Question écrite n° 46625 :
médecine

12e Législature

Question de : M. Christian Estrosi
Alpes-Maritimes (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Christian Estrosi attire l'attention de M. le ministre délégué à la recherche sur la somnolence des conducteurs et l'impact accidentogène de l'hypovigilance au volant. Si les chercheurs privilégient aujourd'hui trois pistes majeures (maladies du sommeil, épidémiologie et mécanismes de l'hypovigilance), et si l'ensemble de leurs travaux ont déjà permis des progrès patents, de nombreux points restent encore à élucider, comme la compréhension des vulnérabilités individuelles à la privation de sommeil. Par conséquent, il souhaite savoir de quelle façon il entend développer de telles recherches.

Réponse publiée le 1er février 2005

Ces dernières années, la recherche dans le domaine des activités humaines à risque dans les transports (air, rail, route), pour les thèmes relevant du domaine médical et pour ceux relevant de l'étude du comportement avec des sujets liés à la monotonie et la fatigue, était très dispersée. Les progrès réalisés dans les vingt dernières années permettent aujourd'hui de mieux cibler les causes et conséquences possibles des troubles du sommeil sur la vigilance et les performances. Des causes organiques, pharmacologiques et comportementales sont maintenant clairement identifiées. Depuis cette année, et à l'initiative des groupes opérationnels 3 et 4 du Programme national de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT), un réseau de chercheurs se met en place afin de fédérer les efforts de recherche des différents instituts, parmi lesquels on trouve notamment le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) et l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Les sujets traités s'organisent en deux sous-ensembles : l'étude fondamentale des mécanismes de la vigilance, chez le sujet sain mais aussi chez les personnes souffrant de certaines pathologies, au premier rang desquelles l'apnée du sommeil très répandue dans la population, souvent à l'insu des intéressés. Les facteurs de dégradation sont la privation plus ou moins sévère de sommeil, la fatigue, la perturbation des rythmes circadiens, les drogues, les médicaments, l'alcool. Les personnes âgées constituent une population particulièrement vulnérable. Les conséquences peuvent se traduire par des altérations des fonctions perceptives et cognitives ou aller jusqu'à l'endormissement total ; la psychophysiopathogénie des distracteurs et des processus d'orientation et de maintien d'attention dans les activités humaines à risque, avec des phénomènes de compétition entre attracteurs. Outre les facteurs classiques de distraction, la multi-activité (téléphoner en conduisant) ou la multiplication des systèmes d'information posent le problème du traitement de ces informations et de leur effet sur la tâche principale. À l'inverse, une automatisation trop poussée peut engendrer des baisses d'attention et même de vigilance. Si les enquêtes épidémiologiques ont clairement fourni la part de risque attribuable à la somnolence au volant, les effets de la somnolence diurne sur la conduite automobile et les performances restent à approfondir afin d'identifier les critères comportementaux et les déterminants physiologiques qui vont expliquer les modifications de l'aptitude à la conduite automobile d'un individu à l'autre. La mise en place d'une unité mixte de recherche dont les travaux porteront sur ces sujets permettra d'améliorer les connaissances sur l'impact de la privation de sommeil aiguë ou chronique sur la conduite automobile, les performances et les fonctions cognitives en s'intéressant plus particulièrement aux réponses inter-individuelles ; de mesurer l'aptitude à la conduite automobile chez des patients présentant des troubles du sommeil et/ou de la vigilance ; d'étudier l'effet des médicaments sur la conduite automobile chez les sujets sains et traités ; de comparer l'impact de la somnolence sur la conduite réelle ou simulée. Seule une démarche physiologique et physiopathologique expérimentale pourra nous fournir les bases de compréhension des phénomènes à recherche en épidémiologie de l'accidentologie. Ce constat a débouché sur la création d'un réseau de recherche CNRS, INRETS, réseau sommeil-éveil-attention et transport (RESAT) qui va renforcer les liens entre les équipes existantes et permettre l'émergence de nouvelles structures de recherche. À ce jour, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) ne possède pas de critère précis d'évaluation des effets secondaires des médicaments sur la vigilance. En particulier, l'apposition du pictogramme est essentiellement conditionnée par une évaluation du dossier fourni par les laboratoires pharmaceutiques au moment de l'autorisation de mise sur le marché, laissé à leur libre appréciation. Si certaines entreprises ont fait l'effort de réaliser des protocoles en conduite réelle pour démontrer l'innocuité de leur médicament comme cela a été le cas pour certaines molécules antihistaminiques, d'autres molécules n'ont jamais été testées sur l'aptitude à la conduite et sont cataloguées dangereuses sans que l'on ait d'informations précises dans ce domaine. À la demande de l'AFSSAPS, un groupe de travail a été constitué pour réfléchir au problème et amener des solutions pragmatiques (cf. Journal officiel de la République française du 17 août 2004). L'objet de ce groupe est d'améliorer la connaissance des risques liés au médicament et de promouvoir le bon usage du médicament. La mise en place de protocoles d'évaluations à base de tests neuro-cognitifs, validés internationalement et reconductibles, permettrait de quantifier précisément l'impact de ces molécules à la fois sur des sujets sains, comme c'est le plus souvent le cas, mais également sur des sujets malades pour qui il est indispensable d'évaluer l'enjeu bénéfice-effets secondaires.

Données clés

Auteur : M. Christian Estrosi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Recherche

Ministère interrogé : recherche

Ministère répondant : recherche

Dates :
Question publiée le 14 septembre 2004
Réponse publiée le 1er février 2005

partager