Question écrite n° 53399 :
armée

12e Législature

Question de : M. Arnaud Montebourg
Saône-et-Loire (6e circonscription) - Socialiste

M. Arnaud Montebourg attire l'attention de M. le Premier ministre sur les conséquences sanitaires des essais nucléaires. De 1960 à 1996, la France a effectué plus de 200 expérimentations nucléaires dont une quarantaine dans l'atmosphère au Sahara et en Polynésie. De nombreuses personnes ayant participé en qualité de personnels civils ou militaires ou ayant vécu à proximité des sites d'expérimentation font état de graves pathologies notamment cancéreuses, dermatologiques, ophtalmologiques et cardiovasculaires. Outre ces pathologies, de nombreuses études ont clairement démontré le développement fréquent de problèmes de stérilité, de naissances d'enfants handicapés ainsi que de décès prématurés des personnes exposées aux essais nucléaires. Depuis plusieurs années, l'association des vétérans des essais nucléaires (AVEN) milite pour la reconnaissance de l'incidence des expérimentations nucléaires sur la santé des personnes présentes sur les sites et leur descendance ainsi que l'indemnisation qui en résulte. Au préalable, il est demandé aux autorités françaises de procéder à la réalisation d'une vaste étude épidémiologique ainsi qu'à un recensement des victimes civiles et militaires en France et en Polynésie. Concernant le lien de causalité entre la présence sur le site et les pathologies, il est sollicité un assouplissement des règles de la preuve, la législation en vigueur mettant à la charge du demandeur d'apporter la preuve de l'imputabilité au service. De nouvelles dispositions législatives établiraient, alors, un principe de présomption de lien entre l'exposition et l'apparition des maladies dont souffrent les victimes. Eu égard aux inquiétudes et revendications légitimes des personnes exposées et de leurs familles, la France s'honorerait, sans doute, à examiner et, le cas échéant, à reconnaître l'incidence des essais nucléaires sur la santé de ces personnes et à mettre en oeuvre une procédure d'indemnisation à l'instar d'autres pays tels que les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie ou la Nouvelle-Zélande. Ainsi, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement à l'égard des revendications des vétérans ainsi que les suites réservées à la proposition de loi du 17 janvier 2002 relative au suivi des conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires. - Question transmise à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

Réponse publiée le 15 février 2005

Dans son rapport publié en février 2002, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a dressé l'historique des essais nucléaires français et étrangers et a analysé les études dosimétriques effectuées. Dans leurs conclusions, les auteurs de ce rapport reconnaissent que les mesures déjà engagées répondent aux besoins et indiquent notamment qu'il n'y a pas lieu de transposer en France des mécanismes de prise en charge utilisés dans d'autres États, compte tenu de la couverture sociale en place dans notre pays. En effet, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'indemniser tout militaire qui, s'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité, peut, à tout moment, utiliser la démarche d'imputabilité par preuve. Celle-ci peut être admise à partir d'un faisceau de présomptions. Ainsi, en l'absence d'une preuve indiscutable, un ensemble de circonstances permet d'admettre l'imputabilité. Concernant les essais nucléaires, des pensions ont pu être concédées près de vingt ans après la date du fait générateur. La législation actuelle autorise donc, même longtemps après les faits, une indemnisation équitable des dommages physiques subis, sans qu'il soit nécessaire de mettre en oeuvre un régime de présomption de causalité pour le seul risque nucléaire. Sur le plan des conséquences sanitaires des expérimentations, il doit être précisé par ailleurs que, dès la fin des essais, deux études épidémiologiques ont été confiées à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), portant sur la mortalité et la morbidité des cancers en Polynésie française. Leurs résultats sont publics et deux nouvelles études ont été diligentées sur ce sujet. Le registre des cancers en Polynésie française est, compte tenu de ces travaux, régulièrement mis à jour et doit continuer à l'être afin que soit poursuivie la veille sanitaire mise en place par le gouvernement de ce territoire. En tout état de cause, le suivi médical ainsi que celui des conditions de travail de l'ensemble du personnel ayant participé aux expérimentations nucléaires françaises à Mururoa ou à Fangataufa en même temps que la surveillance de l'environnement radiologique de la population de la Polynésie française, n'ont pas permis de déceler des expositions aux rayonnements ionisants significativement supérieures à la radioactivité naturelle. L'ensemble de ces études et leurs résultats peuvent être communiqués aux personnes concernées par cette question. La loi relative aux droits des malades est appliquée et chacun des dossiers est instruit et examiné avec toute l'attention légitime et nécessaire, dans la plus totale transparence. Ce dossier fait également l'objet d'un suivi interministériel. C'est ainsi que les ministres de la santé et de la défense ont chargé, le 15 janvier 2004, le directeur général de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) et le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND) de piloter conjointement un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des conséquences des essais nucléaires aériens et souterrains au Sahara et en Polynésie française. Ce comité est composé de représentants du ministère de la défense, du ministère chargé de la santé, des instituts et agences concernés, des responsables de la défense et du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en charge des essais nucléaires, qui peuvent s'entourer en tant que de besoin des personnes qu'ils jugent utiles. Le pilotage du comité est assuré conjointement par le DGSNR et le DSND. Le comité se réunit au moins deux fois par an et un premier rapport annuel remis aux ministres de la santé et de la défense sera rendu public à la fin du premier semestre 2005.

Données clés

Auteur : M. Arnaud Montebourg

Type de question : Question écrite

Rubrique : Défense

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : anciens combattants

Dates :
Question publiée le 14 décembre 2004
Réponse publiée le 15 février 2005

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