éthers de glycol
Question de :
M. Daniel Paul
Seine-Maritime (8e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
M. Daniel Paul appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la protection sociale sur les dangers que représentent les éthers de glycol. Une décision du 17 septembre, parue au Journal officiel du 16 au 17 octobre dernier, interdit la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de produit de cosmétiques contenant certains éthers de glycol, en raison de l'importance du « risque de toxicité de ces substances pour l'homme ». « L'utilisation de produits cosmétiques comportant ces éthers de glycol est susceptible de faire courir un risque grave pour la santé humaine ». Comment ces éthers, désignés comme dangereux pour l'homme dans les produits cosmétiques ne le seraient-ils pas en milieu de travail, alors qu'ils y sont utilisés en plus grande quantité ? L'expérience de l'amiante où les retards pris dans l'interdiction de son utilisation se solde dès à présent par une catastrophe sanitaire, ne devrait-elle pas servir ? Comme les associations de défense des salariés victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, il souhaite connaître les raisons des tergiversations actuelles sur l'interdiction totale des éthers de glycol. Il demande au Gouvernement si son objectif est bien de les interdire et dans quel délais. - Question transmise à M. le ministre délégué aux relations du travail.
Réponse publiée le 12 avril 2005
L'attention du Gouvernement a été appelée sur la stratégie de protection de la santé des travailleurs exposés aux éthers de glycol et, notamment, sur l'interdiction en milieu professionnel des éthers de glycol toxiques pour la reproduction. Les éthers de glycol appartiennent à une famille de solvants dont une trentaine environ ont donné lieu à une exploitation industrielle dans différents secteurs (peintures, encres, vernis, colles, produits cosmétiques, carburants aéronautiques, produits d'entretien et produits phytosanitaires). En l'état actuel des connaissances scientifiques, neuf d'entres eux présentent une toxicité pour la reproduction avérée chez l'animal et ont été classés, à l'échelon européen, dans la catégorie des substances toxiques pour la reproduction de catégorie 2. Ce classement entraîne automatiquement, en vertu de la réglementation communautaire, dans tous les États membres de l'Union européenne, une interdiction d'incorporation dans les produits à destination du grand public. S'agissant des applications industrielles en milieu professionnel, la stratégie européenne de protection des travailleurs est fondée, en premier lieu, sur l'obligation de substitution, dont le principe figure dans la directive-cadre 89-391 du 12 janvier 1989 et est rappelé dans les directives concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l'exposition à des agents chimiques dangereux - directive 98-24 du 7 avril 1998 - ou à des agents cancérogènes ou mutagènes - directive 2004-37 du 29 avril 2004. Aucun éther de glycol n'a, pour l'instant, été interdit en milieu professionnel dans un Etat membre de l'Union européenne. En France, le cadre juridique assurant la mise en oeuvre de ces mesures est complet. Il a été modernisé et renforcé par le décret du ler février 2001 relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l'exposition à des agents cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction de catégories 1 et 2. Il faut souligner que ce décret va au-delà des dispositions de la directive européenne, puisqu'il s'applique non seulement aux agents cancérogènes et mutagènes, mais aussi aux agents toxiques pour la reproduction. De plus, cette réglementation prévoit des mesures de protection spécifique des femmes enceintes et allaitantes. Afin de s'assurer de la mise en oeuvre de cette réglementation, une campagne spécifique a été menée en 2001, dans le cadre des actions prioritaires de l'inspection du travail. En termes de sensibilisation, plusieurs documents d'information ont été diffusés, avec l'appui de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), et de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Par ailleurs, des journées d'échanges avec les scientifiques ou à destination des professionnels ont été organisées. Les initiatives des pouvoirs publics, comme les efforts des industriels en matière de substitution, qui résultent de la réglementation applicable, ont eu un impact important sur l'utilisation des éthers de glycol connus comme dangereux. Ils offrent des résultats encourageants, qui ne désactivent en rien la vigilance des autorités publiques. Ainsi, en France, selon les données disponibles, les éthers de glycol classés comme toxiques pour la reproduction de catégorie 2 ne représentaient plus, en 2002, que 3 % à 4 % des quantités utilisées en 1993. Par ailleurs, afin de préciser les risques sanitaires que présentent les éthers de glycol, plusieurs études ont été engagées à la demande des ministères concernés et financées ou co-financées par le ministère chargé du travail. Il s'agit notamment d'études de classification et d'évaluation de risques de certains éthers de glycol par l'INRS, et de plusieurs études de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) ayant pour objet d'évaluer les effets potentiels sur la reproduction. L'une des études de l'INSERM, menée auprès des agents de la RATP, est finalisée et sa publication officielle, accompagnée des recommandations éventuelles de l'Institut de veille sanitaire (InVS), doit avoir lieu tout prochainement, l'analyse des résultats de cette étude relevant exclusivement des scientifiques. Par ailleurs, l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) a été saisie en octobre 2003 par les ministères chargés de la santé et de l'écologie, saisine auquel le ministère chargé du travail s'est associé par la suite, en vue de réaliser une étude globale et une synthèse des données toxicologiques et d'exposition concernant les éthers de glycol, notamment à partir de la mise à jour de l'expertise collective de l'INSERM sur ces éthers de glycol. Le principe de la séparation entre, d'une part, l'évaluation indépendante des risques et, d'autre part, sa gestion par les pouvoirs publics, est essentiel. Selon les conclusions des experts, les ministères concernés prendront les mesures appropriées à l'égard de ces substances chimiques. L'expertise en France dans ce domaine devrait d'ailleurs être considérablement élargie dans les prochaines années, avec la création d'une agence publique compétente en santé au travail. La création de cette agence constitue l'un des éléments les plus importants du plan Santé au travail (PST) qui a été présenté le 17 février 2005 au Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels et au Conseil des ministres, le 23 février. Il faut préciser à cet égard que les éthers de glycol évoqués ici ne sont qu'une petite partie des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction de catégories 1 ou 2 utilisées en milieu de travail que cette agence aura à expertiser (251 substances sont classées dans ces catégories, à ce jour, auxquelles s'ajoutent 653 substances complexes dérivées du pétrole et de la houille).
Auteur : M. Daniel Paul
Type de question : Question écrite
Rubrique : Produits dangereux
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : relations du travail
Dates :
Question publiée le 30 novembre 2004
Réponse publiée le 12 avril 2005