Question écrite n° 17696 :
langues et cultures régionales

12e Législature

Question de : Mme Marguerite Lamour
Finistère (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Marguerite Lamour appelle l'attention de M. le Premier ministre sur l'absence de ratification par la France de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Cette charte, qui est une convention du Conseil de l'Europe, a été adoptée par le comité des ministres du Conseil de l'Europe en juin 1992. Le 7 mai 1999, la France a signé cette charte, en ne retenant que trente-neuf dispositions sur quatre-vingt-quinze et en l'assortissant de clauses interprétatives. Le 20 mai 1999, le Président de la République a saisi le Conseil constitutionnel qui a estimé, dans la décision n° 99-412 DC du 15 juin 1999, que la charte comportait des clauses contraires à la Constitution. La seule voie possible à une ratification passe donc par une révision de la Constitution. Le Président de la République, le 2 février 2003, lors des rencontres internationales de la culture, a souhaité l'adoption d'une convention mondiale sur la diversité culturelle qui « proclamerait l'égale dignité de toutes les cultures. Elle devrait concrétiser les droits et les devoirs des États, à savoir le respect du pluralisme linguistique et la mobilisation pour enrayer la disparition des langues dans le monde ». Elle souhaiterait connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour mettre en oeuvre les souhaits du Président de la République ; la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires permettrait de réaliser les voeux présidentiels en la matière, et elle aimerait savoir si, une fois la ratification réalisée, le conseil régional, dans le cadre de la décentralisation, pourrait revendiquer les compétences et les moyens d'une politique de sauvegarde des langues parlées sur son territoire.

Réponse publiée le 18 août 2003

L'honorable parlementaire a appelé l'attention du Premier ministre sur l'absence de ratification par la France de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Comme elle l'a souligné, le Président de la République, peu après la signature de la charte, a saisi le Conseil constitutionnel, sur le fondement de l'article 54 de la Constitution, de la question de savoir si sa ratification devait être précédée, compte tenu de la déclaration interprétative faite par la France et des engagements qu'elle entendait souscrire au titre de la partie III de cette convention, d'une révision de la Constitution. Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 99-412 DC du 15 juin 1999, a considéré que les dispositions de la charte étaient contraires à la Constitution à un double titre. D'une part, « en ce qu'elle confère des droits spécifiques à des "groupes de locuteurs de langues régionales ou minoritaires, à l'intérieur de "territoires dans lesquels ces langues sont pratiquées, (la charte) porte atteinte aux principes constitutionnels d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du peuple français ». D'autre part, ses dispositions « sont également contraires au premier alinéa de l'article 2 de la Constitution en ce qu'elles tendent à reconnaître un droit à pratiquer une langue autre que le français non seulement dans "la vie privée, mais également dans "la vie publique, à laquelle la Charte rattache la justice et les autorités administratives et services publics ». La ratification de la charte supposerait, dès lors, une révision préalable de la Constitution ; eu égard aux motifs qui ont conduit le Conseil constitutionnel à se prononcer en ce sens, une telle révision, qui remettrait en cause certains des principes fondamentaux de nos institutions, n'est pas envisagée. Pour autant, la promotion des langues régionales constitue un objectif important pour le Gouvernement. C'est ainsi que leur enseignement doit pouvoir être proposé au plus grand nombre d'élèves volontaires : un peu plus de 250 000 élèves de l'enseignement secondaire suivent des cours de cette nature. Par ailleurs, une place accrue a été faite aux langues régionales dans l'enseignement supérieur comme dans le service public de l'audiovisuel. Plus largement, le respect et la promotion de la diversité culturelle sont bien une priorité pour l'action de la France au sein des instances internationales compétentes ; l'adoption d'une convention mondiale sur la diversité culturelle, telle qu'elle a été évoquée par le chef de l'État le 2 février 2003, en constitue l'un des objectifs. Cette convention doit tendre à la reconnaissance de la spécificité des biens et services culturels, et du droit des gouvernements à adopter ou à maintenir les mesures qu'ils jugent appropriées à la préservation de leur patrimoine culturel et au développement de leurs expressions culturelles et linguistiques. Sur le plan national, les régions peuvent déjà, dans le cadre de leurs compétences, développer une politique culturelle prenant en compte leur patrimoine linguistique, dans le respect des règles constitutionnelles et législatives qui protègent le français, langue de la République.

Données clés

Auteur : Mme Marguerite Lamour

Type de question : Question écrite

Rubrique : Culture

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Dates :
Question publiée le 5 mai 2003
Réponse publiée le 18 août 2003

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