oeuvres d'art
Question de :
M. Noël Mamère
Gironde (3e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
M. Noël Mamère attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la spoliation des oeuvres d'art par les nazis pendant la seconde Guerre mondiale. Malgré la loi du 4 janvier 2002, cette question n'est pas close. C'est ainsi que le 18 juin dernier, le tribunal de grande instance de Paris a procédé à la restitution d'une importante toile de Sisley aux ayants droit d'une famille française spoliée. La peinture, qui avait été confiée en 1939 à l'ambassadeur d'Argentine à Paris avait été volée en 1942 par les forces d'Occupation, et n'a été retrouvée au Japon qu'en 1985 lors d'une exposition consacrée au peintre. Mais il n'y a pas qu'à l'étranger que des toiles volées sont retrouvées, il en existe dans les collections privées et publiques françaises. Or, une loi votée par le Parlement le 4 janvier 2002, relative aux musées de France, ne manque pas d'inquiéter les ayants droit des familles spoliées pendant l'Occupation. Son article 11 précise en effet que les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont à ce titre inaliénables. Il ne faudrait pas que cette loi, dont l'économie est par ailleurs légitime, puisse être comprise comme constituant un obstacle à la restitution d'oeuvres volées pendant l'Occupation et qui pourraient se trouver dans des collections des musées de France, soit par dons, legs ou acquisitions. Il convient en effet de rappeler que l'ensemble des dispositions des ordonnances de 1945 sur la nullité des actes de spoliation sont d'ordre public et insusceptibles de dérogation. Il lui demande en conséquence de bien vouloir prendre les mesures qui s'impose pour clarifier la situation juridique créée par l'article 11 de la loi du 4 janvier 2002 afin de permettre aux familles spoliées par les nazis de recouvrir leurs biens.
Réponse publiée le 5 octobre 2004
L'honorable parlementaire craint que l'article 11 de la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France ne constitue un obstacle juridique à la restitution d'oeuvres, spoliées par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, qui pourraient se trouver dans les collections des musées de France soit par dons, legs ou acquisitions. L'article L. 451-5 du code du patrimoine, issu de l'article 11 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 1922 relative aux musées de France, dispose que « les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont, à ce titre, inaliénables ». La disposition législative précitée a pour objet de rappeler le principe du caractère inaliénable des biens du domaine public fixé à l'article 52 du code du domaine de l'État. Au demeurant, et à supposer que des oeuvres d'art appartenant aux collections publiques aient fait l'objet d'actes de spoliation commis durant la Seconde Guerre mondiale, la disposition précitée ne met pas d'obstacle juridique aux demandes en restitution d'oeuvres formées par les ayants droit des victimes de spoliations dans les conditions du droit commun et, en particulier, de l'ordonnance, toujours en vigueur, n° 45-770 du 21 avril 1945 portant deuxième application de l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle et édictant la restitution aux victimes de ces actes de ceux de leurs biens qui ont fait l'objet d'actes de disposition. L'exécution d'une décision de restitution d'une oeuvre du domaine public implique une décision de déclassement de l'oeuvre dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 451-5 du code du patrimoine. Dans ces conditions, il apparaît que l'article L. 451-5 du code du patrimoine n'interdit pas les décisions de restitution d'oeuvres appartenant aux collections publiques qui se révéleraient avoir été spoliées pendant la Seconde Guerre mondiale et sur lesquelles les ayants droit des victimes justifieraient de leur droit à restitution. Par ailleurs, il convient de rappeler que les oeuvres d'art récupérées par les Forces alliées en Allemagne et restituées à la France sont détenues par l'État français qui n'exerce aucun droit de propriétaire sur ces oeuvres. Ces dernières confiées à certains musées nationaux n'appartiennent donc pas au domaine public de l'État et figurent dans des inventaires spécifiques. En qualité de gardien de ces oeuvres, l'État les conserve pour le compte des ayants droit des victimes de spoliations et les restitue à leurs légitimes propriétaires.
Auteur : M. Noël Mamère
Type de question : Question écrite
Rubrique : Patrimoine culturel
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Dates :
Question publiée le 20 juillet 2004
Réponse publiée le 5 octobre 2004