décentralisation
Question de :
Mme Ségolène Royal
Deux-Sèvres (2e circonscription) - Socialiste
Mme Ségolène Royal interroge M. le Premier ministre sur les transferts de charge de l'État vers les collectivités territoriales et les compensations financières attendues. Le Gouvernement s'est engagé à compenser ce transfert en toute transparence et à l'euro près. Or, au niveau départemental par exemple, le principe de financement proportionné et pérenne est loin d'être respecté, en particulier pour le transfert du RMI. L'augmentation du nombre de bénéficiaires du RMI due à la dégradation de la situation économique (1,1 million d'allocataires supplémentaires en 2003, soit une hausse de plus de 4,9 % en un an, alors qu'une part fixe de la TIPP a été adjugée aux départements comme seul moyen de compensation) explique le déficit constaté par les conseils généraux qui se chiffre en centaines de milliers d'euros d'avance de trésorerie, alors que la compétence n'est transférée que depuis le 1er janvier 2004. Le transfert des SDIS et de l'APA rajoute par ailleurs encore au déséquilibre financier des départements. Quant aux transferts engagés à compter du 1er janvier 2005 - le plan d'élimination des déchets, le Fonds social du logement, le Fonds d'impayés, ou encore le Fonds d'aide aux jeunes -, aucune information gouvernementale n'est encore disponible. Par conséquent, elle lui demande comment les départements pourront supporter toutes ces charges sans augmenter les impôts. L'asphyxie des finances locales sous le poids des charges nouvelles suscite à juste titre une forte inquiétude mêlée de perplexité pour l'ensemble de nos élus. - Question transmise à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Réponse publiée le 12 juillet 2005
Les transferts de compétences aux collectivités territoriales s'accompagnent désormais de garanties sans précédent au profit des collectivités territoriales, encadrées par l'article 72-2 de la Constitution. Les modalités de la compensation financière aujourd'hui inscrites dans la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales sont le fruit d'échanges nourris et constructifs entre le Gouvernement et la représentation nationale. Comme il s'y était engagé, le Gouvernement a fait preuve d'une grande ouverture au cours des débats, en acceptant plusieurs amendements tendant à rassurer les élus quant au caractère loyal de la compensation des charges résultant des prochains transferts de compétences. La compensation financière des charges résultant des transferts de compétences inscrits dans la loi répond à cet égard à plusieurs principes, tendant à assurer la neutralité de ces transferts tant sur le budget de l'État que sur celui des collectivités territoriales bénéficiaires : la compensation financière sera ainsi intégrale, concomitante, contrôlée et conforme à l'objectif constitutionnel d'autonomie financière. Toutes les dépenses, directes et indirectes, liées à l'exercice des compétences transférées seront ainsi prises en compte dans le calcul de la compensation. Conformément aux dispositions de l'article 119, les charges de fonctionnement seront évaluées à partir de la moyenne actualisée des dépenses consacrées par l'État au cours des trois années précédant le transfert. Les charges d'investissement transférées seront évaluées sur la base de la moyenne actualisée des dépenses sur les cinq années, au moins, précédant le transfert. Il est à souligner que le choix d'utiliser une moyenne triennale pour la compensation des charges de fonctionnement a été introduit par un amendement parlementaire par crainte d'un prétendu « désengagement de l'État » qui aurait rendu défavorable une compensation sur la base du dernier exercice précédant le transfert. Pour assurer le transfert concomitant des charges et des ressources, les collectivités territoriales ont reçu, dès 2005 des ressources dont le montant a été établi à titre provisionnel, donnant ainsi aux collectivités territoriales les moyens financiers d'exercer leurs nouvelles compétences. Elles ont ainsi par exemple reçu 17,69 MEUR au titre du transferts des bourses accordées aux étudiants suivant une formation sociale et 122,56 MEUR au titre du transfert desdites formations, 59,43 MEUR au titre du transfert des bourses accordées aux étudiants suivant une formation sanitaire et 1,93 MEUR au titre du transfert de l'inventaire général du patrimoine culturel. Une fois le montant du droit à compensation définitivement arrêté, il sera procédé aux régularisations nécessaires. L'ensemble des questions posées sur la compensation financière des transferts de compétences sera examiné par la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) que le Gouvernement a mise en place dans des délais très brefs, le 10 mars dernier. Présidée par un élu et désormais composée à égalité des représentants de l'État et d'élus de chaque catégorie de collectivités territoriales, la CCEC est aujourd'hui un lieu privilégié d'échanges et de contrôle, permettant aux élus de s'assurer du caractère loyal de la compensation des charges résultant des transferts de compétences intervenus et à venir. En donnant notamment son avis sur les projets d'arrêtés interministériels fixant le montant de la compensation pour chacune des collectivités territoriales concernées, la CCEC veillera ainsi à l'adéquation entre les charges et les ressources transférées et plus généralement à la justesse de la compensation. Cette commission s'est déjà réunie à six reprises et a déjà examiné la compensation du transfert des routes nationales, des formations sanitaires et sociales et des bourses, de l'inventaire général du patrimoine culturel, du RMI, du STIF et des personnels TOS. Elle examinera prochainement la compensation du transfert du FSL, du FAJ, des CLIC et des CODERPA, et des conventions de restauration. Il est enfin utile d'ajouter, s'agissant du RMI, que le Gouvernement a intégralement rempli ses obligations légales. Au total, après les régularisations intervenues en LFR 2004, il a versé au titre de l'année 2004 la somme de 4,941 MdEUR qui correspond au montant des dépenses exécutées par l'État en 2003. Or, un décalage a été constaté par les départements entre leurs dépenses au titre de 2004 et les versements de TIPP, décalage dû, en l'état des connaissances actuelles, au fort dynamisme des dépenses de RMI enregistrées au cours de l'année 2004. Dans ce contexte, le Premier ministre a annoncé, le 7 mars dernier que « l'État financera le coût exact de la dépense », y compris donc le décalage constaté par les départements au titre de l'année 2004, allant ainsi bien au-delà des obligations légales. Cette compensation sera effectuée au vu des dépenses définitives exécutées par les départements en 2004, c'est-à-dire après exploitation des comptes administratifs des départements en 2004. S'agissant de l'APA, les financements nationaux prévus par la loi du 20 juillet 2001, confiant l'attribution de cette prestation aux départements, se sont avérés très insuffisants pour respecter la règle des deux tiers (par les conseils généraux), un tiers (par le FFAPA) fixée pour le financement de l'APA. Ce n'est donc que grâce aux mesures prises depuis 2003 par le Gouvernement pour rééquilibrer les comptes du FFAPA (emprunt de 400 MEUR) et mettre en place un financement national pérenne de la mesure (affectation d'une fraction de la contribution de solidarité) que cet équilibre a pu être maintenu. S'agissant enfin des SDIS, il est utile de rappeler qu'au travers de mesures telles que le fonds d'aide à l'investissement, le remboursement par l'assurance maladie des transports réalisés par carence du secteur ambulancier, ou le paiement par les sociétés autoroutières des interventions réalisées sur leur emprise, l'État a apporté de nouvelles ressources financières aux SDIS. Dans le cadre de la loi de finances pour 2005, il a transféré aux départements une part supplémentaire de 900 millions d'euros de la taxe sur les conventions d'assurance automobile, en échange d'un montant équivalent de dotation globale de fonctionnement (DGF). Les départements bénéficieront ainsi dès 2006 du dynamisme de cette ressource. En outre, dans ce même souci d'équilibre, l'État prend part au financement de la nouvelle prestation de fidélisation des pompiers volontaires : la contribution de l'État au financement de cette prestation s'est effectuée sous la forme d'un abondement de la DGF des départements à hauteur de 20 MEUR en 2005.
Auteur : Mme Ségolène Royal
Type de question : Question écrite
Rubrique : État
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 14 décembre 2004
Réponse publiée le 12 juillet 2005