Question écrite n° 16279 :
brevets

12e Législature

Question de : M. Pierre Morange
Yvelines (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Pierre Morange attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur la question du maintien de la traduction en français des brevets européens. Le gouvernement de M. Lionel Jospin a, en juin 2001, signé le protocole dit de Londres modifiant le régime linguistique de la convention sur le brevet européen. Ce protocole, en supprimant l'obligation de rédaction d'un brevet dans la langue du pays dans lequel il est déposé, consacre ni plus ni moins la suprématie linguistique du monde anglo-saxon. S'il est vrai que les coûts de traduction - très logiquement supportés par le propriétaire du brevet - représentent une part conséquente du coût total du dépôt de celui-ci, le risque n'en est pas moins là d'un grave recul de l'usage du français sur notre territoire même, principalement dans le domaine scientifique. Outre qu'il n'est pas clairement démontré que le système européen est plus coûteux que le système américain, il serait difficilement compréhensible de faire supporter par les entreprises ou les contribuables français - qui n'ont pas un accès direct à la langue anglaise - les frais de traduction des brevets européens non francophones. Par conséquent, si ce protocole venait à être ratifié, il y aurait lieu de s'inquiéter autant pour l'avenir du français que pour le maintien de la diversité culturelle, tant il est vrai qu'une langue qui ne peut plus porter d'innovations technologiques est une langue en voie de dépérissement. Aussi, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière.

Réponse publiée le 16 mai 2006

Le protocole de Londres, signé par la France en juin 2001, résulte d'une initiative française ayant pour objectif de réduire le coût d'obtention des brevets européens tout en renforçant la position de la langue française dans le domaine des brevets d'invention. Face à certains pays européens qui seraient favorables à un brevet déposé uniquement en anglais, la France s'attache en effet résolument à conforter le trilinguisme en vigueur à l'Office européen des brevets (OEB). Pour tout brevet européen, les revendications, qui forment la partie essentielle du brevet, celle créatrice de droits, doivent être traduites dans les trois langues officielles de l'OEB, dont le français, et ce quelle que soit la langue de dépôt utilisée et quels que soient les pays visés par la demande. Cette obligation serait maintenue par les dispositions du protocole de Londres. Nos entreprises pourraient donc continuer à assurer en français leur veille concurrentielle sur les brevets déposés. Suivant les termes de cet accord, un brevet déposé en français à l'OEB serait créateur de droits dans les pays européens anglophones ou germanophones signataires sans qu'il soit besoin de traduire en anglais ou en allemand la description de l'invention, partie informative du brevet. La traduction de la description de l'invention intervient à l'issue de la délivrance du brevet, plusieurs années après la publication de la demande, et est donc de peu d'utilité pour la veille technologique des entreprises. Elle est bien évidemment indispensable en cas de contentieux. Le protocole de Londres maintient explicitement dans ce cas l'obligation de traduction à la charge du titulaire du brevet. Les principaux acteurs économiques, entreprises (petites et moyennes entreprises incluses) et inventeurs indépendants, ont, par l'intermédiaire de leurs confédérations professionnelles, appelé à une ratification du protocole de Londres. Le Gouvernement est soucieux d'envisager toute évolution du droit des brevets avec la volonté d'améliorer la compétitivité de nos entreprises, tout en veillant au maintien de la place de la langue française. Il entend intégrer l'ensemble des dimensions de la question avant de retenir les voies les mieux adaptées pour rendre le système de brevets en Europe plus efficace au service de l'innovation. À l'issue du comité interministériel sur l'Europe du 13 mars dernier, le Premier ministre a chargé M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, et M. Pierre Lequiller, président de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, de conduire une réflexion sur l'avenir du brevet en Europe, en examinant à la fois les voies de réforme du brevet européen institué par la convention de Munich du 5 octobre 1973 et le projet de brevet communautaire.

Données clés

Auteur : M. Pierre Morange

Type de question : Question écrite

Rubrique : Propriété intellectuelle

Ministère interrogé : industrie

Ministère répondant : industrie

Dates :
Question publiée le 14 avril 2003
Réponse publiée le 16 mai 2006

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