Question écrite n° 21742 :
droit du travail

12e Législature

Question de : M. Philippe Tourtelier
Ille-et-Vilaine (2e circonscription) - Socialiste

M. Philippe Tourtelier appelle l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation des personnes de plus de cinquante ans à la recherche d'un emploi. Alors que le Gouvernement souhaite que les Français travaillent plus longtemps pour allonger la durée de cotisation, des personnes se trouvent exclues du monde du travail eu égard à leur âge. Certaines collectivités territoriales, en particulier, ne souhaitent recruter que des personnes de moins de quarante ans voire trente ans (âge indiqué sur les annonces de poste). Ceci pose un problème de cohérence. En effet, alors qu'un conseil régional n'hésite pas à octroyer un financement pour le suivi d'une formation qualifiante à des quinquagénaires, paradoxalement le conseil général limite l'âge d'embauche. Il demande donc quelles mesures peuvent être envisagées pour que l'on n'ait plus à observer, dans la fonction publique et territoriale mais aussi plus largement dans les entreprises, ce type de discrimination.

Réponse publiée le 29 septembre 2003

L'honorable parlementaire attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation des chômeurs âgés de plus de cinquante ans. Le nombre de demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans a enregistré entre juin 2002 et juin 2003 une hausse de 3,4 % (DARES données CVS) quand l'ensemble du chômage augmentait de 6,3 %. Le chômage des seniors est en effet moins réactif tant aux dégradations qu'aux améliorations de l'emploi. Souvent entrées au chômage à la suite de la perte d'un emploi stable, c'est un peu plus de 368 800 personnes de plus de cinquante ans qui sont à la recherche d'un emploi à fin juin 2003. Ces personnes restent plus fortement exposées au risque de chômage de longue durée que l'ensemble de la population. La France, pour des raisons qui tiennent sans doute à la fois à sa démographie et aux conditions d'ouverture des droits à la retraite, se situe en Europe parmi les pays ayant le plus faible taux d'emploi. En 2002, le taux d'emploi des cinquante-cinq à soixante-quatre ans s'élève selon les sources européennes à 33 %, alors que la moyenne des pays de l'Union européenne s'établit autour de 38 %. Le Gouvernement entend faire de l'emploi des travailleurs de plus de cinquante ans une priorité de sa politique, à la fois pour maintenir un haut niveau de développement économique et social et pour contribuer à l'équilibre des régimes de retraites. Le Gouvernement s'est d'une part fixé comme objectif raisonnable pour 2008, de faire reculer l'âge moyen de cessation d'activité d'une année et demie, le portant ainsi de cinquante-sept ans et demi à cinquante-neuf ans. D'autre part le plan national français pour l'emploi pour 2002 (PNAE) prévoit à l'horizon 2006 d'augmenter de quatre points le taux d'emploi des seniors. Pour atteindre ces objectifs il est nécessaire d'inverser les logiques conduisant à exclure de l'emploi les salariés expérimentés. Le Gouvernement rassemble actuellement les conditions d'une mobilisation nationale de l'ensemble des acteurs concernés : salariés, entreprises, organisations syndicales et professionnelles. Les leviers d'intervention en faveur de ces publics s'organisent autour de deux axes : maintenir dans l'emploi les salariés de plus de cinquante ans et favoriser le retour à l'emploi de ceux qui en sont privés. En ce qui concerne les conditions de travail des plus de cinquante-cinq ans et la formation des salariés expérimentés, l'État doit jouer un rôle de « facilitateur », à travers trois actions d'appui et d'accompagnement : le développement d'une campagne d'information et de sensibilisation pour changer le regard que l'on porte sur les salariés de plus de cinquante-cinq ans. Ces campagnes peuvent avoir un véritable impact, comme l'ont montré certaines expériences chez nos partenaires européens, en particulier la Finlande. Le lancement d'une opération d'incitation à négocier sur la gestion des âges dans les branches professionnelles : le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité réunira l'ensemble des organisations professionnelles pour connaître leurs intentions et les encouragera à lancer des négociations sur la formation, les carrières et les conditions de travail. L'aide aux entreprises se déclinera à travers l'édition d'un guide d'aide à la négociation à l'intention des branches sur ce thème, grâce à la mobilisation de l'Agence nationale d'amélioration des conditions de travail (ANACT) et de son réseau, et enfin l'utilisation des contrats d'études prospectives, du FNE formation et des engagements de développement de la formation (EDDF) seront privilégiés. Par ailleurs la contribution « Delalande » qui a été conçue pour dissuader les pratiques d'entreprises privilégiant le départ systématique des salariés les plus âgés, a été modifiée à l'occasion de la loi sur les retraites afin de ne pas compromettre cet objectif légitime. Pour éviter tout effet dissuasif le Gouvernement a en effet décidé d'exonérer du paiement de cette contribution les entreprises qui embauchent des travailleurs de plus de 45 ans. Cette réforme favorise les possibilités d'évolution et de mobilité professionnelle en deuxième partie de carrière. La loi sur les retraites comprend également un volet de « reciblage » des préretraites, autour de deux dispositifs : CATS (pénibilité) et ASFNE, afin de pouvoir encore répondre à la situation des entreprises dont le redressement rend nécessaire des départs anticipés. En revanche, les préretraites progressives (PRP) et le volet de CATS non lié à la pénibilité seront à terme supprimés. Enfin, les préretraites d'entreprises seront désormais soumises aux cotisations vieillesse. Quatre mesures d'incitation au travail après soixante ans ont été prévues dans la loi sur les retraites : la création d'une surcote de 3 % par année effectuée au-delà de soixante ans et de la durée d'assurance requise pour liquider au taux plein ; le report, à soixante-cinq ans de la possibilité de mise à la retraite d'office à l'initiative de l'employeur ; la création d'un nouveau dispositif de retraite progressive ouvert aux personnes ne justifiant pas du taux plein, un passage progressif entre travail et retraite entre soixante et soixante-cinq ans devant être possible ; l'harmonisation et l'assouplissement des règles du cumul emploi-retraite : l'interdiction dans le régime de base de la reprise d'un travail chez l'ancien employeur sera notamment levée après un délai d'un an. De leur côté les partenaires sociaux gestionnaires de l'UNEDIC ont choisi dès 2002 de favoriser le maintien dans l'emploi des seniors en relevant de cinquante-cinq à cinquante-sept ans l'âge requis pour bénéficier, en cas de licenciement, du maintien des allocations chômage jusqu'à l'âge légal de la retraite fixé à soixante ans. S'agissant des demandeurs d'emploi de longue durée de plus de cinquante ans, eu égard aux difficultés qu'ils connaissent sur le marché du travail, ceux-ci sont considérés comme un public prioritaire des dispositifs de prévention et de lutte contre le chômage de longue durée et les exclusions tel que le contrat initiative-emploi (CIE) dans le secteur marchand ou le contrat emploi consolidé (CEC) dans le secteur non marchand. De même, dans le cadre du plan d'aide au retour à l'emploi, les demandeurs d'emploi âgés de plus de cinquante-cinq ans indemnisés par le régime d'assurance-chômage peuvent bénéficier de façon préférentielle, dès leur troisième mois de chômage de l'aide dégressive à l'employeur (ADE) financée par l'Unedic. Le Gouvernement a décidé lors de la table ronde pour l'emploi du 18 mars 2003 de rendre le CIE fortement attractif pour les chômeurs de plus de cinquante ans en grande difficulté. Pour leur embauche, l'aide mensuelle la plus élevée (500 euros) est désormais versée pendant cinq ans contre deux ans auparavant. Ainsi configuré le CIE est un levier puissant pour favoriser la réinsertion durable de travailleurs expérimentés. Enfin, un projet de loi sur le droit à la formation tout au long de la vie sera prochainement présenté devant le Parlement.

Données clés

Auteur : M. Philippe Tourtelier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité

Ministère répondant : affaires sociales, travail et solidarité

Dates :
Question publiée le 14 juillet 2003
Réponse publiée le 29 septembre 2003

partager