Question écrite n° 34683 :
multipropriété

12e Législature

Question de : M. Patrick Braouezec
Seine-Saint-Denis (2e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains

M. Patrick Braouezec appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les pratiques de nombreuses sociétés de vente et de revente de biens immobiliers à usage d'habitation en temps partagé, plus communément appelées timeshare. Les vacances en temps partagé sont des droits de jouissance, généralement décomptés en semaines, d'un logement situé dans un complexe résidentiel, à une période déterminée de l'année, Ainsi, pour un même logement, il y a plusieurs occupants sans que ces derniers aient la qualité de propriétaires, le bien immobilier demeurant la propriété de la société dont ils sont devenus associés. La plupart de ces sociétés sont espagnoles, anglaises ou américaines. La législation française, régie par la loi n° 98-566 du 8 juillet 1998 portant transposition de la directive 94/47/CEE du 26 octobre 1994, a pour objectif d'accroître la protection du consommateur : période de réflexion de sept jours, délai de rétractation de dix jours, sanctions pénales en cas de non-respect des règles par le vendeur. En outre, des sanctions pénales susceptibles d'être infligées aux professionnels complètent ce dispositif législatif qui a vocation à s'appliquer même si le bien est situé hors du territoire communautaire dès lors que l'acheteur réside en France ou qu'une partie au moins de la négociation ayant abouti à l'achat s'y déroule. Toutefois, de nombreux propriétaires, la plupart du temps modestes, ont été abusés par des sociétés, essentiellement situées en Espagne, proposant la revente. Ces sociétés « fantômes » réclament des frais de vente puis disparaissent. La législation ne semble pas être de nature à assurer une protection optimale aux consommateurs contre les nouvelles formes d'escroqueries qui se sont développées. De nombreuses plaintes ont été recensées par les instances européennes, notamment en France et en Espagne, mais le manque de coopération entre les justices des pays membres de l'Union européenne, les difficultés liées à l'opacité des sociétés de commercialisation de ces produits et les délais nécessaires à l'instruction de ces affaires de dimensions internationales, découragent les justiciables, qui ne sont que rarement indemnisés. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'il entend prendre afin de lutter contre ce phénomène et d'établir les conditions d'une coopération efficace entre les justices des pays membres de l'Union européenne qui permettent l'indemnisation des victimes de ce qu'en réponse à une précédente question, il a qualifié à juste titre « d'escroquerie d'envergure ».

Réponse publiée le 19 octobre 2004

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de rappeler à l'honorable parlementaire que la loi n° 98-566 du 8 juillet 1998, publiée au Journal officiel du 9 juillet 1998, a transposé dans le droit français la directive européenne 97/47/CE 1994 concernant la protection des acquéreurs pour certains aspects des contrats portant sur l'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers. Ce texte a pour objectif de protéger le consommateur en réglementant le contrat passé entre un professionnel et un consommateur, défini de façon suffisamment large pour englober toutes les formes juridiques qui peuvent s'appliquer aux hébergements mis sur le marché sous le régime du temps partagé. Afin de lutter plus efficacement contre ces pratiques, la chancellerie a récemment entrepris une opération de recensement des plaintes déposées auprès des parquets français en la matière pour favoriser autant que faire se peut leur regroupement au niveau national. Ainsi, en juin 2004, plus de soixante sociétés, notamment de droit étranger, et des milliers de victimes ont été recensées. Une réunion avec les associations de défense des victimes de ces agissements va être prochainement organisée par les services de la chancellerie. En outre, des réunions ont eu lieu sous l'égide d'Eurojust afin de recenser les informations nécessaires susceptibles de conduire à une statégie de regroupement des procédures et des poursuites, cette concertation étant indispensable pour permettre une indemnisation des victimes concernées par cette escroquerie d'envergure. Cette intervention d'Eurojust a été facilitée par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, qui confère à cet organe de l'Union européenne le droit de demander, d'une part, aux procureurs généraux certains actes d'action publiques, et, d'autre part, aux autorités judiciaires des informations issues des procédures judiciaires. Par ailleurs, cette même loi a permis l'entrée en vigueur sur le territoire national du mandat d'arrêt européen, qui facilite et accélère, entre États membres de l'union européenne, les procédures de remise de personnes recherchées pour l'exercice de poursuites pénales ainsi que les dispositions de la décision cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002 relative aux équipes communes d'enquête. Tenant compte de l'évolution des pratiques du marché, des développements technologiques et de la capacité d'innovation des professionnels qui ont rendu inopérantes, au moins pour partie, les règles protectrices en vigueur, le Gouvernement poursuivra par ailleurs son action afin d'améliorer la protection des acheteurs d'un droit d'utilisation à temps partiel d'un bien immobilier et de faire évoluer la réglementation européenne.

Données clés

Auteur : M. Patrick Braouezec

Type de question : Question écrite

Rubrique : Propriété

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 2 mars 2004
Réponse publiée le 19 octobre 2004

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