environnement
Question de :
M. Jean-Pierre Balligand
Aisne (3e circonscription) - Socialiste
M. Jean-Pierre Balligand appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur les conclusions du troisième Forum mondial de l'eau qui vient de se tenir à Kyoto. Il semble en effet que la déclaration commune adoptée à cette occasion ne prévoit pas d'avancée notable, que ce soit dans la reconnaissance de l'accès à l'eau potable comme un droit fondamental ou dans la fixation de moyens financiers et institutionnels précis pour les Etats cosignataires. Il lui souhaiterait que lui soit précisée la position défendue par la France à l'occasion de ce forum et les réflexions que les résultats atteints lui inspirent.
Réponse publiée le 18 août 2003
La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative au troisième forum mondial de l'eau à Kyoto, notamment à la position défendue par la France et aux réflexions que peuvent inspirer les résultats obtenus. Le troisième forum mondial de l'eau a tenu ses promesses et a connu une grande affluence : 350 sessions organisées dans trois lieux (Kyoto, Shiga et Osaka) autour de 33 thèmes, 10 000 participants provenant de 165 pays et de tous les horizons (gestionnaires de l'eau, chercheurs, entreprises, organisations non gouvernementales, organisations internationales, gouvernements...). Cinq journées régionales ont eu lieu, dont une sur l'Europe, le 21 mars. De nombreux participants ont salué la qualité des sessions et des débats ainsi que l'excellente organisation matérielle de l'ensemble. La déclaration ministérielle a été adoptée par 101 ministres en charge de l'eau. Des formes originales d'échanges ont été utilisées, comme le dialogue entre les participants au forum et les ministres. Des réunions thématiques se sont déroulées pendant la session ministérielle sur cinq thèmes, permettant ainsi à de nombreux participants de s'exprimer. Les rapports ont ensuite été présentés en réunion plénière. Par ailleurs, un « portefeuille d'actions dans le domaine de l'eau » a été lancé sur Internet par le Japon, qui recense les projets « exemplaires » dans le secteur de l'eau. De plus, une exposition intitulée « l'esprit de l'eau » a été co-organisée par la France et le Japon, accompagnée d'une publication et d'ateliers-débats dans le cadre du forum. Le Japon avait choisi de donner une place particulière à la France : intervention du Président de la République en ouverture du forum (par vidéo) ; intervention de la ministre de l'écologie et du développement durable en séance plénière de la réunion ministérielle. Kyoto est une première étape après Johannesbourg. Le G8 d'Evian constitue l'étape suivante, au cours de laquelle un plan d'action sur l'eau a été adopté par les chefs d'Etat et de gouvernement. Dans le cadre du forum, la présence de la France a été fortement marquée sur plusieurs sujets : eau et diversité culturelle (académie de l'eau), la gestion intégrée par bassin et les eaux partagées (office international de l'eau et réseau international des organismes de bassin), le financement solidaire de l'assainissement (programme solidarité eau), les multipartenariats (agence française de développement) ainsi que l'évaluation et le suivi (agence Seine-Normandie). De plus, un stand commun des acteurs de l'eau au sein du stand francophone, principalement animé par le programme solidarité eau a bien fonctionné comme pôle de rassemblement et a permis une multitude de rencontres informelles. En ce qui concerne le texte de la déclaration issue de la conférence ministérielle, les points suivants méritent d'être signalés. Sur le financement : la déclaration « prend note » du rapport présenté par le groupe d'experts présidé par M. Camdessus. La session de présentation du rapport a été vivement contestée par des militants opposés à la privatisation. Il faudra examiner le rapport en tenant compte des observations émises lors du forum. Sur la gouvernance : à partir du projet de charte présenté par la ministre de l'écologie et du développement durable à Johannesbourg, l'idée d'un « guide de bonnes pratiques » en matière de gouvernance, notamment au plan européen, avait été avancée. La nécessité d'une bonne gouvernance est mentionnée sans qu'il soit fait référence à un document particulier mais il est indiqué que la gestion décentralisée (rôle des collectivités locales) est un besoin. De plus, la participation des acteurs est clairement identifiée comme une priorité. Sur la gestion des ressources : plusieurs références sont faites à la notion de gestion par la demande et, plus généralement, à l'efficacité de la gestion. Sur les fleuves transfrontaliers : la coopération entre pays partageant des ressources frontalières et/ou transfrontalières est encouragée. Aucune référence à ce sujet n'avait été possible à Johannesbourg mais plusieurs pays (Inde, Turquie, Égypte, Chine) ont rappelé leur forte opposition. Sur la notion d'observatoire : celle-ci n'est pas explicitement reconnue mais la déclaration insiste sur la nécessité de collecter des données en associant tous les partenaires. L'idée de « structure » internationale recueillant les données heurte la sensibilité de certains pays qui considèrent que cela constitue une atteinte à leur souveraineté nationale. Sur la prévention des crues : la coopération sur le sujet (échanges entre scientifiques) est encouragée afin de réduire la vulnérabilité et améliorer la prévision. Sur tous ces sujets, il convient de poursuivre les efforts et continuer à faire progresser les idées de la France dans les enceintes internationales. L'initiative pour l'eau de l'Union européenne, annoncée à Johannesbourg, a été confirmée et la Commission européenne a rappelé la nécessité de faire porter en priorité les efforts pour améliorer la situation en Afrique. Parmi les idées qui sont de plus en plus présentes, dans le discours des organisations non gouvernementales mais aussi de certains pays en développement, figure la reconnaissance de l'accès à l'eau comme droit de l'homme. Cette question est liée à la notion de « bien public mondial » et à l'instauration d'une taxation au niveau mondial ou de prélèvements en vue de financer les investissements nécessaires. Par ailleurs, l'UNESCO a annoncé la création prochaine d'un organe international d'arbitrage des conflits pouvant naître de la gestion de bassins partagés. Un contact avec l'UNESCO sur ce point serait utile. Le troisième forum mondial de l'eau s'est déroulé au moment du déclenchement de la guerre en Irak, période peu favorable à des avancées importantes dans les négociations internationales. Cette situation a nettement affecté l'impact médiatique du forum. Celui-ci a cependant contribué à renforcer la prise de conscience de la nécessité de mieux gérer les ressources en eau, tant au plan quantitatif (économies nécessaires dans de nombreuses régions) que qualitatif (développement de l'assainissement).
Auteur : M. Jean-Pierre Balligand
Type de question : Question écrite
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : écologie
Ministère répondant : écologie
Dates :
Question publiée le 14 avril 2003
Réponse publiée le 18 août 2003