prix
Question de :
M. Jean-Paul Bacquet
Puy-de-Dôme (4e circonscription) - Socialiste
M. Jean-Paul Bacquet souhaite appeler l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation alarmante qui touche le marché des matières premières. En effet, les industriels français, parmi lesquels les transformateurs et les équipementiers, font face actuellement à une pénurie inquiétante de matières premières, principalement d'acier. Cette tension provient, d'une part, de la forte croissance économique de la Chine qui absorbe à elle seule plus de 40 % de la production mondiale de charbon, 25 % de celle d'acier et de nickel, 19 % de celle d'aluminium. On assiste, d'autre part, à une insuffisance physique de matières premières et à des capacités de transport insuffisantes qui conduisent, à des distorsions flagrantes entre l'offre et la demande : ainsi la demande d'acier sera cette année d'au moins 30 millions de tonnes supérieure à l'offre. Nourrie également par la spéculation, l'explosion des prix sur le marché se fait gravement ressentir : + 30 % pour l'acier, + 80 % pour le coke, + 55 % pour le nickel. Cette situation place notre économie devant un goulet d'étranglement qui, par l'enchaînement mécanique de la hausse des prix, risque de mettre à mal la compétitivité de nos entreprises et de venir aggraver la situation de l'emploi. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre rapidement, seul ou en partenariat avec d'autres pays, pour intervenir sur le marché mondial des matières premières afin de ne pas rendre plus difficile encore une situation économique nationale déjà morose.
Réponse publiée le 22 mars 2005
L'augmentation du prix des matières premières, si elle touche uniformément tous les pays industriels, n'en constitue pas moins une charge supplémentaire lourde pour les industries utilisatrices. Ceci est particulièrement vrai pour l'acier dont l'usage est extrêmement répandu. L'augmentation des prix de l'acier est due à deux facteurs : la hausse de la demande, tirée par la Chine, et les tensions sur l'approvisionnement en matières premières nécessaires à l'industrie sidérurgique (fer, coke, ferrailles). Aucun de ces deux paramètres ne trouvera de solution rapide, et il faut s'attendre à supporter durablement des prix élevés de l'acier : la croissance de la Chine, bien que contrôlée par son gouvernement, est sans aucun doute durable, et l'augmentation de l'offre mondiale en matières premières nécessite des investissements lourds, tant pour ce qui concerne les capacités d'extraction que les infrastructures de transport dans les pays producteurs. Ces déséquilibres structurels ont conduit à des hausses continues du prix de l'acier depuis 2003 dans tous les pays du monde, avec cependant des disparités : l'Europe continue ainsi de bénéficier de prix, sensiblement moins élevés que dans la zone américaine et équivalents aujourd'hui à ceux pratiqués en Asie. Dans ce contexte, la France a tout d'abord mené des actions dans le domaine du commerce' international pour lever les barrières s'opposant à la circulation des matières premières et des produits finis. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a écrit au Commissaire européen chargé du commerce en avril 2004 pour attirer son attention sur la nécessité pour l'Europe d'agir résolument en ce sens. Depuis lors, chacune des pistes évoquées dans ce courrier a été explorée, avec plusieurs résultats notables, en particulier l'assouplissement du système de licences d'exportation de coke mis en place par la Chine, qui contribuait à la hausse très rapide des prix de cette matière. À l'été 2004, la Commission européenne a par exemple supprimé les droits antidumping sur les bobines à chaud. Toutes les possibilités d'action doivent être exploitées dans ce domaine. Il a par ailleurs été demandé aux services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie d'être extrêmement attentifs à l'exercice correct de la concurrence dans le secteur de la distribution d'acier en France. Cette vigilance, bien que nécessairement peu visible, est très importante pour éviter que des ententes ne se créent à l'occasion de la hausse des prix. Des actions ont également été menées dans le domaine des marchés publics, l'État se devant d'être un client exemplaire à l'égard de ses fournisseurs. La théorie de l'imprévision, qui veut que les marchés puissent être révisés en cas d'événements extérieurs imprévisibles bouleversant l'équilibre des contrats, a été rappelée aux services concernés. Le ministère de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer a envoyé une circulaire aux préfets en ce sens. Peu d'entreprises ont toutefois fait appel à cette possibilité pour l'instant. Enfin, le ministre délégué à l'industrie a organisé le 22 octobre dernier une table ronde consacrée spécifiquement à la filière automobile, au cours de laquelle les participants se sont engagés notamment sur la mise en chantier d'un tableau de bord des prix de l'acier et sur le principe d'une prise en compte de la hausse de l'acier le long de la chaîne de sous-traitance. Il est en effet primordial que les entreprises touchées par l'augmentation des prix aient la possibilité de répercuter cette charge, au moins partiellement, sur leurs clients. La France ne peut raisonnablement avoir l'ambition d'être le seul pays au monde à échapper à l'augmentation des prix de l'acier. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est cependant très attaché à ce que cette hausse ne soit pas l'occasion, pour un acteur économique ou pour un pays, de se constituer une rente de situation en utilisant des freins à la concurrence ou au libre commerce des marchandises, et à ce que les conséquences de cette évolution sur le tissu industriel français soient atténuées au maximum en utilisant tous les leviers d'action de l'État.
Auteur : M. Jean-Paul Bacquet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Matières premières
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Dates :
Question publiée le 20 avril 2004
Réponse publiée le 22 mars 2005