Question écrite n° 23457 :
politique de la santé

12e Législature

Question de : M. Gabriel Biancheri
Drôme (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Gabriel Biancheri appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées concernant le dossier de la lutte médicalisée contre la douleur. Pendant des années, la lutte contre la douleur a été le parent pauvre de la médecine de notre pays. Depuis quelques années, des actions ont été conduites pour améliorer la prescription des morphiniques aux patients et faciliter le développement des centres antidouleur. Cependant, il s'avérerait que le bilan des actions réalisées serait en deçà des résultats escomptés et qu'un faible nombre de pompes à morphine soit distribué et financé. Les pompes à morphine ont démontré leur efficacité mais ont un coût avoisinant les 1 800 euros. D'autres traitements alternatifs beaucoup moins onéreux existent, telle l'utilisation de la méthadone, administrée au Canada sous la forme injectable. La méthadone, dix fois plus antalgique que la morphine, apporterait une réponse plus adaptée à la déception d'un bon nombre de personnes souffrant de l'actuelle insuffisance de prise en charge de la douleur en milieu hospitalier. Cependant, jusqu'à présent, seule la méthadone buvable bénéficie de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) et il conviendrait, à l'instar du modèle canadien, de délivrer cette AMM à la méthadone injectable. Compte tenu de l'intérêt que revêt ce dossier pour chacun d'entre nous, il lui demande donc de bien vouloir lui communiquer son avis sur ces propositions et les éventuelles mesures qu'il entend prendre en ce domaine.

Réponse publiée le 9 mars 2004

Depuis la publication, par la commission des affaires sociales du Sénat en 1995, du rapport « Pour une politique de développement des soins palliatifs et de l'accompagnement », la prise en compte et le soulagement de la douleur font l'objet d'un engagement fort de la France. Des programmes triennaux d'action, s'inscrivant dans une politique d'amélioration de la prise en charge de la douleur des malades, ont ainsi été institués depuis 1998. Sous l'impulsion de ces programmes et afin d'encourager leurs prescriptions, l'accès aux antalgiques majeurs a été facilité avec notamment la mise en place des ordonnances sécurisées, la sortie de réserve hospitalière de certains antalgiques ou la mise au point de nouvelles formes pédiatriques d'antalgiques. L'utilisation des antalgiques a, de ce fait, progressé, permettant ainsi à la France de rattraper son retard en la matière. Précisément, les volumes de ventes des antalgiques de niveau 2 dénotent une progression de 8 % par an depuis 1996, ceux des antalgiques de niveau 3 ont augmenté de 16 % en 1999 et de 20 % en 2000, cette tendance se confirmant. En outre, des alternatives à la morphine se sont multipliées avec l'existence notamment de formes transdermiques ou transmuqueuses de fentanyl, de formes retard en traitement de fond de la douleur ou encore de formes à libération immédiate pour le traitement des crises paroxystiques. Par ailleurs, en août 2000, les établissements de santé ont été invités à soutenir leurs efforts dans leurs politiques d'acquisition de pompes d'analgésiques autocontrôlées (PCA), permettant aux patients de s'administrer, personnellement et de manière adaptée, la dose de morphine nécessaire à l'apaisement de leur douleur. Ainsi, de 830 en 1997, le nombre annuel de PCA acquises depuis le lancement du plan de lutte contre la douleur s'élève désormais à 1 150 en moyenne. A ce jour, le parc de PCA disponibles dans l'ensemble des établissements de santé est estimé à 5 000. Aussi, des formes buvables de méthadone, prêtes à l'emploi, ont bénéficié d'autorisations de mise sur le marché. Agoniste morphinique pur, opioïde synthétique dérivé de la diphénylpropylamine, la méthadone est indiquée dans le traitement substitutif des pharmacodépendances majeures aux opiacés, dans le cadre d'une thérapeutique globale de prise en charge médicale, sociale et psychologique. Une forme buvable de ce produit offre l'avantage de rendre difficile l'extraction du principe actif et de limiter l'injection par voie intraveineuse. La mise sur le marché d'une forme injectable de la méthadone présenterait en revanche des dangers, notamment au regard des risques de surdosage, d'abus et de détournement (trafic de revente) inhérents à l'utilisation de ce produit. En outre, si l'intérêt clinique du produit dans le traitement de la douleur est reconnu pour les patients mal soulagés ou tolérant mal un autre opioïde fort, les caractéristiques pharmacocinétiques et pharmacodynamiques de la méthadone sont néanmoins à l'origine d'une grande variabilité interindividuelle, en termes d'efficacité et de sécurité, de la réponse à une même posologie. Par ailleurs, en cas de substitution de la méthadone à un opioïde donné, une analgésie équivalente nécessite d'adapter, en fonction de la posologie antérieure de l'opioïde donné, la posologie de méthadone, ce qui majore le risque de surdosage. Il conviendra de signaler surtout qu'outre la faiblesse de l'écart entre la posologie curative et la posologie toxique de la méthadone, la dose létale pour les sujets non dépendants à la méthadone se situe autour de 1 mg/kg, ce qui ne fait que renforcer les difficultés de son utilisation en pratique médicale quotidienne.

Données clés

Auteur : M. Gabriel Biancheri

Type de question : Question écrite

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : santé

Ministère répondant : santé

Dates :
Question publiée le 11 août 2003
Réponse publiée le 9 mars 2004

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