Question écrite n° 45989 :
établissements

12e Législature

Question de : M. François Loncle
Eure (4e circonscription) - Socialiste

M. François Loncle attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le problème ardent de la surpopulation carcérale qui atteint, en Haute-Normandie, le taux moyen de 140 %. En effet, à l'image d'une situation nationale sans précédent, les trois maisons d'arrêt haut-normandes atteignent des records en termes de taux d'occupation 226 % à Evreux, 136 % au Havre, 123 % à Rouen. De plus, une maison d'arrêt a théoriquement pour vocation d'accueillir des prévenus et des condamnés à moins d'un an de prison. Mais en réalité, elle héberge bien au-delà. Les transferts vers les centres de détention sont de plus en plus longs. Par exemple, un détenu condamné à dix-huit ans de prison en 1997 continue à attendre à la maison d'arrêt de Rouen son transfert pour le centre des Vignettes. Au sein de la prison rouennaise, les intervenants médicaux constatent chaque jour une détérioration des conditions de détention. Et le suivi social, médical et tout simplement humain des détenus paraît impossible dans une telle promiscuité et surcharge de travail sans augmentation d'effectifs. La réinsertion devient ainsi de plus en plus hypothétique. Le recours grandissant des juges à l'incarcération explique en grande partie cette situation. La pression policière de l'opinion publique se fait constante et pressante. Les détentions provisoires sont en grande augmentation, notamment dans le cadre de la comparution immédiate. La question du numerus clausus des incarcérations est posée compte tenu de la gravité de la situation. Aussi, il lui demande de lui apporter des précisions sur le plan d'urgence qu'il serait nécessaire de mettre en oeuvre en France et en Haute-Normandie dès maintenant pour rétablir des conditions de détention décentes et conformes à la Convention européenne des droits de l'homme.

Réponse publiée le 19 juillet 2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de porter à la connaissance de l'honorable parlementaire des éléments de réponse sur la situation de la population carcérale en Haute-Normandie. La surpopulation carcérale est une question qui n'est pas spécifique aux maisons d'arrêt de Haute-Normandie. Ainsi au 1er mai 2005, on comptait 59 563 détenus incarcérés dans les 189 établissements du territoire national, pour 51 312 places. Le taux d'occupation national moyen est donc à ce jour de 116,1 %. Les trois maisons d'arrêt de Haute-Normandie connaissent des taux d'occupation variables : s'il est vrai qu'Evreux connaît de grosses difficultés (283 détenus pour 150 places au 1er mai 2005), la situation est moins préoccupante à Rouen et au Havre qui se stabilisent avec des taux d'occupation aux alentours de 100 %. Très conscient de ce problème et des conséquences qu'il peut engendrer tant du point de vue de la sécurité que du respect de la dignité humaine, le garde des sceaux, ministre de la justice, et le secrétaire d'État aux programmes immobiliers de la justice ont présenté, le 21 novembre 2002, un programme de construction de nouvelles prisons. D'une ampleur sans précédent, ce plan prévoit de doter l'administration pénitentiaire de 13 200 nouvelles places dont 10 800 pour la construction de nouvelles prisons (9 200 en métropole et 1 600 outre-mer), 2 000 places réservées à l'application « d'une nouvelle conception de l'enfermement » et 400 places destinées à l'accueil des mineurs. C'est à terme plus de 25 établissements qui verront ainsi le jour, ce qui permettra non seulement de résorber la surpopulation carcérale mais aussi de rééquilibrer la carte pénitentiaire. La livraison des premiers établissements de ce programme est prévue en 2007. Dans ce cadre, un nouvel établissement sera construit au Havre. La délimitation de l'emprise foncière du terrain choisi est en cours d'achèvement. L'acquisition sera effective en 2006. En outre, la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité introduit de nouvelles dispositions destinées à relancer les alternatives à l'incarcération (travail d'intérêt général, sursis avec mise à l'épreuve, bracelet électronique...). Ces mesures, entrées en vigueur depuis le 1er octobre 2004, font suite aux préconisations du rapport de M. Jean-Luc Warsmann, député des Ardennes et vice-président de la commission des lois à l'Assemblée nationale, chargé par le Premier ministre, en avril 2003, de réfléchir sur les courtes peines de prison, les peines alternatives à l'incarcération et la préparation des détenus à la sortie. Ce nouveau dispositif est de nature à développer de manière conséquente les projets d'aménagement de peine et de diminuer les effectifs des établissements tout en favorisant la réinsertion des détenus. Le plan d'accroissement des capacités et la loi du 9 mars 2004 susvisée devraient permettre une meilleure individualisation des régimes de détention et ouvrent la possibilité aux détenus condamnés notamment à des courtes peines de construire un projet de sortie. Quant aux délais d'attente vers les établissements pour peines, il s'agit effectivement d'une difficulté prégnante pour les détenus condamnés à de longues peines. Auparavant, ils effectuaient systématiquement un passage au Centre national d'observation de Fresnes et y restaient jusqu'à leur transfert. Aujourd'hui, ce passage est évité lorsque le détenu a une idée précise de l'établissement sur lequel il souhaite partir, qu'il ne pose pas de problème disciplinaire et qu'il bénéficie des visites de sa famille. Dans ce cas, les détenus sont affectés directement à partir de leur établissement d'origine en établissement pour peines.

Données clés

Auteur : M. François Loncle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Système pénitentiaire

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 24 août 2004
Réponse publiée le 19 juillet 2005

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