Question écrite n° 16725 :
convention sur l'interdiction des mines antipersonnel

12e Législature

Question de : M. Pierre Morange
Yvelines (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Pierre Morange attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la question du déminage et de l'assistance aux victimes des mines antipersonnel. En 1992, six organisations non gouvernementales ont lancé une campagne internationale pour l'interdiction des mines (ICBL) qui regroupe aujourd'hui plus de 1400 organisations originaires de 91 pays. Une formidable mobilisation est donc en marche ; elle a été récompensée en 1997 par le prix Nobel de la paix et a contribué à la signature par 146 Etats de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. En tant qu'Etat partie à cette convention - dite d'Ottawa -, la France a créé une Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel (CNEMA) et s'attache à ne pas relâcher une action qui se doit d'être permanente. Plus généralement, le Gouvernement a adossé - avec force - sa diplomatie à la logique du désarmement et à celle de la coopération internationale et du développement. Il lui demande par conséquent quelles mesures il entend prendre et quelle stratégie il compte adopter aux fins de poursuivre cet effort répondant à la volonté résolue de la France de participer toujours plus activement à la sécurité internationale.

Réponse publiée le 2 juin 2003

La France, qui a joué un rôle actif dans la négociation de la convention d'Ottawa sur l'interdiction totale des mines antipersonnel, s'est toujours résolument engagée sur l'ensemble des questions relatives à la mise en oeuvre de ce traité. S'agissant du volet, désormais prioritaire, de l'assistance aux victimes des mines antipersonnel, qui constitue un des éléments centraux de la lutte contre ce fléau, la convention d'Ottawa (article 6, paragraphe 3) prévoit que « chaque Etat partie qui est en mesure de le faire fournira une assistance pour les soins aux victimes, pour leur réadaptation et pour leur réintégration sociale et économique ainsi que pour des programmes de sensibilisation aux dangers des mines ». Il convient de noter que cette disposition comporte tout au plus une obligation de moyens (et non de résultats) entre les Etats parties, en leur laissant une large marge d'appréciation, sans créer un droit que pourrait faire valoir directement une victime des mines antipersonnel. Investie de nouvelles responsabilités sur ce volet, dans le cadre du processus de suivi de la convention d'Ottawa, et consciente de l'ampleur des besoins dans ce domaine, la France a rempli ses obligations à ce titre, à la fois par sa participation active aux travaux consacrés à cette problématique (dans le cadre des réunions intersessionnelles de Genève) et par les efforts financiers soutenus qu'elle consent dans ce domaine. La France copréside, avec la Colombie, jusqu'en septembre 2003, le comité permanent sur l'assistance aux victimes des mines antipersonnel. Depuis 2001, le souci de celui-ci a été d'aider les Etats à remplir leurs obligations découlant de l'article 6, paragraphe 3, de la convention d'Ottawa. A cette fin, un processus de consultation a été lancé, sous l'égide du Service d'action contre les mines des Nations unies (UNMAS), afin d'évaluer les progrès concrets réalisés dans ce domaine et les difficultés à surmonter, d'ici à la première conférence d'examen du Traité d'interdiction totale des mines antipersonnel qui se tiendra en 2004. Selon l'« Observatoire des mines », le rapport annuel des chercheurs de la campagne pour l'interdiction totale des mines antipersonnel (ICBL-prix Nobel de la paix 1997), moins de 20 % des ressources consacrées par la communauté internationale à l'action contre les mines seraient alloués à des programmes d'aide aux victimes. Par ailleurs, aujourd'hui, plus de 40 Etats parties à la convention d'Ottawa semblent manquer des moyens nécessaires pour pourvoir aux besoins des victimes de mines antipersonnel en matière de soins, de réadaptation ou de réintégration sociale et économique. Les difficultés sont d'autant plus importantes que souvent les pays qui comptent le plus grand nombre de victimes comptent aussi parmi les plus pauvres. C'est sur la base de ces travaux que la France s'est engagée, avec la Colombie, dans une action volontariste visant à permettre une meilleure adéquation entre les besoins et les priorités exprimés par les pays « victimes », d'une part, et les politiques des bailleurs de fonds, de l'autre. Pour tous, l'objectif est de privilégier une approche pragmatique, qui tienne compte des réalités du terrain. C'est précisément la conception défendue par la France : celle d'une participation accrue des pays « victimes » et d'un renforcement à terme de leurs capacités locales et régionales à mette en oeuvre leurs obligations au titre de la convention d'Ottawa. L'engagement de la France se traduit de manière concrète par un soutien financier aux nombreux programmes d'aide aux victimes. S'agissant de la coopération bilatérale, la France a accordé à l'action contre les mines dans son ensemble près de 3,8 millions d'euros, pour la part chiffrable, sur la période 2001-2002. La coprésidence du comité permanent consacré à l'aide aux victimes s'est plus particulièrement accompagnée, depuis septembre 2002, d'un accroissement substantiel de ses efforts, comme en témoignent le lancement de deux fonds de solidarité prioritaire (FSP) nationaux, spécifiquement destinés à des programmes de déminage humanitaire au Mozambique (1,17 million d'euros) et en Angola (3 millions d'euros) ainsi que la décision de reconduire, en 2004, le projet d'intérêt général « Déminage humanitaire » de 3 millions d'euros approuvé sur financement FSP en décembre 1999 et opérationnel depuis trois ans. Au plan multilatéral, même s'il est parfois difficile de déterminer la part précise allouée à l'assistance aux victimes des mines antipersonnel, les contributions de la France aux organisation internationales ou régionales compétentes dans ce domaine méritent d'être soulignées. Pour 2002, celles-ci ont été les suivantes : PNUD (responsabilité en matière de déminage) - 17 millions d'euros. Unicef (prévention, sensibilisation) - 7,5 millions d'euros. OMS (soins et réhabilitation des victimes) - plus de 30 millions d'euros. CICR (sensibilisation, aide aux victimes) : 4,7 millions d'euros. Il convient également de signaler la participation de la France au budget de l'Union européenne, qui est de 17,1 % et de rappeler que les fonds affectés par la Commission européenne à l'action contre les mines antipersonnel se sont élevés à plus de 28 millions d'euros en 2001, son programme pluriannuel 2002-2004 prévoyant une enveloppe de 110 millions d'euros. Au total, la France a pris toute sa part des efforts visant à promouvoir la mise en oeuvre des dispositions de la convention d'Ottawa, relatives à l'assistance aux victimes des mines antipersonnel, et entend continuer à le faire. Au plan national, le maintien de cette contribution exemplaire passe par une coordination renforcée entre les actions des différents acteurs français du déminage humanitaire. L'ambassadeur itinérant chargé de l'action pour le déminage et l'assistance aux victimes et la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel (CNEMA) a un rôle de catalyseur important à jouer à cet égard. Cette instance, rassemblant tous ceux qui, en France, participent à la lutte contre les mines antipersonnel, a au coeur de sa mission le suivi de l'action internationale de la France en matière d'assistance aux victimes et d'aide au déminage. Au cours de ses travaux, notamment dans le cadre de l'élaboration de son rapport annuel au gouvernement et au Parlement, les questions relatives notamment à la prise en charge effective des victimes par les Etats sont régulièrement traitées. Le Gouvernement français, qui y participe, suit avec beaucoup d'attention la réflexion menée dans cette enceinte, y compris s'agissant de la création d'un mécanisme international spécifique (fonds) de reconnaissance des droits individuels des victimes, dont les conséquences doivent être soigneusement pesées, à la fois en termes d'universalisation et de répartition des ressources disponibles pour le déminage humanitaire. A l'approche de la conférence d'examen de 2004, l'objectif de tous doit être de favoriser une meilleure application de la convention d'Ottawa. Face à l'ampleur des défis communs (universalisation du Traité d'interdiction des mines antipersonnel et élimination totale de ces armes), c'est dans cette démarche, et non dans une renégociation aléatoire des piliers de cet instrument, que s'inscrit l'engagement de la France pour l'assistance aux victimes comme sur l'ensemble des questions relatives à l'élimination de ce fléau.

Données clés

Auteur : M. Pierre Morange

Type de question : Question écrite

Rubrique : Traités et conventions

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 14 avril 2003
Réponse publiée le 2 juin 2003

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