exercice de la profession
Question de :
M. Hervé Mariton
Drôme (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Hervé Mariton attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des cabinets de recouvrement de créances. Leurs agents voient leur présence contestée par les avocats en référence de l'arrêt 745 P de la Cour de cassation du 7 avril 1999 qui stipule : « Attendu que les dispositions conférant aux parties la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix devant une juridiction ne peuvent avoir pour effet, sauf disposition expresse contraire qui n'existe pas en matière de recouvrement de créance pour le compte d'autrui, de déroger au principe suivant lequel seuls les avocats peuvent assumer ces missions à titre habituel... » Si l'on peut admettre qu'un cabinet de recouvrement qui se présente à la barre avec un certain nombre de dossiers constitue un trouble vis-à-vis des avocats, la représentation de recouvrement à titre occasionnel, c'est-à-dire un dossier occasionnellement, ne semble constituer aucun trouble vis-à-vis des avocats dans le sens indiqué par la Cour de cassation. De plus, l'article 853 du nouveau code de procédure civile, modifié depuis, reprend les termes de l'arrêt susvisé, indiquant que seuls les avocats peuvent assumer ces fonctions à titre habituel. Il serait dès lors utile, pour clarifier la situation, de préciser que la représentation des cabinets de recouvrement peut s'exercer à titre occasionnel, ce qui comblerait sans doute un vide juridique. Cette précision permettrait de continuer de laisser traiter par le biais de cabinets de recouvrement des dossiers dont les faibles enjeux financiers n'incitent pas au recours à un avocat. A l'inverse, laisser la situation en l'état conduirait inévitablement à la disparition de l'activité de recouvrement de créance et à l'aggravation des impayés y compris pour l'Etat à hauteur au minimum de la TVA. Aussi, il lui demande de bien vouloir faire connaître les intentions du Gouvernement sur ce dossier.
Réponse publiée le 15 septembre 2003
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'arrêt rendu par la première chambre de la Cour de cassation du 7 avril 1999 interdisant aux sociétés de recouvrement d'exercer, à titre habituel, des mandats ad litem devant la juridiction pose le problème de l'application combinée du décret du 18 décembre 1996 relatif à l'activité de recouvrement amiable de créances, de la loi du 31 décembre 1971 modifiée relative à la profession d'avocat et, enfin, de l'article 853 du nouveau code de procédure civile qui pose le principe de la liberté de représentation devant le tribunal de commerce. Conformément à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971, nul ne peut en règle générale, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties devant les juridictions sous réserve de dispositions dérogatoires. Ce principe est notamment écarté par l'article 853 du nouveau code de procédure civile, qui permet à la partie de se faire représenter par une personne de son choix devant le tribunal de commerce. Il convient toutefois d'observer que les dispositions de l'article 853 ont une portée purement procédurale et non statutaire. Tel est le sens de l'arrêt, rendu par la Cour de cassation le 7 avril 1999, qui devrait unifier la jurisprudence dans un proche avenir. Ces dispositions permettent, pour une instance donnée, le libre choix du mandataire ad litem, lorsque la partie ne peut assurer elle-même sa défense mais elles n'autorisent pas le mandataire à assurer la représentation contentieuse à titre habituel et professionnel et ce, quel que soit le montant de l'intérêt du litige. Les dispositions des articles 54 et suivants de la loi du 31 décembre 1971 modifiée qui régissent l'activité de consultation juridique « à titre habituel et rémunéré » confirment cette analyse. En effet, le fait pour un cabinet de recouvrement de diligenter des procédures judiciaires en assurant la représentation devant les juridictions conduit nécessairement le professionnel à fournir à son client des conseils, notamment pour le choix des procédures judiciaires à introduire et l'appréciation des stratégies judiciaires et juridiques à adopter. L'activité de recouvrement amiable des créances pour le compte d'autrui étant régie par le décret du 18 décembre 1996, l'exercice du droit par les professionnels concernés est encadré par l'article 59 de la loi du 31 décembre 1971. Par application de ce texte, les personnes exerçant une activité professionnelle réglementée ne peuvent donner des consultations juridiques relevant de leur activité principale qu'à titre accessoire et dans les limites de la réglementation qui leur est applicable. Or, il convient de constater que le décret de 1996 se borne à réglementer l'activité, normalement purement extra-judiciaire, de recouvrement amiable des créances pour le compte d'autrui. A cette fin, le décret impose à l'agent de recouvrement des obligations garantissant la représentation des fonds encaissés et réglemente le mandat de recouvrement ainsi que les démarches, essentiellement épistolaires, accomplies auprès du débiteur pour obtenir le paiement volontaire. Aucune de ces dispositions n'autorise l'activité de consultation juridique, ne serait-ce qu'à titre accessoire. Ces législations et réglementations, appelées à s'appliquer de manière combinée, réalisent un certain équilibre entre la nécessaire protection des intérêts des justiciables résultant du monopole des professions judiciaires et juridiques et le droit qui doit être reconnu aux autres professions d'exercer, dans certaines limites, des activités juridiques ou parajuridiques. Pour l'ensemble de ces considérations, il n'est pas envisagé de réformer les textes en la matière.
Auteur : M. Hervé Mariton
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions judiciaires et juridiques
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 30 juin 2003
Réponse publiée le 15 septembre 2003