pays en voie de développement
Question de :
M. Jacques Domergue
Hérault (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques Domergue attire l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur l'épidémie de sida dans le monde. De nombreux spécialistes sont très inquiets de l'absence de contrôle de l'épidémie de sida dans le monde. Le sida cause la mort de millions d'adultes jeunes et d'enfants et a un profond impact négatif sur l'économie de beaucoup de pays en voie de développement. La recherche médicale et l'évolution de traitements antiviraux peuvent apporter des solutions efficaces à condition de recevoir le soutien politique et financier adéquat. Il est absolument nécessaire de traiter correctement les patients infectés par le VIH dans les pays en voie de développement, mais plusieurs conditions doivent être remplies. Certes, un faible coût des traitements antiviraux est essentiel. Le fonds global lancé récemment par les Nations unies et soutenu par les pays du G 8 et d'autres pays peut contribuer d'une manière significative à rendre accessibles les traitements antiviraux aux pays de faible ressource et dont les demandes ont été acceptées par les instances du fonds. Cependant, il s'agit d'une condition nécessaire mais non suffisante pour avoir un impact sur l'évolution de l'épidémie. Nous savons aujourd'hui que le « cocktail » de médicaments antirétroviraux ne guérit pas la maladie, qu'il peut être toxique et qu'il doit être donné chaque jour. Si le patient n'a pas une stricte adhésion au régime complexe du traitement, la multiplication du virus n'est pas contrôlée et les bénéfices du traitement sont perdus. Du fait du manque d'observance et d'autres facteurs ajoutés, plus de 30 % des patients en Europe et aux États-Unis sont maintenant devenus résistants aux médicaments antirétroviraux actuellement couramment utilisés. Si des programmes de traitement sont implantés dans les pays du Sud, en suivant ce modèle utilisé en Europe et aux États-Unis, le risque d'apparition de résistances à des mutations du virus risque encore d'être plus lourd du fait que les patients aux ressources très limitées ne pourront faire l'effort d'un traitement à vie. Le danger que l'on peut prévoir est qu'une introduction prématurément vaste des médicaments antirétroviraux, avant que soit validée la meilleure formule d'utilisation adaptée aux conditions locales, puisse conduire à une seconde épidémie causée par des virus résistant à ces médicaments. Il est également important de réaliser que dans beaucoup de pays en voie de développement, ces tests sont chers et demandent des infrastructures spécialisées avec du personnel qualifié. Il y a également un important obstacle culturel à surmonter : le sida est encore une maladie stigmatisante en Afrique et en Asie. Les personnes reconnues comme VIH positives peuvent être rejetées par leur famille, leur communauté, perdre leur emploi, parfois même être tuées. Parmi les 30 millions de personnes dont Onusida estime qu'elles sont infectées par le VIH en Afrique, seule une minorité sait et veut savoir qu'elle est infectée. Il est donc absolument nécessaire de soutenir une recherche opérationnelle de façon à définir les meilleures formules thérapeutiques acceptables par tous. C'est pourquoi les solutions suivantes ont été envisagées, notamment par des professeurs français. Première étape, aider les gouvernements des pays les plus touchés par le sida à créer dans leur pays au moins un centre d'excellence pour le traitement et la prévention, qui servira de point focal pour collecter les données épidémiologiques, effectuer les tests de laboratoire, développer des programmes d'éducation, traiter les patients les plus atteints, lancer des essais cliniques et évaluer l'efficacité des traitements. Ces centres devraient développer des stratégies et les conseils de traitements pour obtenir une suppression durable de l'infection virale. Deuxième étape, soutenir la recherche opérationnelle dans ces centres nationaux pour adapter les traitements antiviraux à la situation locale, de façon à rendre maximale leur durabilité à l'échelle individuelle et nationale. Des efforts de recherche clinique devraient être entrepris pour mettre au point des traitements complémentaires plus accessibles aux ressources des pays pauvres. Un exemple est d'inclure dans les traitements des vaccins thérapeutiques efficaces, d'un coût faible et nécessitant quelques administrations seulement par an. Troisième étape : utiliser les résultats de l'implantation initiale des traitements antirétroviraux et de la recherche clinique de la seconde étape pour définir les meilleures solutions thérapeutiques applicables aux pays en voie de développement. Les pays les plus riches devront apporter le soutien financier nécessaire pour permettre un développement exponentiel des traitements de façon à ce que toutes les personnes répondant aux critères de traitement soient effectivement traitées. Un vaccin préventif efficace demandera encore bien des années de recherche. L'introduction réussie des traitements antiviraux est la seule approche rationnelle capable de diminuer l'épidémie dans les prochaines années. En conséquence, il lui demande de préciser sa position sur ces diverses solutions.
Réponse publiée le 10 novembre 2003
Le ministre chargé de la santé, de la famille et des personnes handicapées partage les préoccupations exprimées quant à la gravité de la situation du sida dans le monde, notamment en Afrique où il persiste des difficultés majeures d'accès au traitement, mais aussi dans les régions d'Asie et d'Europe orientale où l'extension de l'épidémie est plus récente. Il souscrit pleinement à l'approche rationnelle qui consiste en une introduction réussie de traitements antiviraux et agit dans ce sens, en étroite liaison avec les autres ministres concernés, sous l'impulsion donnée par le Président de la République en 1997 à Abidjan et réaffirmée dans son discours à l'occasion de la dernière assemblée générale des Nations unies, le 22 septembre dernier. Cette action se développe à travers diverses initiatives : le soutien des partenariats hospitaliers développés dans le cadre de l'initiative française ESTHER (Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau), à laquelle se sont déjà associés l'Espagne, l'Italie, le Portugal et le Luxembourg ; la participation au fonds de solidarité prioritaire avec vingt et un projets en 2003, pour un montant de 21 millions d'euros ; l'augmentation de la contribution nationale au Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, qui passe de 50 à 150 millions d'euros, ainsi qu'à l'ONUSIDA et le plaidoyer auprès de la Commission européenne ainsi que des autres États membres de l'Union pour l'augmentation de ces financements. La France agit également avec ses partenaires de l'Union pour permettre la mise en oeuvre des accords de Doha adoptés dans le cadre de l'OMC, afin de faciliter l'accès aux médicaments génériques dans les pays qui ne disposent pas d'industries pharmaceutiques capables de les produire et de lever les difficultés liées à la protection des brevets portant sur les médicaments. Concernant la recherche opérationnelle, le ministère des affaires étrangères confie à l'ANRS (Agence nationale de recherche contre le sida) des projets en direction des pays d'Afrique subsaharienne, de la Thaïlande, d'Haïti et du Chili, ainsi que des programmes de coopération au Cameroun et en Afrique du Sud. Par ailleurs, le ministère de la santé estime nécessaire d'élargir le champ d'interventions à l'aide de l'UNICEF (en direction des orphelins) et du BIT (pour la prise en charge du sida dans le milieu du travail). En outre, le ministère de la santé entend développer la coopération avec l'OMS concernant l'accès aux soins et la politique du médicament. En matière de traitements complémentaires, il convient de poursuivre des efforts de recherche, notamment en matière de nutrition.
Auteur : M. Jacques Domergue
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : santé
Dates :
Question publiée le 16 juin 2003
Réponse publiée le 10 novembre 2003