pays, les principaux producteurs d'armement du continent (Allemagne, France, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Suède). La France et l'Allemagne se sont engagées lors du sommet de Schwerin (30 juillet 2002) à faire des propositions visant à articuler les exercices OCCAR et LoI, pour plus de cohérence. Toutes ces initiatives contribuent à nourrir la réflexion sur la nécessité d'une coordination plus étroite et d'une harmonisation sur le long terme de nos objectifs en matière d'armement, mais le paysage institutionnel n'a pas beaucoup évolué. Un groupe ad hoc du Conseil de l'Union sur la politique d'armement avait été créé dès juillet 1995. « Polarm » est chargé de faire des recommandations en vue de mettre en place une politique en matière d'armement dans le cadre communautaire. Polarm n'a pas été en mesure à ce jour de formuler de recommandations concrètes, notamment en raison des divergences d'intérêt entre les pays producteurs d'armement qui souhaitent l'émergence d'un véritable marché européen et les pays acheteurs qui craigent de se voir imposer une préférence européenne remettant en cause leurs liens avec les Etats-Unis. L'avenir de cette structure sera l'objet d'un débat au cours de l'automne 2002. La constitution de l'Europe de l'armement est étroitement liée à la construction de l'Europe de la défense. L'armement est un moyen au service des politiques de sécurité et de défense. Le développement d'une politique européenne de l'armement reposera sur l'harmonisation des besoins et sur une convergence des programmations militaires. Les progrès enregistrés par la politique européenne de sécurité et de défense depuis le Conseil européen d'Helsinki relancent le débat au sujet de l'européanisation de la coopération en matière d'armement, notamment par le biais du processus destiné à doter l'Union européenne des capacités nécessaires pour mener à bien les missions de Petersberg. A la faveur du processus capacitaire, un regain d'intérêt pour la coopération s'est fait sentir. Par exemple, depuis novembre 2001, les directeurs nationaux de l'armement des Quinze se réunissent tous les six mois, afin de réfléchir ensemble au rôle qu'ils pourraient jouer pour renforcer la coopération européenne dans la perspective de l'amélioration des capacités de l'Union. A ce titre, dans le cadre des travaux de la Convention européenne, le groupe Défense a pour mandat de chercher les moyens pour « assurer une plus grande efficacité et une économie d'échelle dans l'acquisition, la recherche et le développement des armements ». La France entend jouer un rôle actif dans cette perspective et prépare sur ces sujets une contribution substantielle.
Auteur : M. Hervé de Charette
Type de question : Question écrite
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Dates :
Question publiée le 5 août 2002
Réponse publiée le 23 septembre 2002