soins palliatifs
Question de :
M. Jacques Remiller
Isère (8e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques Remiller souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées au sujet de la délicate question de l'euthanasie. En effet, après le drame de la famille Imbert, il apparaît plus que nécessaire d'agir. Il est tout à fait normal que l'euthanasie active soit interdite. Elle doit le demeurer. Cependant, cela ne doit pas empêcher une réflexion approfondie sur les cas d'euthanasie passive et indirecte et d'aide au suicide. Il convient de constater qu'en Allemagne l'euthanasie passive est admise : elle est justifiée quand le patient s'est exprimé clairement pour qu'on ne prolonge pas sa vie. La jurisprudence admet aussi l'euthanasie indirecte, par laquelle il s'agit d'administrer à un malade en phase terminale des antalgiques qui ont pour effet secondaire de hâter le décès. En Grande-Bretagne, l'euthanasie indirecte est admise, et le Gouvernement a engagé des consultations au sujet de l'euthanasie passive. En Suisse, l'aide au suicide est autorisée, sous conditions. Au Danemark et aux Pays-Bas, des lois ont été adoptées pour limiter l'acharnement thérapeutique. Au Danemark, un médecin ne peut traiter un malade contre son gré, et, vice-versa, le patient peut refuser un traitement qui ne ferait que retarder la date de son décès et a le droit de recevoir des antalgiques pour avancer le décès. Aux Pays-Bas, euthanasie et aide au suicide sont tolérées en cas de force majeure, quand le médecin est confronté au choix entre son devoir de sauver une vie et celui d'abréger une vie rendue intolérable par la souffrance. Des conditions strictes doivent être respectées : la souffrance insoutenable, une demande du patient réitérée, la consultation d'autres médecins,... Il est impensable que la France ne soit dotée à l'heure actuelle d'aucun dispositif de ce type. Il ne s'agit pas d'autoriser l'euthanasie active sauvage mais d'être à l'écoute de patients souffrant atrocement, afin de les libérer de leurs douleurs et, surtout, de respecter leur dignité. Il souhaiterait savoir quel est son sentiment à ce sujet, et s'il entend engager des consultations au sujet d'une future loi venant réglementer l'euthanasie passive et l'aide au suicide.
Réponse publiée le 30 mars 2004
La question de la fin de vie doit être posée et débattue. L'erreur serait grande de vouloir occulter un problème qui concerne chaque citoyen et qui correspond à une réalité aussi universelle qu'inévitable. Une société doit savoir s'interroger sur la manière dont elle gère la maladie et la mort. Il est primordial toutefois de prendre le temps nécessaire pour que ce débat aborde l'ensemble des questions et permette de prendre en compte la diversité des situations relatives à la fin de vie. Accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments, apaiser ses souffrances, assurer jusqu'au bout la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage sont des obligations déjà inscrites dans le code de déontologie médicale. Les droits à l'autonomie et à la dignité de la personne malade, et notamment son refus de tout acharnement thérapeutique, sont reconnus. La loi autorise les malades à refuser les soins ou à demander l'interruption des traitements, et les médecins peuvent utiliser tous les moyens à leur disposition pour soulager les douleurs tant physiques que psychiques des malades en fin de vie. Il n'y a pas de limite à l'utilisation d'antalgiques et de sédatifs dès lors qu'ils s'avèrent nécessaires pour soulager la personne au seuil de la mort, même si ce soulagement accélère le moment du décès. Le soulagement et l'accompagnement des personnes en fin de vie exigent une écoute et une évaluation des situations au cas par cas, en concertation avec le patient, son entourage et l'ensemble de l'équipe soignante. Les équipes médicales, à l'hôpital comme en ville, doivent être formées et soutenues dans cette tâche difficile. Seule une diffusion des bonnes pratiques dans ce domaine permettra de supprimer des comportements clandestins. C'est le sens de la mission que le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a confiée à Mme Marie de Hennezel. Celle-ci lui a remis son rapport le 16 octobre dernier et cette première étape va permettre de lancer une phase de sensibilisation de l'opinion publique et des professionnels de santé. Toutefois, certaines personnes, sous le poids de la solitude ou de la honte d'être diminuées, dépendantes, demandent à ce qu'on anticipe leur mort, veulent en décider le jour. Répondre à ces demandes en donnant délibérément la mort reste un acte illégal. L'autoriser ouvrirait la voie à des dérives et des abus qui mettraient en danger les fondements mêmes de notre société. On pourrait ainsi se poser la question de la poursuite de recherches médicales dans le domaine des maladies dégénératives, si l'euthanasie se présentait comme solution possible. Il faut savoir en fait déchiffrer la demande réelle, très souvent non exprimée, qui est une demande d'attention, de présence, d'aide et de compassion. Le véritable enjeu du débat semble être celui de l'accompagnement dans les meilleures conditions des personnes en situation de souffrance, plutôt que leur abandon. Aujourd'hui, la médecine palliative a réalisé d'immenses progrès, elle soulage les douleurs mêmes extrêmes. Il faut donc développer les soins palliatifs en augmentant la création d'unités dans chaque centre hospitalier universitaire, en formant le personnel - et notamment celui confronté au désir de mourir des patients atteints de maladies impliquant une dépendance totale - à la réflexion éthique sur le sens des soins et à l'accompagnement psychologique des malades et de leur famille. Améliorer les pratiques, développer une médecine plus humaine auprès de ceux qu'on ne peut pas guérir et faire reculer les peurs et la solitude, des patients comme des soignants, sont les priorités du Gouvernement.
Auteur : M. Jacques Remiller
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : santé
Dates :
Question publiée le 10 février 2004
Réponse publiée le 30 mars 2004