Question écrite n° 46546 :
cormorans

12e Législature

Question de : M. Patrice Martin-Lalande
Loir-et-Cher (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Patrice Martin-Lalande * appelle, comme il l'avait fait auprès de ses prédécesseurs, l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les conséquences, pour l'État français, de la prolifération des cormorans ; le lourd préjudice supporté par la pisciculture et les activités halieutiques et la charge budgétaire que pourrait représenter pour les contribuables français la juste indemnisation de ce préjudice. Un certain nombre de pisciculteurs - dont plusieurs en Loir-et-Cher - qui avaient porté plainte contre l'État entre 1976, date de la directive européenne relative à la protection des cormorans, et 1993 lorsque l'État a accordé les premières autorisations de tir, viennent d'obtenir gain de cause par une décision de la cour d'appel de Bordeaux qui condamne l'État à les indemniser des dégâts causés par les cormorans. En effet, entre 1976 et 1993, l'État n'avait pris aucune disposition alors que la protection systématique avait manifestement des effets négatifs. Selon quel calendrier les pisciculteurs concernés par le jugement de la cour d'appel de Bordeaux seront-ils indemnisés ? De quelle manière les autres victimes de cette prolifération peuvent-elles faire valoir leurs droits et obtenir réparation du préjudice subi pendant cette période ? Depuis 1993, l'État a accordé les premières autorisations de tir permettant, dans certaines conditions, de réduire le préjudice ou de limiter sa croissance. Il y a manifestement disproportion entre les résultats obtenus grâce aux autorisations de tir et la prolifération galopante des cormorans. Depuis 1993, le préjudice n'est plus de 100 % mais, même s'il est dans une proportion légèrement inférieure, il atteint en valeur absolue des niveaux de préjudice bien plus élevés en raison de l'augmentation considérable de la prolifération. De plus, des petites colonies de cormorans adultes, accompagnés d'immatures, restent sur place au printemps, nidifient, se reproduisent et se sédentarisent. Cette nidification commence en avril, époque où les tirs sont prohibés. Seuls les services de l'État sont autorisés à intervenir. L'État compte-t-il réexaminer la demande d'autorisation de tir des pisciculteurs concernés qui, étant sur place, peuvent intervenir efficacement, évitant ainsi des déplacement inopportuns de certains agents de l'État ? Compte tenu de la décision de la cour d'appel de Bordeaux, l'État compte-t-il prendre en compte les demandes d'indemnisation pour la période intervenue depuis 1993 ? Plus généralement, il souhaite savoir de quelle manière l'État compte traiter les causes de ce problème en cherchant au niveau européen une régulation à la source de la population des cormorans et une révision du classement de cette espèce tenant compte de la réalité de son besoin actuel de protection.

Réponse publiée le 12 avril 2005

Le ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, des questions relatives aux mesures envisagées afin de réguler la prolifération des grands cormorans. La protection du grand cormoran, instituée à l'échelle de l'Europe à partir de 1979, participe à l'expansion de ses populations qui exercent une pression de plus en plus importante sur les eaux continentales. C'est pourquoi le ministère de l'écologie et du développement durable a engagé depuis 1992 une politique de gestion de cette espèce, visant à concilier la pérennité de l'espèce, la protection des intérêts économiques et celle du milieu aquatique. L'espèce grand cormoran est protégée au titre du régime général de protection de toutes les espèces d'oiseaux visées à l'article de la directive 79/409 relative à la conservation des oiseaux sauvages et de l'arrêté du 17 avril 1981 modifié fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire. Ces textes ont prévu la possibilité de procéder à la destruction de grands cormorans pour prévenir les dommages importants aux pêcheries ou pour la protection de la faune et de la flore, à la fois sur les piscicultures extensives en étang et sur les eaux libres. Le 7e recensement national des grands cormorans hivernant, réalisé en janvier 2003, fait état d'un effectif de 89 183 cormorans. La progression annuelle s'est fortement ralentie pour n'atteindre que 2,4 % d'augmentation annuelle depuis 2001, contre 7 % entre 1997 et 1999. La stabilisation de la population hivernante correspond largement à celle des effectifs nicheurs de la population Nord-Ouest européenne, qui fournit l'essentiel des hivernants français, population qui montre une courbe classique de régulation « densité-dépendance ». L'arrêté du 25 août 2003 a autorisé des quotas de prélèvement pour les saisons 2003 à 2005 en forte augmentation par rapport au dispositif précédent (globalement de + 26 %, soit plus de 30 000 oiseaux). En valeur absolue, on assiste à une réelle progression du nombre d'oiseaux prélevés : de 22 156 oiseaux au cours de l'hiver 2002/2003 à 25 239 au cours de l'hiver 2003/2004. Le taux de réalisation des tirs d'élimination n'a cependant pas été à la hauteur de l'augmentation autorisée. Ainsi le dispositif de gestion du grand cormoran, mis en oeuvre depuis plus de dix années, a été progressivement renforcé dans le sens demandé par les pisciculteurs et les pêcheurs. Comme le ministre de l'écologie et du développement durable s'y est engagé devant l'Assemblée nationale à l'occasion de l'examen de la loi sur le développement des territoires ruraux, il a fait préparer des mesures nouvelles pour améliorer la réalisation des prélèvements autorisés. Il s'agira tout d'abord de mutualiser les expériences réussies avec l'appui du Conseil supérieur de la pêche. Le ministre de l'écologie et du développement durable a déjà répondu favorablement aux demandes d'augmentation de quotas qui lui ont été présentées. Il examinera dans les mêmes dispositions celles qui lui parviendront. Il prépare l'élargissement à toute la France de la possibilité pour les pisciculteurs de réaliser des tirs jusqu'au 30 avril en cas d'alevinage ou de vidange tardifs. Par ailleurs, la zone de tir possible dans les eaux libres est en cours de révision pour offrir aux préfets une latitude dans la définition du périmètre d'accompagnement le long des rivières. Les moyens réglementaires existants doivent être également mieux employés. Notamment, il est souvent fait une interprétation trop restrictive de la possibilité de tirer les cormorans par des chasseurs autres que des gardes assermentés. Il faut aussi éviter des retards d'ouverture de la période de tir dans toute la période réglementairement possible. Le ministre de l'écologie et du développement durable rappellera l'ensemble de ces dispositions aux préfets. De plus, s'agissant d'une espèce migratrice, la France cherchera à développer la coordination du suivi des populations et de leur gestion entre les Etats membres de l'Union européenne concernés.

Données clés

Auteur : M. Patrice Martin-Lalande

Type de question : Question écrite

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 14 septembre 2004
Réponse publiée le 12 avril 2005

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