Question écrite n° 46555 :
viticulture

12e Législature

Question de : M. Arnaud Montebourg
Saône-et-Loire (6e circonscription) - Socialiste

M. Arnaud Montebourg appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur les préoccupations exprimées par la profession viticole s'agissant de la fiscalité agricole. La loi de finances pour 2004 a réformé les mécanismes de la déduction pour investissements (DPI) et de la déduction pour aléas (DPA), en permettant aux agriculteurs de cumuler ces deux déductions sur un même exercice. L'article 72 ter du code général des impôts prévoit toutefois un plafond unique et commun pour ces deux dispositifs, bien qu'ils soient distincts. En effet, la DPA a pour objectif la constitution d'une réserve de trésorerie en cas d'aléa, qu'il soit « d'ordre climatique, sanitaire, familial ou économique ». La DPI peut être utilisée pour « l'acquisition ou la création d'immobilisation amortissable, strictement nécessaire à l'activité, l'acquisition ou la production de stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an, ou encore l'acquisition de parts de sociétés ou coopératives agricoles ». Les plafonds auxquels sont soumis la DPI et de la DPA cumulés sont trop peu importants, eu égard aux investissements lourds qu'une exploitation agricole supporte. Par ailleurs, la profession souhaite vivement voir se mettre en oeuvre une réserve d'autofinancement, inscrite à l'actif du bilan de l'exploitation et qui puisse être exonérée de cotisations sociales, au cours de la période pendant laquelle elle n'est pas utilisée. Elle pourrait être soumise aux cotisations sociales lors de sa réintégration dans le bénéfice. D'autre part, les représentants de la profession viticole souhaitent que les aides, dont ils bénéficient dans le cadre des indemnités du fonds national de garantie contre les calamités agricoles, soient intégrables à l'exercice comptable sur lequel les conséquences de la perte de récolte sont perceptibles. En effet, les indemnités du fonds national de garantie contre les calamités agricoles sont intégrées fiscalement sur l'exercice en cours. Dans le secteur viticole, eu égard au décalage existant entre la récolte et la vente du produit fini, ces indemnités s'ajoutent à un résultat d'exploitation d'une année non sinistrée au regard des volumes de produits finis. Ainsi, l'imposition fiscale et sociale sera d'autant plus importante sur cet exercice, alors que les pertes auront un impact sur les exercices suivants, qui se trouveront déficitaires. La profession interroge le Gouvernement sur les conditions dans lesquelles il lui serait possible de provisionner ces indemnités liées à des pertes de récolte, en vue de les réintégrer sur l'exercice comptable suivant, afin qu'elles compensent effectivement les pertes de revenus. Ainsi, il lui demande de bien vouloir considérer les attentes ainsi exprimées et de lui apporter des précisions sur les dispositions que le Gouvernement entend adopter dans ce dossier.

Réponse publiée le 11 janvier 2005

La déduction pour investissement offre la possibilité aux exploitants agricoles, relevant d'un régime réel d'imposition, de déduire chaque année une fraction de leur bénéfice en vue de financer dans les cinq ans qui suivent soit leurs stocks, soit leurs immobilisations amortissables, soit des parts de sociétés coopératives agricoles. Dans ces deux derniers cas, la déduction n'est qu'un simple avantage de trésorerie. La déduction pour aléas, mise en place par la loi de finances pour 2002, permet sur option aux exploitants agricoles, relevant d'un régime réel d'imposition et qui ont souscrit un contrat d'assurance pour leur exploitation, de déduire annuellement une fraction de leur bénéfice à la condition qu'ils affectent à un compte ouvert auprès d'un établissement de crédit une somme au moins égale au montant de la déduction. Les sommes épargnées, qui devront être inscrites à l'actif du bilan, pourront être utilisées en cas d'intervention d'un aléa climatique, économique, sanitaire ou social. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004, la loi de finances pour 2004 a permis le cumul, jusqu'alors interdit, des déductions précitées. Pratiquement, cette modification, d'une part, traduit un recentrage de la déduction pour investissement et de la déduction pour aléas sur leurs objectifs respectifs de soutien à l'investissement et de constitution d'une épargne de précaution, d'autre part, accorde le bénéfice de ces régimes concurremment dans la limite d'un plafond commun fixé à 21 200 euros au maximum, soit une déduction globale possible de 106 000 euros au terme de cinq exercices. L'exploitant agricole peut pratiquer simultanément l'une et l'autre des déductions. Ainsi, dans le cas où il choisit de pratiquer une seule des déductions, l'exploitant bénéficie de la totalité du plafond au titre de ce dispositif. Dans le cas ou il pratique les deux déductions, il est libre de ventiler entre l'un et l'autre de ces dispositifs son droit à déduction plafonné. Il est par ailleurs rappelé à l'honorable parlementaire que le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux prévoit, en cas de mutation à titre gratuit et de continuation de l'exploitation par le conjoint survivant ou par un ou plusieurs héritiers, que la déduction pour investissement ou la déduction pour aléas opérée, moins de cinq ans auparavant et non encore affectée, ne sera pas réintégrée sous réserve de reprise des engagements du cédant. En outre, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2005, une disposition a été adoptée, avec l'accord du Gouvernement, qui prévoit de porter de cinq à sept ans le délai pendant lequel les sommes déposées sur un compte au titre de la déduction pour aléas peuvent être utilisées en cas d'intervention d'un aléa. Par ailleurs, afin d'aider les exploitants à faire face plus spécifiquement aux variations des prix de l'énergie, il est prévu d'adjoindre à la liste, fixée par décret, des aléas autorisant la mobilisation de la déduction pour aléas, l'augmentation de plus de 5 % du coût de l'énergie par rapport au prix moyen de l'année précédente. S'agissant de la création d'une réserve pour autofinancement, une telle mesure constituerait un pur produit de défiscalisation partielle du revenu en faveur des seules entreprises agricoles, sans aucune contrepartie en termes économiques ou d'emploi. Concernant les indemnités d'assurance perçues à la suite d'un sinistre, elles constituent pour les exploitants agricoles assujettis à un régime réel un produit imposable, dès lors qu'elles ont pour objet de compenser des charges ou des pertes déductibles par nature, ainsi que des pertes de recettes taxables. Leur imposition ne pénalise pas l'exploitant, dès lors que celui-ci constate parallèlement une diminution du résultat de son exploitation liée à un surcroît des charges. Cela dit, de manière à éviter un ressaut d'imposition lorsque ces aides s'ajoutent à un résultat d'exploitation d'une année non sinistrée, les exploitants ont la possibilité de demander à bénéficier du régime d'atténuation des recettes exceptionnelles prévu à l'article 163 OA du code général des impôts. Ce dispositif, le système du quotient, s'applique sous certaines conditions aux revenus exceptionnels ou différés imposés d'après le barème progressif de l'impôt sur le revenu. Il permet d'éviter que la progressivité de l'impôt n'aboutisse à soumettre ces revenus à une imposition excessive. Si l'exploitant est au forfait, son bénéfice forfaitaire est réputé tenir compte de toutes les recettes de l'exploitation. Enfin, par principe, une provision ne peut être déduite des résultats d'un exercice que si la perte ou la charge qu'elle a pour objet de couvrir résulte d'événements survenus au cours de cet exercice. La constitution de réserves pour faire face à des calamités agricoles futures éventuelles, qui s'analyse en des provisions de propre assureur, ne peut donc donner lieu à déduction.

Données clés

Auteur : M. Arnaud Montebourg

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche

Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche

Dates :
Question publiée le 14 septembre 2004
Réponse publiée le 11 janvier 2005

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