Question écrite n° 44988 :
mariage

12e Législature

Question de : M. Gabriel Biancheri
Drôme (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Gabriel Biancheri appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales , à propos de la situation des maires confrontés au problème latent du mariage « blanc ». Malgré la récente adoption de la loi n° 2003-119 du 26 novembre 2003, des mariages blancs continuent d'être célébrés par des officiers d'état civil, ce qui facilite l'immigration clandestine sur notre territoire. Afin d'enregistrer et de procéder à un mariage, les seuls documents à ce jour demandés sont un acte de naissance de chacun des futurs époux et un justificatif de domicile, et en aucun cas un titre de séjour en cours de validité pour les étrangers. Le certificat de mariage obtenu est un document précieux en vue de l'acquisition d'un titre de séjour, voire de la nationalité française. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il entend mettre à disposition des maires et des services d'état civil afin que ceux-ci puissent demander les documents nécessaires pour établir la régularité des étrangers sur notre territoire et s'il envisage une collaboration plus étroite entre les services d'état civil et les services « étrangers » des préfectures.

Réponse publiée le 8 février 2005

Le Conseil constitutionnel a jugé que la régularité du séjour ne pouvait constituer en elle-même une condition préalable à la célébration du mariage, sous peine de porter une atteinte disproportionnée au principe de la liberté du mariage, consacré par les articles 12 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales. La carte de séjour ne peut, en conséquence, figurer au nombre des pièces requises par l'officier de l'état civil lors des formalités préalables à la célébration du mariage d'un ressortissant étranger. À ce titre, si le Conseil constitutionnel considère que le fait pour un étranger de ne pouvoir justifier de la régularité de son séjour ne pouvait dans tous les cas constituer l'indice exclusif de l'absence de consentement au mariage, il a admis clairement que le caractère irrégulier du séjour d'un étranger, rapporté à d'autres éléments du dossier, constituait un indice d'un mariage de complaisance. La loi n° 2003-119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité (MISEFEN) a introduit un certain nombre de dispositions qui visent à rendre plus efficace le dispositif de lutte contre les mariages frauduleux ou de complaisance qui peuvent être conclus par des étrangers dépourvus de titre de séjour. En premier lieu, la loi MISEFEN prévoit l'obligation, pour les officiers de l'état civil, préalablement à toute célébration d'un mariage, de s'entretenir ensemble, voire séparément avec les futurs époux. Cet entretien préalable permet aux officiers de l'état civil d'identifier plus en amont les indices des mariages de complaisance et de saisir, si ces indices existent, le procureur de la République. En deuxième lieu, la loi MISEFEN prévoit que le procureur de la République sera tenu, dans les quinze jours de sa saisine, de faire connaître sa décision (laisser procéder au mariage, faire opposition à celui-ci ou décider qu'il sera sursis à sa célébration dans l'attente des résultats de l'enquête à laquelle il fera procéder) à l'officier de l'état civil et aux intéressés et de la justifier. La durée du sursis, qui ne pouvait excéder auparavant un mois, est désormais renouvelable. À l'expiration du sursis, le procureur de la République fera connaître à l'officier de l'état civil, par une décision de nouveau motivée, s'il laisse procéder au mariage ou s'il s'oppose à sa célébration. Ces dispositions confèrent donc aux maires, en leur qualité d'officier de l'état civil, une possibilité d'action renforcée lorsqu'ils sont en présence d'indices sérieux présumant l'existence d'un mariage de complaisance, et permettent à l'autorité judiciaire de procéder de manière plus approfondie aux enquêtes et vérifications qui permettront d'établir la réalité de la manoeuvre frauduleuse dont elle serait saisie. En troisième lieu, la loi MISEFEN prévoit que la carte de résident ne sera désormais délivrée qu'au terme d'un délai de deux années de vie commune. Les règles relatives à l'acquisition de la nationalité par mariage ont été également renforcées, rendant le mariage avec un Français moins attractif pour ceux qui n'y voient que la possibilité d'accéder au séjour en France et à la nationalité. Enfin, la loi nouvelle a institué un délit spécifique de participation à un mariage de complaisance ou d'organisation d'un tel mariage. Le fait de contracter ou d'organiser un mariage aux seules fins d'obtenir, ou faire obtenir, un titre de séjour ou aux seules fins d'acquérir ou de faire acquérir la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Il doit être précisé que ni la condamnation pénale au titre de l'infraction de mariage de complaisance, ni l'annulation du mariage pour absence de consentement en application de l'article 146 du code civil ne sont un préalable nécessaire à la faculté reconnue aux préfets de refuser ou de retirer un titre de séjour à un étranger dont le caractère frauduleux du mariage est établi par l'administration. Conformément à la théorie jurisprudentielle de la fraude, qui permet à l'administration de remettre en cause à tout moment un droit obtenu par un administré de façon frauduleuse, le droit au séjour qui aurait été reconnu à un étranger sur la base d'une fraude perd sa validité. Une mesure de reconduite à la frontière peut être prononcée et exécutée par le préfet à l'encontre d'un ressortissant étranger convaincu de telles manoeuvres. La protection contre l'éloignement prévue par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en faveur des étrangers mariés depuis au moins deux ans avec une personne de nationalité française ne pourra pas jouer en cas de fraude au mariage avérée. Par ailleurs, le préfet peut, lorsque le mariage est célébré, refuser la délivrance d'un titre de séjour si l'étranger ne justifie pas de la régularité de son entrée sur le territoire ou si la communauté de vie entre les époux n'est pas établie. Un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut en outre être prononcé et mis à exécution lorsqu'un étranger, entré ou séjournant irrégulièrement, ne justifie pas du maintien de la communauté de vie, quelle que soit l'ancienneté du mariage. L'ensemble de ces dispositions doit permettre de dissuader les étrangers qui auraient pour objectif de conclure un mariage aux seules fins d'obtenir la régularisation de leur situation au regard du séjour ou d'acquérir la nationalité française.

Données clés

Auteur : M. Gabriel Biancheri

Type de question : Question écrite

Rubrique : Famille

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Dates :
Question publiée le 3 août 2004
Réponse publiée le 8 février 2005

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