aide au développement
Question de :
M. Michel Raison
Haute-Saône (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Michel Raison appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les attentes exprimées par de nombreuses associations françaises au cours de la Semaine de la solidarité internationale qui s'est déroulée du 12 au 23 novembre dernier. Il souhaite connaître les orientations qu'entend, au sein des instances internationales, promouvoir la France en faveur des pays en voie de développement. Plus précisément, la France et ses partenaires de l'Union européenne plaident-ils pour une régulation plus forte des programmes d'aide alimentaire, dans l'objectif de préserver les productions locales et la structuration des marchés nationaux des pays en voie de développement ? Des mesures pratiques sont-elles déjà en ce sens mises en oeuvre ? Par ailleurs, peut-il rappeler la position de l'Etat français sur la problématique de l'annulation partielle ou totale, de la dette des pays pauvres ? Enfin, peut-il préciser le mécanisme du calcul de l'aide publique au développement dont le montant global reste théorique dès lors qu'il intègre les annulations de dettes ? Dans quelle mesure le niveau de l'aide publique au développement pourrait-il alors être chiffré sans intégrer les annulations de dettes ?
Réponse publiée le 3 février 2004
La politique française d'aide au développement s'oriente autour de deux axes majeurs. Le premier consiste à faciliter l'insertion de ces pays dans les échanges économiques internationaux, en favorisant tout à la fois l'accès de leurs productions aux marchés du Nord (levée des obstacles tarifaires aux importations des PMA, réévaluation des aides aux exportations agricoles du Nord, stabilisation des prix des matières premières et instauration de préférences commerciales) et l'investissement privé sur leur territoire (création d'un droit des affaires à même de rassurer les investisseurs, soutien aux processus d'intégration régionale susceptibles de créer des marchés ayant une certaine taille critique, création d'un mécanisme international de garantie des investissements dans les pays en développement). Le second axe de cette politique consiste dans le renforcement et l'amélioration de nos instruments d'aide au développement. Ce renforcement est d'abord recherché par l'augmentation des volumes d'APD. La France a porté son aide publique à un niveau estimé de 0,41 % en 2003, contre 0,32 en 2001. L'objectif est d'atteindre d'abord 0.50 % en 2007, puis 0,70 % en 2012. Ce vigoureux effort doit profiter prioritairement à l'Afrique. Le renforcement de l'aide passe également par la recherche d'une plus grande efficacité. A ce titre, la France prône le développement de logiques de partenariat avec les pays bénéficiaires (le NEPAD est l'illustration de ce nouvel esprit de partenariat), une meilleure coordination des actions des bailleurs, l'adaptation des outils (assistance technique, aide-programme...) comme des méthodes de travail (évaluation...). Enfin, le renforcement de l'aide passe par la recherche de nouveaux financements. Dans cette perspective, la France soutient les actions de solidarité internationale des acteurs non gouvernementaux (pouvoirs publics locaux, associations, ...) et propose une réflexion sur les modalités de mise en place d'une taxation internationale sur les richesses engendrées par la mondialisation (mise en place par le Président de la République du groupe de travail Landau). Les annulations de dettes au bénéfice des pays en développement constituent une modalité importante de l'effort de solidarité de la communauté internationale. Elles sont prises en compte dans le calcul de l'APD, aussi bien par la France que par les autres bailleurs bilatéraux et multilatéraux pour lesquels elles constituent un coût budgétaire réel. Ces dettes obèrent les capacités des pays concernés, en les empêchant de consacrer leurs ressources à leur développement et d'accéder à de nouveaux financements internationaux dans le cadre de plans de redressement de leur situation financière. Afin que ces remises de dettes profitent pleinement au développement des pays du sud, elles sont désormais consenties à la condition que les crédits dont elles permettent la disponibilité financent des investissement productifs et des politiques de lutte contre la pauvreté (cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté, contrats de désendettement et de développement). Les annulations de dettes accordées par la France en font le premier contributeur à l'initiative PPTE (pays pauvres très endettés). Leur importance - 10.5 milliards d'euros dans le cadre de l'initiative PPTE, s'ajoutant à 10 milliards déjà consenties avant cette initiative- est essentiellement à l'origine de l'augmentation actuelle de nos volumes d'APD. Toutefois, notre engagement en matière d'accroissement de l'aide publique au développement n'a pas vocation à se réduire à ce mécanisme d'aide. A mesure que les dettes auront été annulées, d'autres instruments d'aide devront ainsi monter en puissance pour permettre, à notre pays de tenir ses engagements en la matière. Concernant le secteur alimentaire, les autorités françaises ont pris en compte les effets pervers de certaines modalités traditionnelles de l'aide. Celle-ci a longtemps fonctionné selon une logique d'écoulement des excédents, la reconduction d'une année à l'autre étant plus ou moins automatique, sans prendre en compte la situation locale. Aujourd'hui, la France oriente l'utilisation de l'aide alimentaire vers le financement de projets de sécurité alimentaire qui s'inscrivent en complémentarité des actions de développement initiées par la coopération française. C'est ainsi que le ministère des affaires étrangères a favorisé la mise en place de programmes-cadre d'aide alimentaire afin de sensibiliser les autorités nationales des pays bénéficiaires à l'intérêt de mettre en place une « stratégie globale de sécurité alimentaire ». Parallèlement, depuis l'année 2000, l'aide alimentaire française programmée s'est concentrée sur trois axes majeurs : la réduction de la vulnérabilité des populations les plus pauvres, l'assistance aux personnes durablement déplacées, l'aide aux personnes victimes de sécheresses récurrentes. Dans un cadre plus large de concertation avec l'Union européenne et les États membres, la France a ratifié, le 30 juin 1999, la Convention de Londres relative à l'aide alimentaire. Cette convention définit, non seulement, des engagements minimaux de pays donateurs exprimés en tonnes équivalent céréales ou en valeur (l'engagement annuel de la France est de 200 000 tonnes équivalent céréale), mais elle prévoit également de favoriser une meilleure articulation entre la politique de sécurité alimentaire (avec comme objectif la réduction de la pauvreté) et l'aide alimentaire utilisée comme instrument de l'aide humanitaire. C'est ainsi que les pays donateurs se sont engagés à renforcer l'efficacité de l'aide alimentaire par un meilleur ciblage de l'aide vers les pays et les populations en difficulté, la limitation des impacts négatifs de l'aide sur les filières vivrières locales, la promotion des opérations triangulaires et des achats locaux, le respect des habitudes alimentaires locales, la coopération et la concertation entre les donateurs et les institutions internationales. Enfin, dans le cadre du G8, présidé en 2003 par la France, ses membres ont reconnu la nécessité de mettre en place des approches flexibles pour répondre aux crises alimentaires, notamment par une meilleure utilisation de l'aide, pour minimiser ses effets pervers sur les pays bénéficiaires et pour prévenir la répétition d'un tel fléau, en particulier à travers la promotion des capacités agricoles et du développement rural. A l'initiative conjointe de la France et des États-Unis, un groupe d'experts piloté par les représentants permanents auprès de l'OAA a été créé afin de définir une stratégie de réponse à la crise actuelle et les actions à mettre en place.
Auteur : M. Michel Raison
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 1er décembre 2003
Réponse publiée le 3 février 2004