Question écrite n° 3342 :
exercice de la profession

12e Législature

Question de : M. Jacques Myard
Yvelines (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jacques Myard appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur la condamnation d'un hôpital pour avoir refusé de ne pas transfuser un témoin de Jéhovah. Le 25 août, dans un jugement en référé, le tribunal administratif de Lille a donné raison à une jeune femme transfusée contre son gré à l'hôpital de Valenciennes à la suite d'une hémorragie consécutive à un accouchement. Il est reproché au centre hospitalier de ne pas avoir respecté la loi Kouchner du 4 mars 2002 sur le droit des malades, qui demande aux médecins de prendre en compte l'avis des patients, portant ainsi une « atteinte grave et manifestement illégale à la liberté individuelle ». D'un autre côté, la transfusion a été réalisée alors qu'il y avait, selon l'obstétricien, une urgence vitale et que l'inaction, fatale pour la patiente, risquerait d'exposer les médecins au grief de non-assistance à personne en danger. Selon une récente étude américaine, en l'absence de transfusion, le risque de décès maternel est multiplié par quartante-quatre chez les femmes témoins de Jéhovah. La France connaît l'un des taux de mortalité maternelle par hémorragie parmi les plus élevés d'Europe. Cette situation qui alarme l'ensemble des professionnels médicaux concernés confirme en outre une tendance à la juridiciarisation de la médecine porteuse de graves risques sur la prise en charge des patientes. Devant ce dilemme, il appartient au législateur de préciser les dispositions de la loi Kouchner afin que le respect de l'avis du patient prévale tant qu'il ne met pas sa vie en danger. Il lui demande en conséquence s'il envisage d'aménager les dispositions de la loi Kouchner pour résoudre le dilemme soulevé par ce jugement.

Réponse publiée le 18 novembre 2002

Le consentement aux soins est un droit fondamental de la personne dont le principe est inscrit dans le code civil. Ce principe est également inscrit dans le code de déontologie médicale sous forme d'une obligation pour le praticien de respecter la volonté du patient. La loi du 4 mars 2002 précise ces dispositions. Elle prévoit notamment, à l'égard des mineurs et majeurs sous tutelle, que le médecin peut, malgré le refus des parents ou du tuteur, délivrer les soins indispensables pour éviter à l'intéressé des conséquences graves pour sa santé. Le sens à donner à l'ordonnance de référé en question est lié aux conditions particulières dans lesquelles elle est intervenue. Le juge des référés, en l'absence de défense présentée par l'hôpital, a relevé que rien n'établissait que « le refus de respecter la volonté de la patiente (aurait été) rendu nécessaire du fait d'un danger immédiat pour sa vie ». Sa décision aurait pu être différente si l'hôpital avait présenté une défense faisant état d'un danger avéré. A cet égard l'ordonnance doit être rapprochée de deux décisions du Conseil d'Etat, dont l'une est postérieure à la loi du 4 mars 2002 et s'y réfère. Ces décisions concernent des cas identiques. Elles confirment que le principe du consentement aux soins constitue une liberté fondamentale qui s'oppose à ce qu'il soit passé outre à un refus de traitement en l'absence de « situation extrême mettant en jeu un pronostic vital ». En revanche, dans une telle situation où le pronostic vital est engagé, la transfusion est licite mais le médecin doit d'abord avoir tout mis en oeuvre pour convaincre le malade d'accepter les soins indispensables et s'être assuré que l'acte était proportionné et indispensable à la survie de l'intéressé. Au total il n'est pas démontré que la décision citée, liée aux circonstances particulières dans lesquelles elle a été rendue, fasse apparaître la nécessité de modifier la loi.

Données clés

Auteur : M. Jacques Myard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : santé

Ministère répondant : santé

Dates :
Question publiée le 23 septembre 2002
Réponse publiée le 18 novembre 2002

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