Question écrite n° 40313 :
lycées

12e Législature

Question de : M. Patrick Roy
Nord (19e circonscription) - Socialiste

M. Patrick Roy appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la publication par le ministère de l'éducation et par la presse de classements des meilleurs lycées. Ces palmarès ouvrent malheureusement la voie à une logique de concurrence entre les établissements, à l'origine d'une logique de discrimination entre les élèves. En effet, afin de figurer aux plus hauts rangs de ces palmarès, certains lycées pratiquent une politique de sélection intensive, que ce soit lors de l'entrée en seconde ou lors du passage dans la classe supérieure. Or les élèves acceptés par ces établissements, qui sont donc les élèves les plus brillants, sont le plus souvent issus de milieux sociaux aisés. Les élèves de moins bon niveau, contraints de s'orienter vers les lycées moins réputés, sont d'origine sociale moins favorisée. Si le critère discriminant utilisé par les établissements est la réussite scolaire, de fait, la sélection des élèves est opérée en fonction de l'origine sociale. Compte tenu de ces considérations, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si le Gouvernement entend s'attaquer aux effets nocifs de la publication de ces classements, notamment par l'application de la loi d'orientation sur l'éducation de 1989 incitant à une plus grande rigueur dans les procédures d'évaluation des lycées, par la prise en compte du taux de sélection pratiqué par les proviseurs.

Réponse publiée le 17 août 2004

En publiant chaque année des indicateurs de résultats des lycées, le ministère a pour objectif de rendre compte des résultats du service public national d'éducation et de donner aux responsables de ces établissements et aux enseignants des outils qui les aident à améliorer l'efficacité de leurs actions. Ces indicateurs donnent une mesure des résultats des lycées en prenant en compte les phénomènes de sélection au cours du second cycle et les caractéristiques socio-démographiques des élèves. Parents d'élèves, personnels de l'éducation nationale, journalistes, de nombreux acteurs publics et privés se demandent comment évaluer l'action propre d'un lycée, ce qu'il ajoute au niveau initial des élèves qu'il a reçus. En d'autres termes, quand un lycée présente ce qui est communément appelé « de bons résultats », est-ce parce qu'il a reçu de bons élèves, dotés de bonnes méthodes de travail, qui ont pu obtenir le baccalauréat sans effort particulier de sa part, ou bien est-ce dû au fait qu'il a su, tout au long d'une scolarité, développer chez des élèves peut-être moins bien dotés au départ les connaissances et les capacités qui ont permis leur succès ? C'est pour donner de premiers éléments de réponse à cette question délicate, que le ministère publie chaque année des indicateurs de résultats. Question délicate car il n'y a pas de conception unique de ce qui pourrait être appelé « de bons résultats pour un lycée ». En effet, quels critères retenir pour apprécier les résultats d'un établissement ? En cette matière, les objectifs des lycéens et de leurs parents peuvent être différents. Certains privilégieront l'obtention de telle série du bac et seront alors disposés à accepter un redoublement ou à changer d'établissement ; d'autres souhaiteront effectuer toute leur scolarité dans le même lycée ; d'autres, encore, désireront obtenir un baccalauréat le plus rapidement possible. Un palmarès ou un classement des lycées n'a donc guère de sens général, et l'on pourrait imaginer une multiplicité d'indicateurs rendant compte de ce que recherchent les uns ou les autres. En conséquence, le ministère retient deux principes pour l'édition de ces indicateurs : donner des points de vue complémentaires sur les résultats des lycées en publiant notamment le taux de réussite de leurs élèves au baccalauréat et le taux d'accès de ceux-ci à ce même baccalauréat. Le taux d'accès mesure la probabilité qu'un élève entrant en seconde dans un lycée obtienne le baccalauréat à l'issue d'une scolarité entièrement effectuée dans celui-ci, et ceci au prix, d'un voire même de plusieurs redoublements. Pour ce taux d'accès au baccalauréat, le rapport est calculé compte tenu de l'offre de formation du lycée afin de ne pas pénaliser ceux qui, proposant à leurs élèves un éventail étroit de séries au baccalauréat, sont moins armés que d'autres pour conduire tous leurs élèves de seconde au baccalauréat et voient certains de ceux-ci les quitter pour préparer dans un autre lycée le baccalauréat d'une série qu'ils ne proposent pas. Le premier indicateur mesure la réussite « instantanée » au baccalauréat des élèves de terminale, le second s'intéresse à toute la scolarité dans un lycée donné et valorise, de la même façon, le baccalauréat réussi « du premier coup » et celui obtenu après un ou plusieurs redoublements ; proposer une appréciation relative de l'apport de ces établissements, en tenant compte des caractéristiques de leurs élèves et en raisonnant en termes de « valeur ajoutée ». Ainsi, on ne s'intéresse pas à la valeur brute de ces indicateurs mais au rapport de celle-ci à un taux attendu qui simule, pour chaque lycée, ce qu'aurait été la réussite ou l'accès au baccalauréat de ses élèves s'ils y avaient réussi ou accédé, en moyenne, comme les élèves de mêmes âge et catégorie sociale de l'ensemble des lycées de France. Considérer ces rapports permet une appréciation relative de la performance de chaque lycée, en éliminant les deux facteurs de réussite externes au lycée que sont les caractéristiques sociales et surtout scolaires (l'âge rendant compte du retard des élèves qui ont redoublé) des élèves qu'il accueille : un rapport supérieur à 100 incite à penser que le lycée a permis à ses élèves de réussir ou d'accéder au baccalauréat mieux que dans un lycée aux performances moyennes ; un rapport inférieur à 100 conduit à la présomption inverse. L'appréciation de la « valeur ajoutée » des lycées est relative et non pas absolue. Un rapport inférieur à 100 ne veut pas dire que le lycée serait inefficace - et a fortiori que les élèves y « désapprendraient » - mais simplement qu'il semble moins efficace que d'autres, quel que soit le public qu'il accueille. Le mode de calcul actuellement retenu ne permet pas de tenir compte de la sélection possible pour certains lycées qui peuvent recruter les élèves ayant les meilleurs dossiers scolaires parmi ceux ayant le même âge et la même origine sociale. Ils pourront, de ce fait, apparaître comme relativement performants, tout en n'ayant pas apporté à leurs élèves plus qu'ils n'auraient reçu dans un lycée moyen. Des investissements sont en cours pour étudier s'il est possible de tenir compte et de calculer un indice de sélection des dossiers des entrants au lycée de mêmes âge et origine sociale.

Données clés

Auteur : M. Patrick Roy

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : éducation nationale

Ministère répondant : éducation nationale

Dates :
Question publiée le 1er juin 2004
Réponse publiée le 17 août 2004

partager