Question écrite n° 50371 :
débits de tabac

12e Législature

Question de : M. Alain Merly
Lot-et-Garonne (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Alain Merly appelle l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur les conséquences néfastes liées aux achats transfrontaliers de cigarettes sur le réseau des buralistes français. Les augmentations du prix des cigarettes ces deux dernières années ont provoqué une baisse importante de la consommation. On peut néanmoins constater de grosses différences par rapport aux chutes des ventes de cigarettes selon la situation géographique des départements et des régions : la baisse atteint 19 % dans le Centre et en Bretagne, mais culmine à 45 % dans les Pyrénées-Orientales ou en Moselle. Or, les articles 8 et 9 de la directive 92/12/CEE du Conseil européen du 25 février 1992 stipulent que les produits soumis à accises (les tabacs entrent dans cette catégorie), acquis par les particuliers pour leurs besoins propres et transportés par eux-mêmes, circulent librement. Les droits d'accises demeurent prélevés dans l'État membre où ces produits sont achetés. Lorsque ces conditions sont réunies, il est possible de transporter en quantité illimitée des cigarettes. Un dispositif limitant le transport du tabac par les particuliers constituerait certainement une mesure salutaire pour un grand nombre de nos buralistes. De plus, les douanes pourraient lutter plus efficacement contre le développement des marchés parallèles. En conséquence, il souhaite connaître l'état de sa réflexion sur ce dossier et les mesures qu'elle pense proposer lors des futures discussions avec nos partenaires européens.

Réponse publiée le 1er février 2005

La lutte contre le tabagisme est l'une des priorités du Président de la République et du Gouvernement en matière de santé publique. Pour autant, le Gouvernement est sensible à l'impact des mesures de lutte contre le tabagisme pour le commerce de proximité, tout particulièrement dans les zones frontalières. Le dispositif communautaire concernant le commerce de tabac établit un équilibre délicat entre la liberté de commerce garantie dans le cadre du marché intérieur et les politiques nationales de lutte contre le tabagisme. Le Gouvernement considère que cet équilibre est aujourd'hui insatisfaisant. En effet, les directives communautaires, en définissant un niveau minimum d'accises, n'interdisent pas aux États membres d'utiliser la fiscalité pour poursuivre les objectifs de santé publique qu'ils se sont fixés. Il apparaît ainsi que ces niveaux minimums d'accises sont inadaptés aux prix trèsvariables pratiqués par les différents États membres. En outre, les règles sur la limitation des achats de tabac par les particuliers dans d'autres États membres sont aujourd'hui peu satisfaisantes et encouragent le trafic transfrontalier. L'article 9 de la directive 92/12 établissant, entre autres critères, un seuil de 800 cigarettes à partir duquel les États peuvent considérer que les cigarettes sont détenues par un particulier à des fins commerciales apparaît trop élevé. Le Gouvernement, conscient de ce problème, a diffusé un mémorandum sur le tabac le 28 novembre 2003. Dans ce mémorandum, la France propose d'étudier avec ses principaux voisins et la Commission européenne les modalités d'un aménagement de la législation en vigueur permettant de renforcer la lutte contre le tabagisme et ses conséquences en termes de santé publique. Les autorités françaises ont proposé - une modification du mécanisme de taxation pour permettre un resserrement rapide des écarts des fiscalités constatés entre les différents marchés nationaux avec notamment une réévaluation très significative du taux minimal communautaire de l'accise applicable aux cigarettes ; une modification du régime des ventes à distance de tabacs afin de lutter contre les fraudes qui conduisent certains opérateurs, situés dans les États membres où les prix sont les plus bas, à développer les envois de tabacs achetés à distance par les consommateurs situés dans les « États membres où les prix sont les plus élevés ; une modification des dispositions de la directive 92/12/CEE, qui permettent actuellement aux particuliers d'un État membre d'aller acquérir et de rapporter, par leurs propres moyens, et à des fins de consommation personnelle des tabacs acquis dans un autre État membre ; enfin, le gouvernement français a proposé que la réglementation communautaire favorise une plus grande implication des fabricants dans la lutte contre les trafics illicites, notamment en matière de traçabilité des flux des produits du tabac. En avril dernier, la Commission a présenté un rapport relatif à l'application des articles 7 à 10 de la directive 92/12/CE relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise, ainsi qu'une proposition de directive du Conseil modifiant ce texte. Aux termes de ce projet, la Commission propose notamment de supprimer les seuils indicatifs actuellement mentionnés à l'article 9 de cette directive, y compris celui relatif aux cigarettes (800 pièces). Cette approche n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle maintient l'obligation pour les États membres de démontrer la nature commerciale de la détention. Ainsi, dès lors que les produits du tabac sont universellement reconnus comme des produits dangereux pour la santé, la France souhaite que la faculté pour les particuliers d'acquérir du tabac dans un autre État membre puisse être restreinte avec l'instauration d'un seuil obligatoire en lieu et place de l'actuel seuil indicatif. La détention desdits produits serait ainsi réputée commerciale dès le dépassement de ce seuil sauf si le particulier démontre que ces produits sont destinés à un usage purement privé. C'est la position que la France soutient à Bruxelles dans le cadre des difficiles négociations en cours sur la révision des articles 7 à 10 de la directive 92/12/CEE, dans l'attente d'une éventuelle révision de la directive 2002/10/CE du 12 février 2002 relative à la structure et aux taux des accises applicables aux tabacs manufacturés, qui doit faire l'objet d'un rapport de la Commission en 2006 et le cas échéant d'une proposition relative aux taux des accises.

Données clés

Auteur : M. Alain Merly

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : affaires européennes

Ministère répondant : affaires européennes

Dates :
Question publiée le 9 novembre 2004
Réponse publiée le 1er février 2005

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