délinquance
Question de :
M. Jean-Claude Bois
Pas-de-Calais (13e circonscription) - Socialiste
De plus en plus de forfaits, et notamment des cambriolages, sont commis par des jeunes garçons et, plus couramment, aujourd'hui, par des jeunes filles. Ces délinquants sont souvent mineurs, quelquefois âgés seulement de quatorze ans, mais fréquemment récidivistes. On citera le cas d'une jeune fille de moins de quinze ans, originaire d'un pays de l'Est, interpellée vingt-six fois en moins d'un an. Comme le précise un policier « le fait que ces jeunes soient mineurs rend leur neutralisation compliquée ». Les mesures éducatives sont certes très difficiles à appliquer, mais il faut absolument persévérer dans ce domaine ou les améliorer pour les rendre plus efficientes. N'y a-t-il pas à ce propos un défaut de volonté à les utiliser ? Les réponses pénales, quant à elles, ne sont pas efficaces et le bilan aujourd'hui en est une preuve tangible : augmentation importante de la violence sur la personne. Dans le cadre d'une maîtrise concrète et réelle de là délinquance et ce dans l'intérêt des jeunes et de leur avenir, et compte tenu des coupes décidées par le ministre de l'économie à l'encontre de son ministère, M. Jean-Claude Bois demande à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, quelles solutions il envisage d'apporter à ce grave problème de société.
Réponse publiée le 5 avril 2005
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la prise en charge des mineurs les plus difficiles est aujourd'hui au coeur des préoccupations des pouvoirs publics et du ministère de la justice en particulier. Un des axes essentiels de la loi du 9 septembre 2002 était justement la diversification et le renforcement des réponses apportées aux mineurs multirécidivistes ou multiréitérants. Les principes qui régissent la justice des mineurs, fixés par l'ordonnance du 2 février 1945, restent prioritaires. D'ailleurs, à l'occasion du vote de la loi du 9 septembre 2002, le Conseil constitutionnel les a érigés en principes fondamentaux des lois de la République, et en particulier celui de la primauté des réponses éducatives sur les réponses répressives. C'est ainsi que la palette des réponses à la délinquance des mineurs, déjà très large, a été diversifiée, non pas pour systématiser la réponse répressive au détriment de la réponse éducative, mais au contraire pour mieux combiner sanction et éducation et permettre, à l'égard des mineurs multirécidivistes, une réponse pénale plus ferme et plus adéquate en même temps. Tels sont notamment les objectifs poursuivis par la création des centres éducatifs fermés et des sanctions éducatives. Les centres éducatifs fermés n'ont pas vocation à se substituer aux prises en charge traditionnelles mises en oeuvre par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ou par le secteur associatif habilité. Ils offrent au contraire une chance aux mineurs délinquants d'éviter l'incarcération dans le cadre, garanti par l'autorité judiciaire, d'un contrôle judiciaire, d'une mise à l'épreuve ou désormais d'une libération conditionnelle. La prise en charge éducative des mineurs en leur sein est particulièrement riche et s'appuie sur des équipes pluridisciplinaires, fortes et motivées. Onze centres éducatifs fèrmés fonctionnent à ce jour. Par ailleurs, outre les mesures éducatives et les peines, le tribunal pour enfants et la cour d'assises peuvent désormais prononcer à l'encontre des mineurs de dix à dix-huit ans des sanctions éducatives dont le non-respect peut entraîner une mesure de placement. Ces sanctions éducatives sont spécialement adaptées aux mineurs âgés de dix à treize ans ayant déjà fait l'objet de poursuites pénales et pour lesquels des mesures éducatives se sont montrées insuffisantes. Au nombre de celles-ci figure le stage de formation civique auquel se soumet le mineur dans le cadre de sessions collectives, composées elles-mêmes de différents modules, dont le contenu est garanti par la présence permanente d'un éducateur. Depuis la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité entrée en vigueur le 1er octobre 2004 sur ce point, le mineur de plus de treize ans peut se voir contraint de suivre un stage de citoyenneté à titre de peine, l'alternative étant l'emprisonnement en cas de non-respect des conditions du stage. Parallèlement à la création de ces nouvelles mesures, le Gouvernement veille au développement des mesures éducatives existantes et en particulier de celles qui apportent une réponse pluridisciplinaire aux comportements déviants. C'est ainsi par exemple que le nombre de mesures de réparation a augmenté de 300 % entre 1995 et 2003 (4 443/14 893). Enfin, le Gouvernement a souhaité que les mineurs en conflit avec la loi, y compris les plus difficiles, bénéficient d'une prise en charge éducative. C'est pour cette raison qu'il est prévu une intervention continue des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse auprès des mineurs détenus au sein des quartiers mineurs. À ce jour, dans 50 % des quartiers mineurs, les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse sont présents en continu auprès des mineurs. Le temps de la détention est aussi celui d'une prise en charge éducative et d'un travail sur les activités d'apprentissage et les relations familiales. Il s'agit enfin de mieux préparer la sortie par l'élaboration d'un projet individuel passant le cas échéant par un aménagement de peine. Par ailleurs, la loi d'orientation et de programmation pour la justice a prévu la création de sept établissements spécialisés pour mineurs de soixante places chacun. Les premiers établissements ouvriront leurs portes en vingt06. Ils accueilleront des mineurs prévenus ou condamnés. Conçus en unités de vie autonomes de dix cellules, ils comporteront un secteur d'activités scolaires et socio-éducatives, un quartier disciplinaire, un pôle parloirs, un centre médical, une salle de culte et une zone administrative. La dimension éducative de ces établissements s'exprimera tout au long du séjour en détention par : un accompagnement permanent du mineur par des adultes (en particulier surveillants et éducateurs) ; un suivi éducatif individualisé apportant une réponse aux difficultés en temps réel ; un rythme d'activités très dense (sept heures par jour sept jours sur sept) ; un temps d'encellulement très réduit (de 22 heures à sept heures) ; un accent fort mis sur la scolarité et la formation professionnelle (vingt heures par semaine) ; la pratique de sports ou d'activités physiques intensives (vingt heures par semaine) ; le développement des liens avec l'extérieur (familles, professionnels de l'insertion en droit commun...). La diversification des solutions éducatives conçues comme alternatives à la peine et le développement de la prise en charge éducative au sein même de la détention devraient être de nature à réduire le nombre et la durée des incarcérations prononcées à l'égard des mineurs. En effet, depuis la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, on constate une diminution du nombre de mineurs incarcérés (932 au 1er mai 2002, 637 au 1er mars 2005), et plus généralement un tassement de la délinquance. Le transfert opéré par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, des compétences du juge de l'application des peines au juge des enfants, est par ailleurs de nature à permettre à la justice des mineurs de s'adapter mieux encore à la spécificité de son public. Ce transfert des compétences, effectif depuis le 1er janvier 2005, garantit notamment aux mineurs une cohérence de la réponse judiciaire tout au long de leur parcours. En effet c'est le même service, celui de la protection judiciaire de la jeunesse, qui assure le suivi du mineur sous main de justice et qui est à même de proposer les solutions les plus adaptées à sa personnalité.
Auteur : M. Jean-Claude Bois
Type de question : Question écrite
Rubrique : Jeunes
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 11 mai 2004
Réponse publiée le 5 avril 2005