Question écrite n° 25220 :
code des marchés publics

12e Législature

Question de : Mme Martine Lignières-Cassou
Pyrénées-Atlantiques (1re circonscription) - Socialiste

Mme Martine Lignières-Cassou souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences de la réforme du code des marchés publics et les moyens qui seront octroyés à la lutte contre la corruption. En relevant massivement les seuils au-delà desquels les appels d'offres sont nécessaires, près de 90 % des marchés publics échapperont à la procédure normale, pourtant garante de la régularité, de la liberté d'accès et de l'égalité de traitement des candidats. En désactivant ainsi le délit de favoritisme, prévu et réprimé par le code pénal dans son article 432-14, cette réforme est non seulement dangereuse pour l'avenir mais elle s'apparente également à une amnistie de fait de nombreux délits de favoritisme. Aussi lui demande-t-elle de lui communiquer le nombre de personnes poursuivies actuellement pour ce type de délit et susceptibles d'échapper aux poursuites judiciaires lors de l'entrée en application de la réforme. Par ailleurs, en réponse à la question d'actualité de M. André Vallini, publiée au Journal officiel le 18 juin 2003, il affirmait que le Gouvernement avait l'intention « de remettre en activité des dispositifs qui sont beaucoup moins utilisés aujourd'hui qu'ils devraient l'être, pour lutter contre tous les phénomènes de corruption dans la vie publique ». Elle lui demande en conséquence de lui indiquer précisément de quels dispositifs il est question.

Réponse publiée le 17 août 2004

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'entrée en vigueur de la réforme du code des marchés publics ne saurait avoir pour effet de créer une amnistie de fait de nombreux délits de favoritisme. En effet, aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, « les dispositions réglementaires nouvelles du code des marchés publics modifiant les conditions de passation desdits marchés ne s'appliquent pas aux infractions commises avant leur entrée en vigueur, dès lors que le texte législatif, support légal de l'incrimination, n'a pas été modifié » (Cass. crim, 7 avril 2004). En conséquence, la réforme du code des marchés publics est dépourvue de toute incidence sur les faits de favoritisme qui auraient pu être commis antérieurement à son entrée en vigueur. En outre, loin de soustraire à toute règle de mise en concurrence et de publicité, la passation des marchés en dessous des seuils, le nouveau code des marchés publics, tel qu'il résulte du décret du 7 janvier 2004, prévoit que, quel que soit leur montant, « les marchés publics respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ; ces obligations sont mises en oeuvre conformément aux règles fixées par le présent code ». Dès lors, les marchés passés en dessous des seuils fixés par l'article 28 du nouveau code des marchés publics et dénommés « marchés passés selon la procédure adaptée » doivent respecter les règles de mise en concurrence et de publicité énoncées notamment aux articles 28-I et 40-II du décret du 7 janvier 2004. Par conséquent, il ne saurait ainsi être soutenu que l'entrée en vigueur du nouveau code des marchés publics aura pour effet de faire obstacle à toute poursuite du chef de favoritisme pour les marchés passés en dessous des seuils précités. Par ailleurs, et s'agissant de la lutte contre la corruption, il convient de relever que le système français de lutte contre la corruption a pu être jugé par nos pairs du Conseil de l'Europe (dans le cadre du GRECO) et de l'OCDE (dans le cadre du CIME) globalement satisfaisant. Afin de donner pleine effectivité au système normatif français, et ainsi accroître l'efficacité de la lutte contre la corruption, une circulaire du ministère de la justice, en date du 21 juin 2004, a rappelé aux parquets l'importance qui s'attachait à des poursuites diligentes en matière de corruption, et l'intérêt que pouvaient revêtir des mesures comme la mise en jeu de la responsabilité pénale des personnes morales ou le prononcé de la peine de confiscation du produit de l'infraction, qu'il s'agisse des commissions occultes ou de l'avantage obtenu par le trafic de la fonction. D'une façon plus générale, le dispositif de détection des faits de corruption a été sensiblement amélioré par la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 qui a étendu le champ matériel de la déclaration de soupçon, prévu à l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, aux sommes (ou aux opérations portant sur des sommes) qui pourraient provenir de faits de corruption ou de fraude aux intérêts financiers des Communautés européennes. Enfin, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a, d'une part, élargi les pouvoirs de réquisition du ministère public afin de lui permettre d'obtenir, de toute personne, établissement ou organisme public ou privé, tout document intéressant l'enquête, sans que le secret professionnel puisse être opposé sans motif valable et, d'autre part, donné naissance aux juridictions interrégionales en matière économique et financière, compétentes pour connaître des infractions de corruption dans les procédures d'une très grande complexité.

Données clés

Auteur : Mme Martine Lignières-Cassou

Type de question : Question écrite

Rubrique : Marchés publics

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 22 septembre 2003
Réponse publiée le 17 août 2004

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