Question écrite n° 27283 :
droit d'asile

12e Législature

Question de : Mme Martine Billard
Paris (1re circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe

Mme Martine Billard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les cas d'expulsions de demandeurs d'asile, dès leur arrivée en France, en zone d'attente dans les aéroports, avant même que leurs dossiers ne soient examinés par les autorités compétentes statuant sur l'octroi de l'asile politique. Selon un cas qui lui a été rapporté par les associations concernées, une femme tchétchène arrivée le 2 octobre à l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle et qui demandait l'asile pour cause des sévices dont elle et sa famille avaient été victimes en Tchétchénie a été renvoyée de force vers Moscou par avion, le jeudi 9 octobre au matin. En effet, conduite en zone d'attente (ZAPI 3), il lui avait été notifié un refus d'admission sur le territoire français, au motif que la demande d'asile était apparue a priori infondée au représentant du ministère des affaires étrangères. Alors que son avocate avait déposé un référé-liberté contre la décision de ce dernier, les forces de police ont emmené de force la femme tchétchène avec ses deux enfants, dans un avion à destination de Moscou, ne laissant pas le temps au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui n'examinait la requête que le 10 octobre, de rendre son jugement en temps utile. De fait, le 10 octobre, celui-ci a jugé irrecevable la requête en référé-liberté, puisque la mesure avait été déjà exécutée. Les atteintes aux droits de l'homme élémentaires des populations civiles en Tchétchénie sont dénoncées par les organisations non gouvernementales depuis quatre ans et sont désormais bien connues du gouvernement français. Toutes les organisations de protection des droits de l'homme, tant russes qu'internationales, insistent sur le fait que les Tchétchènes ne peuvent se considérer en sécurité nulle part sur le territoire de la Fédération de Russie, compte tenu des discriminations, brimades illégales et autres exactions de l'administration qui y sont pratiquées de façon routinière. Elle estime que toute personne venant de Tchétchénie et demandant l'asile en affirmant être victime d'une persécution doit pouvoir faire examiner son dossier par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Ce dernier, ainsi que la Commission de recours des réfugiés, ont jusqu'alors accordé l'asile politique à de nombreux Tchétchènes en pareilles situations. Aussi, elle lui demande d'expliquer en pareille situation les actes des forces de police empêchant que ne soit jugé le référé-liberté alors que les plus grandes menaces planent sur les chances de survie en Russie des personnes concernées, ainsi que de préciser les instructions données aux forces de police intervenant dans les zones d'attente de l'aéroport de Roissy.

Réponse publiée le 3 août 2004

Aux termes de l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'étranger qui demande son admission sur le territoire au titre de l'asile peut être maintenu dans une zone d'attente pendant le temps strictement nécessaire à un examen tendant à déterminer si sa demande n'est pas manifestement infondée. Dans le cas évoqué par l'honorable parlementaire, l'intéressée est arrivée à l'aéroport de Roissy le 2 octobre 2003 en provenance de Moscou accompagnée de ses deux enfants âgés de cinq et sept ans. Elle a déposé une demande d'asile à la frontière le même jour, demande qui a fait l'objet, après avis défavorable du ministre des affaires étrangères le 3 octobre 2003, d'un rejet notifié à l'intéressée le 6 octobre 2003, le tribunal de grande instance de Bobigny ayant préalablement prolongé son maintien en zone d'attente. Le réacheminement de l'intéressée et de ses deux enfants a été effectué le 9 octobre 2003 à 9 h 25 conformément aux dispositions de l'article 35 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Son recours devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise demandant par voie d'injonction son admission sur le territoire français au titre de l'asile politique a été porté à la connaissance de mes services ce même jour à 17 h 05. Le lendemain, l'intéressée a demandé par l'intermédiaire de son conseil qu'il soit enjoint à l'administration de procéder à son rapatriement. Ce recours a été rejeté, les conclusions de la requête ayant été introduites postérieurement à l'intervention de la mesure de réacheminement. Dans ces conditions, il ne peut être reproché à l'administration d'avoir sciemment organisé le rapatriement de l'intéressée avant l'instruction de son recours contentieux. Il sera rappelé par ailleurs que si, d'une manière générale, les services du ministère de l'intérieur s'efforcent de veiller à n'exécuter une mesure de réacheminement, dans l'hypothèse d'un recours en référé, qu'après que le juge administratif s'est prononcé, la loi ne leur en fait nulle obligation puisque le recours n'est pas suspensif. Enfin, la loi prévoit un examen au cas par cas de chaque demande d'asile déposée par un ressortissant étranger affirmant être victime d'une persécution. Ouvrir une exception sur le seul fondement d'une allégation du demandeur d'asile invoquant sa provenance ou ses liens avec la Tchétchénie comporterait de trop grands risques de détournement de la procédure d'asile et de contrôle à la frontière.

Données clés

Auteur : Mme Martine Billard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Dates :
Question publiée le 27 octobre 2003
Réponse publiée le 3 août 2004

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